mercredi 30 mai 2012

L'ours à collier de Jasmin Schäfer


Voilà un album qui me laisse perplexe. J'ai eu beau le relire plusieurs fois, je ne vois vraiment pas ce qui a pu donner à un éditeur l'idée de le publier. Et je vois encore  moins à qui il peut s'adresser....
Aux enfants bien sûr, mais lesquels? Aux enfants qui aiment les ours ? Sûrement, sauf qu'ici beaucoup risquent d'être déçus. L'ours à collier a une drôle d'allure : il est gros, mais avec de toutes petites pattes et de toutes petites oreilles. Un ours d'artiste...
Alors, peut être que cet album s'adresse aux enfants qui aiment les ours et qui sont sensibles à l'art.
Sûrement, c'est à mon avis, sa principale qualité : il est entièrement en noir et blanc, avec un beau dessin  fin (à la plume?) du plus bel effet. Chaque illustration pleine page est empreinte d'une certaine poésie, jamais en redondance avec le texte lui faisant face. Mais comme ce texte est souvent un peu décalé, du genre : "C'est si petit le monde... se dit-il parfois" ou " Il a aussi pris le train à travers la Forêt Noire "...
Le lecteur potentiel doit donc apprécier les ours tout en étant sensible à l'art mais aussi à la poésie et à la philosophie...
Hmmm, ça réduit le potentiel des futurs acquéreurs...
Moi, je rajouterai que ça peut plaire aussi aux adeptes des albums "Emilie" ( vous savez la petite fille rouge et son hérisson qui ont fait le bonheur des enfants des années 70) car on retrouve un texte avec les mêmes gros caractères scripts. Mais aussi aux lecteurs de Tchoupi, car eux aiment quand il n'y a pas de vraie histoire et que l'on saute du coq à l'âne au fil des pages.
Donc, si je résume, le lecteur ciblé pour "L'ours à collier" est un enfant artiste, philosophe, poète qui aime aussi les "Emilie" et les "Tchoupi".... Rare ?
Non ! C'est quasiment la description type de l'acheteur d'album pour enfants : je veux parler du parent.
Comme ce sont eux qui ont la carte bleue, on dit bravo aux éditions Autrement : ciblage parfait ! Les ventes seront bonnes... ou pas. Parce que vraiment, il faut être ou très pressé ou le trouver en solde pour offrir un tel album à un enfant.... Ou alors aimer les dessins en noir et blanc à la plume  qui sont ici très réussis. Mais est-ce suffisant pour dépenser 14,50 euros?



