jeudi 26 novembre 2015

21 nuits avec Pattie d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu



La promo de dernier opus des frères Larrieu dispose de trois bandes annonces mettant chacune en avant un des personnages principaux. Dans les cinémas dans lesquels je me rends, je n'ai étrangement eu l'occasion de voir que celle tournant autour de la Pattie du titre, interprétée par Karin Viard, quarantenaire décomplexée, parlant de ses nombreuses aventures sexuelles avec une verdeur et une sincérité réjouissantes, donnant au film une connotation de film érotique franchement assumé. Les deux autres teasers ( découverts sur le net), même s'ils mettent encore en avant la truculence de Pattie, brouillent un peu les pistes en dirigeant le projecteur sur Caroline (Isabelle Carré) qui semble bien inquiète après la disparition du corps de sa défunte mère  et de Jean ( André Dussollier ) s'énervant après quelqu'un de vraisemblablement nécrophile. Eros et thanatos encore une fois réunis  dans ce qui est vendu comme une comédie grivoise et légère et qui se révèle au final comme une joyeuse compilation de ce qui a fait (ou pas) le charme des précédents films des réalisateurs. La partie polar (comme dans L'amour est un crime parfait ) est assurée par la vague enquête autour de cette défunte disparue mais ne prend jamais le pas sur un fond plus psychologique autour du sexe, du plaisir et de la libido perdue et sur une note beaucoup plus épicée et rare au cinéma qu'est la nécrophilie ( comme ils avaient traité de l'échangisme dans "Peindre ou faire l'amour").
Mais nous sommes chez les frères Larrieu. Ils aiment traiter de sujets lestes et parfois un peu scabreux mais dans un dispositif mi naturaliste, mi fantastique qui déroutera sans doute les amateurs de comédies franchouillardes qu'une Karin Viard évoquant, sur tous les médias,une bite au fond de sa chatte, peut induire en erreur. Oui, on parle de sexe dans leur dernier film mais uniquement de façon orale...je veux dire par là qu'il n'y a que des mots pour le mettre en branle, les images sont réservées à l'imagination du spectateur. Et quand on aborde la nécrophilie, c'est souvent par le biais de l'humour et surtout de textes littéraires. La comédie à l'aspect facile des bandes annonces, vire bien au film d'auteur, avec quelques jokes pour les cinéphiles comme ces références aux fantômes ou à des animaux mystérieux rôdant dans les forêts d'Apichatpong Weerasethakul.
Cependant, on y retrouve ce qui fait habituellement la toile de fond des films des Larrieu : la nature lumineuse, accueillante dans laquelle évoluent des hommes et des femmes aux corps libres et à la sexualité simple et naturelle. Seul le personnage principal, Caroline, parisienne perdue dans ce village de l'Aude, sorte de Bécassine frigide va se cogner au contacts de tous ces gens à la sensualité si cordiale. Elle est un peu le regard du spectateur. Elle écarquille les yeux, n'en croit pas ses oreilles. Mais si comme elle vous acceptez de vous laisser aller à l'hédonisme ambiant, vous aimerez ce film un peu hors norme, sinon, vous risquez soit d'être un poil choqué (et pourtant Madame Figaro est partenaire de la chose !), soit perdre pied dans cet univers à nul autre pareil.
Magnifiant un  casting 4 étoiles (où Denis Lavant confirme après "Holly motors" qu'il est une bête de sexe), l'image est absolument superbe. Chaque plan, jamais ostentatoire, est d'une lumineuse beauté et en parfaite harmonie avec le monde décrit par les frères Larrieu, finalisant de son bel écrin ce film tout simplement fait pour le bonheur.



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