lundi 28 mai 2012

Mon premier album genre Panninni de GiedRé


Les pages "rebonds" de Libération sont souvent déclencheuses d'envies. Il y a une dizaine de jours, le portrait d'une jeune chanteuse franco/lituanienne m'a tout de suite donné le désir de l'entendre toute affaire cessante. 
Moi, quand je veux écouter un chanteur, une chanteuse, je file sur une plateforme de téléchargement légale (oui, ça existe des gens comme moi qui trouvent qu'ils font des affaires en téléchargeant légalement,  c'est moins cher qu'un CD et instantané). Seulement avec GiedRé, il ne faut pas être pressé. Absente d'Itunes ou Amazon, elle s'autoproduit mais de manière assez originale. 
Il faut aller sur  (http://www.giedre.fr/) son site très coloré genre Heïdi découvre la rue Saint Denis, acheter son disque en payant Paypal, disque que l'on recevra par la poste dès que la chanteuse aura réussi à trouver le temps de l'expédier, paraît-il elle même, avec ses petits doigts, dans le bureau de poste de son quartier.
En effet, quelques jours plus tard, arrive une enveloppe contenant un petit livret tout joli (avec même une photo de Jean Pierre Pernaud dessus ) accompagné d'un sac de petites images autocollantes mais toujours pas de CD.
Son disque s'appelant "Mon premier album genre Panninni", il nous faut donc jouer le jeu. J'ouvre donc la petite pochette de vignettes et commence à coller la première. Mais je me ravise très vite car, sur les emplacements, sont écrits des textes totalement décalés et drôles qu'il serait dommage de cacher.
Je range donc les images dans leur pochette non sans avoir gratté la pellicule grise posée en leur milieu. Plaisir intense et régressif pour un non gratteur de Tac o tac... Et c'est là qu'apparaissent des petits codes que je ne révélerai pas, qui, une fois écrits sur le site de la chanteuse permettent de télécharger les 8 titres. (Vous suivez ?)
Pendant le téléchargement, on a juste le temps de parcourir le livret qui est un hommage déguisé au défunt Hara Kiri du professeur Choron mais en version girly. C'est pipi, caca, avec ses tests trashs et ses fausses pubs pour cache-anus ( normal pour une chanteuse qui chante, entre autre, la sodomie). C'est potache, cru et drôle. GiedRé ne se positionne pas du tout en rivale de Céline Dion ou de Sh'ym mais évoque plutôt de lointaines consoeurs défuntes d'avant et d'après guerre qui faisaient les beaux jours des cabarets avec des chansons lestes et rigolardes.
Ce que confirme l'écoute des 8 titres proposés au niveau un peu inégal. Les thèmes abordés sont originaux : des handicapés qui vont aux putes, un prisonnier qui goûte à d'autres sexualités, un repas au restaurant avec des arrières pensées, le viol, ... D'autres plus décevants (au regard de ses premiers titres) : le parcours d'un ver de terre, ...
Uniquement accompagnée d'une guitare sèche, GiedRé balance ses chansons aux textes crus comme, hélas, la réalité, avec bonne humeur, d'une voix bien timbrée. C'est drôle mais surtout grinçant, proche du sketche. C'est assez original dans le paysage un rien formaté de la chanson française actuelle.
Personnellement, je ne pense pas écouter ça tout l'été en boucle. Ca manque un peu d'arrangements, d'instruments. Par contre, si la chanteuse se produit par chez moi, assister à un de ses concerts doit être assez plaisant car ses chansons sont faites pour la scène. A découvrir donc, en live, pour passer une bonne soirée dans un genre comique/trash et puis plus si affinité. 
Une idée de ce qu'est GiedRé avec une chanson douce et "gentille" de son précédent album :

dimanche 27 mai 2012

Cosmopolis de David Cronenberg




La limousine de David Cronenberg est très confortable, digne de l'homme le plus riche du monde mais son film l'est beaucoup moins.
Quitte à parler argent, un des sujets de "Cosmopolis", autant économiser le sien  en faisant l'impasse sur ce film sauf si vous aimez les dialogues amphigouriques, les plans sursignifiants et les situations conceptuelles qui peuvent rendre un film formidablement intelligent ou bien totalement obscur ou abscons. Ici, je choisis donc la deuxième hypothèse.
Il faut du courage au spectateur pour rester dans la salle pour suivre les errances de ce golden boy, vautré dans sa limousine et ses certitudes. Entre les logorrhées interminables du début sur l'argent et le capitalisme, celles encore plus ennuyeuses de la gourou sur le cybercapital et les dialogues fumeux du très long face à face de la fin, ma patience a été mise à rude épreuve.
Il faut le dire, quelquefois on rit, jaune, devant certaines scènes :
Voir Juliette Binoche se faire sauter sur les genoux de Bob Pattinson, puis se rouler comme une chienne en chaleur sur les sièges de la limousine tout en dissertant sur l'achat d'un Rothko est assez grotesque.
Admirer la pointe d'excitation de Bobby Pattinson (ici sortant un peu de l'état inexpressif qu'il arbore tout le reste du film) pendant un examen de sa prostate lors de son check-up quotidien pourrait devenir une scène culte mais dans la catégorie ridicule. Il semblerait pourtant que la prostate asymétrique du puissant financier soit la clef du film... Je ne suis pas assez spécialiste dans ce domaine. Si vous êtes urologue et que vous avez compris, expliquez-moi.
Et je vous passe les scènes du golden boy avec sa femme, blonde et réfrigérante, qui frisent le non-sens à moins que ce ne soit une magnifique réflexion sur l'argent et le couple, notions appréciées par une critique au garde à vous, mais évacuées par le spectateur lambda que je suis parce que déjà gagné par un ennui abyssal.
Evidemment, David Cronenberg sait manier une caméra, variant les angles, jouant avec la lumière, exploitant au mieux l'intérieur de cette limousine high-tech, mais à trop vouloir jouer les intelligents, en jetant sur l'écran des éléments signifiants en veux-tu en voilà, il noie son film qui devient un vrai pensum. Le spectateur, incrédule, assiste, impuissant, au naufrage. Robert Pattinson, le charisme resté au vestiaire, joue platement dans un film qui, quoiqu'en dise la presse, ne devrait pas le faire entrer dans la cour des grands. Ici, il est le jouet des producteurs s'offrant une tête d'affiche dans l'espoir d'attirer les foules. Les midinettes du fonds de commerce de Bobby risquent de décrocher leurs posters des murs de leur chambre après la vision de ce cet insupportable et grandiloquent ratage.
Plus : mon avis sur le précédent Cronenberg : a dangerous méthod

samedi 26 mai 2012

Noir de Jean Claude Götting


Noir(e) la couverture de ce petit polar format manga, même si le titre, lui, est en blanc.
Noir(es) les premières cases de cet hommage aux films noirs américains des années 50, avec la mise à mort d'un type du haut d'une falaise, la nuit.
Noir le chien retrouvé noyé dans la piscine de la richissime Mme Boyle, qui a l'air de broyer du noir dans son intérieur luxueux (à moins que ce ne soit l'ennui qui l'habite).
Noir(e) la vie de ce brave ouvrier polonais, qui réparant illégalement la voiture de Mr Boyle, à l'âme mafieuse bien noire, se fait illico virer de son boulot. 
Moins noir à priori le destin du même maintenant chômeur polonais qui se rend chez Mr Boyle, armé de la carte de visite qu'il lui avait laissé. Un nouveau travail (au noir) lui est offert.
Noir(e) l'encre du stylo avec lequel Mme Boyle écrit son numéro de téléphone sur un bristol, avec le secret espoir de revoir plus intimement ce joli petit polonais.
Noir apparaît le nouveau chemin emprunté par l'ex mécano. Son nouveau boulot consiste à descendre un type...
Vraiment très noir le destin qui semble se profiler à l'horizon pour celui qui va se laisser tenter par les charmes de veuve noire de Mme Boyle.
Noir, c'est vraiment le ton de cette petite fantaisie policière, au découpage précis et soigné. 
Noir(e) très sombre, la gamme de tons employés par l'auteur pour illustrer cette histoire peu bavarde et vite lue. 
Noir(es) mais absolument superbes les illustrations de Jean Claude Götting, chaque vignette pourrait faire l'objet d'une mise en cadre (noir bien sûr).
Gris est cependant mon avis pour ce petit exercice de style réussi mais manquant peut être un peu d'envergure.


vendredi 25 mai 2012

Z comme Don Diego de Fabcaro et Fabrice Erre


Décidément le strip d'une demie planche doit être à la mode chez les éditeurs, puisqu'après "Les aventures de la fin du monde " dont j'ai parlé il y a quelques jours ICI, voici que sort chez Dargaud le premier tome de la série " Z comme don Diego", sous titré "Coup de foudre dans l'hacienda".
Vous le devinez déjà, il s'agit d'un pastiche du Zorro de Walt Disney, la célèbre série de mon enfance.
On y retrouve bien Bernardo et le sergent Garcia, assez proches de ce qu'ils étaient dans le feuilleton télévisé. Par contre, c'est au sémillant Don Diego à qui les auteurs ont donné une sérieuse transformation. Incapable d'assumer sa double personnalité, en bute aux quolibets des amis qui le prennent plus pour un homo que pour un héros valeureux, Don Diego se révèle être un parfait crétin, plus bête que méchant. Dans ce premier épisode, il va tomber amoureux de de la senora Sexoualidad, fille du nouveau gouverneur et faire des pieds et des mains pour lui prouver sa bravoure et se faire aimer d'elle.
Pas toujours dans la dentelle, un brin potache, ce premier tome est tout de même très plaisant à lire. Rire et humour sont au rendez-vous même si certains strips sont un peu inégaux. Jouant avec les codes de la série bien connue, les auteurs arrivent à créer une ambiance totalement bouffonne teintée de non sens. Arrivé à la fin de l'album, on commence à y prendre vraiment goût. Pour moi, c'est sûr, j'achèterai le deuxième tome sans hésitation. 
Pour l'anecdote, le dessinateur Fabrice Erre est le frère de JM Erre, l'auteur de romans hautement humoristiques ( dont je vous ai parlé ICI ). Le talent a donc frappé deux fois à la porte des Erre...



jeudi 24 mai 2012

Tanger 54 de Mona Thomas


Le point de départ de ce livre est un rêve de chineur : trouver un dessin qui est peut être réalisé par un grand artiste et que l'on achète trois francs six sous sur un vide-grenier. C'est ce qui arrive à l'acteur Gérard Desarthe, sur le marché de Beuzeville. Il déniche un portrait au pastel sur lequel est écrit, comme une signature, Will.S Burroughs - Tanger 54. La critique d'art et auteur de ce livre, Mona Thomas déjeune ce dimanche là chez l'acteur et est tout de suite intriguée par ce dessin. Elle décide par passion mais aussi par amitié de trouver qui a bien pu exécuter ce pastel. Commence alors une longue enquête qui va nous mener dans le Tanger trouble de l'après-guerre et dans le Londres de Francis Bacon.
Cela aurait pu être un polar haletant et passionnant dans le milieu de l'art qui, de découvertes en découvertes, nous aurait conduit vers le peintre inconnu. Cela ne l'est pas, l'auteur profite plutôt de ses recherches pour nous raconter le Tanger mythique des années cinquante avec ses artistes vivant leur homosexualité (voire leur pédérastie) sans contrainte. Raconter est un bien grand mot, évoquer serait plus approprié. Ici aucune linéarité, simplement des moments, des périodes nous sont décrites au gré de des suppositions ou des trouvailles. Les questions tournent souvent autour de la présence ou non en 1954 de tel peintre ou tel écrivain. C'est un peu décousu, pas réellement passionnant pour un lecteur lambda non spécialisé. On y apprend tout de même les us et les coutumes d'un certain tourisme sexuel, on y croise Paul Bowles, ses amants, sa femme mais aussi Jack Kerouac qui aimait les jeunes marocains et surtout Francis Bacon qui a beaucoup séjourné là-bas. La deuxième partie du livre va  s'intéresser plus longuement à Bacon car on le soupçonne d'être peut être l'auteur ou alors l'inspirateur du pastel mystérieux. Ici aussi, évocation de quelques moments de la vie du grand peintre britannique, toujours de façon un peu disparate, plombe un peu plus le livre.
 Je suis arrivé au bout de ma lecture car j'avais envie de savoir si ce pastel était vraiment une bonne affaire pour Gérard Desarthe. La quatrième de couverture, bonne vendeuse, annonce un épilogue sidérant et lumineux... Son auteur avait du manger de la confiture de dattes au hash pour écrire ça, car on est loin du compte. 
Erudit assurément, "Tanger 54" , avec une bonne idée de départ, mais hésitant constamment entre roman pseudo policier et biographie, laisse comme un goût d'ennui malgré la présence d'artistes disjonctés et hauts en couleur. 


mercredi 23 mai 2012

Quand soudain, il se passa quelque chose de plus magique encore ! de Bertrand Santini


Je l'avoue, je ne connaissais pas le précédent album de Bertrand Santini (Quand soudain, il se passa quelque chose de plus terrible encore ! édité aux éditions de la balle) qui pourtant avait, parait-il, fait son effet lors de sa parution en octobre 2011. 
Ce deuxième volume d'une série intitulée "Quand soudain", est pour moi une vraie découverte et donc une invitation à découvrir sans attendre le précédent.
La première remarque que l'on se fait une fois refermé l'album, est que l'auteur a gardé son âme d'enfant et qu'il connait parfaitement bien le public auquel il s'adresse. Sur une trame simple mais imaginative, toute la panoplie de ce qui fait rêver un marmot est convoquée : dinosaure, sorcière, loup, baleine, fusée, pipi, caca, magie, ... mais ici au service d'un album léger et inventif comme un jeu d'enfant. Jouant sur la surenchère, la répétition et la surprise, le texte est simple et précis. Ici, pas de fioritures ni de verbiage, tout est au service d'une compréhension immédiate. Ce qui est plus surprenant, est le parti-pris graphique : tout un jeu d'ombres chinoises mélangées avec des éléments créés via un ordinateur donnant un côté moderne et original tout à fait bienvenu.  
Même si les personnages en ombre chinoise évoquent les films de Michel Ocelot (*), cet album est une vraie curiosité et aussi un vrai plaisir à lire à haute voix à des enfants à partir de 3/4 ans et jusqu'à.... pfff, tant qu'on a encore un bout d'enfance dans la tête.
Espérons par contre que ce qui s'annonce être un série, saura s'arrêter avant que l'on ne sente le filon un peu trop juteux pour continuer à avoir une vraie saveur.
(*) Les éditions de la Balle est une jeune maison d'édition qui réunit des auteurs ayant travaillé dans l'animation. Peut être que Bertrand Santini a travaillé sur Princes et princesses...
P S : album lu et relu,  très très apprécié dans une classe Maternelle d'enfants de 3/4 ans. Un vrai best-seller !







mardi 22 mai 2012

Les aventures de la fin du monde de Vincent Caut

Pour moi les auteurs de strips sont des génies de la bande dessinée. Créer un univers en gags 4, 6 ou 8 cases, se renouveler constamment, faire évoluer ses personnages, demande une imagination et une capacité de création exemplaire.
"Les aventures de la fin du monde" de Vincent Caut, jeune auteur de vingt et un ans, série de strips autour d'un postulat de départ très minimaliste force l'admiration.
La fin du monde a eu lieu. Il n'y a que deux survivants Mr Adam Tourpin, et sa secrétaire Eve Billot. Ils sont seuls sur terre, ont des rapports de chef à subalterne (de macho à femme aussi). Ils sont forcés à cohabiter et elle, n'a aucune envie de se reproduire avec son compagnon d'infortune.
Sur une trame qui aurait pu dévier vers du graveleux, l'auteur préfère un humour décalé en introduisant Dieu (sous la forme d'une pomme), des extraterrestres et des tamanoirs. Tout ce joli monde va nous permettre de revisiter la Genèse, égratignant au passage un texte trop sacré avec un humour communicatif et bienvenu. C'est fin, drôle, totalement irrésistible, bourré de clins d'oeil.
Le graphisme est simple, le fait que les personnages n'aient qu'un visage sans yeux ni nez donne un côté moderne à un genre plutôt classique (qui rappelle vaguement "Retour à la terre" de Ferri et Larcenet, même format et humour assez proche, je trouve). Le seul reproche que l'on puisse faire à cet album au format à l'italienne, c'est sa brièveté. J'aurai bien aimé rester plus longtemps avec Adam et Eve version 2012, une seule centaine de strips... Espérons qu'il y aura une suite mais la dernière planche ne me laisse pas beaucoup d'espoir.
Vous pouvez retrouver le nouvel univers de Vincent Caud sur son blog de dessin qui est ici :
Les aventures de la fin du monde de Vincent Caud sont éditées aux éditions 12 bis et coûtent 13,90 € (le prix de la qualité et d'un talent très prometteur).

samedi 19 mai 2012

Seins et oeufs de Mieko Kawakami


Mieko Kawakami a été élue femme de l'année au Japon en 2008 par le magazine Vogue. C'est à ce titre je présume qu'elle doit la parution la même année de ce roman ou grande nouvelle selon son humeur, que viennent de traduire les éditions Acte Sud.
Roman contemporain par excellence, "Seins et oeufs" nous donne quelques nouvelles des femmes japonaises et si je me fie à ma lecture, elles ne sont pas très bonnes.
Nous faisons la connaissance de Makiko, quarante ans et de sa fille Midoriko, 12 ans. Elles viennent passer deux jours à Tokyo chez Natsu, trente ans, soeur et tante des deux précédentes. Makiko ne vient pas pour le plaisir mais pour se rendre à la consultation d'une clinique huppée dans le but de se faire refaire les seins. Obnubilée par sa poitrine, la communication avec sa soeur et sa fille se résume au minimum syndical. Moins que ça, puisque sa fille ne lui adresse plus la parole, les échanges se réduisant à quelques mots écrits. Voilà pour les seins du titre. Quant aux oeufs, se sont ceux qui s'écoulent lorsque les règles arrivent et qui dégoutent fortement la  femme en devenir qu'est Midoriko, vouant une haine dévorante à ses futures menstrues et l'écrivant dans son journal intime qui nous est livré au fil de l'histoire.
Roman sans homme puisqu'ici réduit en géniteur inconséquent et envolé, " Seins et oeufs" nous montre des japonaises déclassées,vivotant grâce à des boulots sans gloire, mais dont la fièvre consumériste les atteint de plein fouet jusque dans leur corps. Incapable d'assumer sa petite vie de serveuse, Makiko veut s'offrir de nouveaux seins pour qu'enfin dans sa vie elle ait quelque chose de réussi. Sa fille, représentante de la nouvelle génération, en réaction, semble prendre la voie de la nulliparité. Reste Natsu, la soeur cadette qui assiste impuissante mais le coeur plein de tendresse et de compréhension à cette guerre larvée. Sa vie semble vouée à pas grand chose, seule dans un minuscule appartement.
Roman sur la féminité et sa représentation, "seins et oeufs" se lit vite et n'a pas provoqué chez moi une grande passion. Je sens bien toutefois qu'il dit des choses profondes et interroge de façon sensible le rapport des femmes avec leur corps. Peut être ne suis-je pas le bon lecteur. Pas assez féminin sans doute...






vendredi 18 mai 2012

De rouille et d'os de Jacques Audiard


Difficile de résister à la sono cannoise nous martelant toute la journée du jeudi 18 mai que "De rouille et d'os" était la future palme, que c'était un coup de poing en pleine face que les festivaliers avaient reçu, bref le chef d'oeuvre absolu de... la journée.
Voulant faire mon petit festival à moi, mais en région, j'ai vu le nouveau Jacques Audiard, cinéaste éminent et ayant un avantage sur beaucoup d'autres de ses confrères : il a le ticket, celui qui lui permet d'être systématiquement encensé dans toute la presse française sans exception.
Résultat : très bon film, oui, chef d'oeuvre, peut être mais pas pour moi.
Il est indéniable que Jacques Audiard est un grand réalisateur, avec des thématiques fortes, viriles et un sens inné du plan alambiqué mais jamais gratuit. Ici, c'est en virtuose de la caméra qu'il se pose et qu'il réussit à nous embarquer dans son histoire. Fouillant l'intime, traquant le moindre frémissement de ses acteurs, il donne à son film une densité incroyable, arrivant à rendre Marion Cotillard absolument juste et émouvante.
Et il en faut du talent pour arriver à captiver le spectateur avec cette rencontre assez improbable entre un gars déclassé, bloc de chair et de muscles, atrophié du cerveau et amputé des sentiments et une fille battante et rude, confrontée au handicap suite à un accident de travail. La caméra va les suivre, sans concession ni pudeur. Elle va surtout s'attacher à Ali, déclassé, vivant de sa force dans des boulots de videurs ou de gardiennage, puis en boxeur pour combats clandestins. Jacques Audiard tient là sa note sociale, filmant sans concession une Côte d'Azur loin des clichés touristiques, montrant qu'à l'arrière des plages privées et des hôtels de luxe, survit un prolétariat rendu invisible par les parasols et les paillettes. 
Ali, c'est Matthias Schoenaerts, déjà apprécié dans Bullhead, qui confirme ici sa stature d'acteur emplissant  l'écran de ses muscles. Il lui reste cependant à prouver qu'il n'est pas qu'un tas de chair quasi muet dans lequel ses deux derniers films semblent le cantonner.
Seconds rôles parfaits, musique au top, effets spéciaux bluffants ( les moignons de Marion Cotillard, qui a du tourner avec des collants verts), tout concourt à ce que ce film soit parfait, ce qu'il est presque. Presque parce qu'à trop vouloir mixer les nouvelles d'où est tiré ce film (recueil de Craig Davidson chez Albin Michel), le scénario, à mon goût se prend les pieds dans le tapis avec la toute dernière partie. Je sais bien qu'il fallait qu'Ali arrive à casser sa carapace (la glace) et exprimer ses sentiments longtemps refoulés mais la tonalité un peu convenue et lourdement symbolique des dernières séquences m'a un peu refroidi (c'est le cas de le dire!).
Malgré cette petite réticence très personnelle, " De rouille et d'os" est un film qui secoue, remue, joue avec les nerfs et les sentiments du spectateur avec talent et invention. Un candidat très sérieux pour un prix à Cannes.


jeudi 17 mai 2012

Moonrise Kingdom de Wes Anderson




Pour une fois, en observant l'affiche du nouveau Wes Anderson, il n'a pas tromperie sur la marchandise. L'atmosphère qu'elle dégage est la même que celle que vous trouverez dans le film, un généreux mélange d'enfance, d'esprit décalé, de subversion et d'hommage à une Amérique plus rêvée que réelle.
En situant l'action de "Moonrise kingdom" dans une île perdue et peu peuplée, le réalisateur enferme ses personnages dans un monde à part. Ils deviennent les protagonistes d'une histoire inventée par un grand enfant, les déplaçant au gré de ses envies comme s'il jouait avec ses Playmobils. En avant les histoires donc, mais attention le talent, l'oeil et les thématiques d'un cinéaste en plus !
Il était une fois, une île peuplée d'un camp scout, d'une famille nombreuse bourgeoise au bord de l'implosion , d'un flic et d'une standardiste. Conjointement, Sam, scout ostracisé par le reste de la meute et Suzy, préado en révolte fuguent et, tout en mettant la région en ébullition, vivent leur première histoire d'amour. Une course poursuite s'organise alors qu'une tempête mémorable s'annonce...
Avec ce canevas classique, on suit l'histoire sans ennui. Mais ce qui aurait pu être un film lambda sur l'enfance, devient ici un objet intrigant et jouissif. 
Tout d'abord, il y a une mise en image très picturale, décalée, jouant avec les couleurs et les arrières-plans, évoquant les illustrations de Norman Rockwell et tous ces tableaux typiquement nord-américains avec leurs phares rayés rouge et blanc et leurs maisons en bois paisiblement posées dans des forêts accueillantes.
Ensuite, il y a une mise en scène très cartoonesque, multipliant les plans aux cadres surprenants mais jamais gratuits, en parfaite adéquation avec le propos et l'esprit d'enfance qui règne ici.
Autre point fort, le regard porté aux personnages : les deux préados sont totalement hors cliché. Lui, scout vaguement intello est plus adulte que tous les adultes qui l'entoure tout en restant très enfantin. Elle, est une lolita à l'envers, séduisant un garçon aux rondeurs pouponnes dont on pourrait penser que la sexualité est totalement endormie par des années de camp scout.
Les adultes, interprétés avec jubilation par une pléiade de têtes d'affiche (Bruce Willis, Bill Murray, Frances Mc Dormand, Edward Norton et Tilda Swinton franchement hilarante en responsable de services sociaux adepte des traitements par électrochocs ) sont ici des pantins de chair dont les quelques certitudes auxquelles ils s'accrochent encore vont se trouver malmenées dans ce vent de folie.
Même si on a l'impression que toute cette ambition visuelle, lorgnant vers l'absurde, écrase un peu l'émotion, "Moonrise kingdom" est un film rempli comme le coffre à jouets d'un enfant occidental. Ludique, visuellement splendide, je suis sûr qu'il supporte de nombreuses visions car Wes Anderson et son scénariste ont semé partout des clins d'oeil, des sous-entendus, des pistes d'une incroyable richesse.
Encore un film culte ? Peut être, en tous les cas une entrée en matière formidable pour le festival de Cannes qui ne nous avait pas souvent habitué à un film d'ouverture de grande qualité.




mardi 15 mai 2012

Alex de Pierre Lemaitre


C'est avec empressement que je me suis jeté dans la lecture du dernier polar de Pierre Lemaître. J'avais déjà lu et énormément aimé "Robe de marié" et "Cadres noirs", de véritables "tourne-pages" au rythme hallucinant qui m'avaient impressionné par leur écriture simple mais efficace et leurs intrigues parfaites.
Contrairement a beaucoup de monde, si j'en crois les nombreux avis lus sur la toile, ce roman m'a moins passionné. Je vais essayer de vous donner mes réticences sans pour autant déflorer cette histoire, quand même passionnante mais pas vraiment aboutie à mon goût. 
Au début du livre nous faisons la connaissance d'Alex, jeune femme très jolie mais seule qui se fait kidnapper et enfermer, nue, dans une toute petite cage en bois suspendue dans un entrepôt humide à deux mètres du sol. Son ravisseur lui dit simplement qu'il va la regarder crever. Nourrie de croquettes pour animaux et d'un peu d'eau, les muscles tétanisés, elle va vivre un enfer surtout quand, pour lui tenir compagnie, son ravisseur lui offre la présence de quelques gros rats. 
Dans une ambiance beaucoup plus glauque que dans ses précédents romans, Pierre Lemaître embarque tout de suite son lecteur. Cette première partie est haletante, rappelant un peu l'atmosphère de "Mygale" de Thierry Jonquet. Mais arrive un premier rebondissement qui va faire passer petit à petit Alex de victime à méchante. Ce retournement de situation est une très bonne idée, seulement j'ai trouvé cette deuxième partie un tantinet un peu longuette, assez violente et répétitive, le tout ralenti par les états d'âmes professionnels (ça d'accord, c'est bien vu) mais aussi personnels (là, c'est assez cliché et ça n'apporte rien à l'intrigue ou si peu). 
Puis la troisième et dernière partie va éclairer d'une manière encore différente ce personnage d'Alex. Jouant avec le lecteur et son identification avec le ou les héros, l'auteur nous accroche avec talent surtout avec ces longues scènes d'interrogatoires absolument captivantes et superbement dialoguées.
Un beau final me direz-vous. Alors pourquoi ces réserves ?
Tout simplement, aussi extraordinaire et originale que soit l'intrigue, la résolution m'a laissé sur ma faim, laissant des zones d'ombres trop importantes. Je suis peut être trop cartésien, mais il y a des éléments essentiels de l'histoire qui ne sont pas expliqués, qui restent dans le flou. Ca m'a gâché un peu le plaisir.
Autre petite critique, totalement personnelle, mais j'avais préféré les précédents livres de Pierre Lemaitre car plus psychologiques, moins violents. Ici, on lorgne un peu vers le serial-killer sadique à l'américaine. Peut être que ce glissement vers plus de violence est dû à un changement d'éditeur (passage de Calmann-Lévy à Albin-Michel) afin de trouver encore plus de lecteurs ? 
J'ai l'air de bouder mon plaisir, car, ce polar se lit quand même très bien et prouve que Pierre Lemaitre est un auteur à suivre et qu'il n'a rien à envier à ses collègues américains. Mais je rêve qu'il continue dans sa veine première, celles des intrigues originales, en prise avec la société et au caractère psychologique proche de Patricia Highsmith...

dimanche 13 mai 2012

Une collection très particulière de Bernard Quiriny



Je serai humble devant le livre de Bernard Quiriny. Je ne m'amuserai pas à faire mon intéressant face à un critique renommé et encore moins devant l'auteur formidablement inventif qu'il est. Je fais chapeau bas devant autant d'imagination. Ce recueil de nouvelles est un régal pour l'esprit de tout lecteur.
Nous faisons la connaissance de Pierre Gould, héros récurrent du livre, infatigable collectionneur de livres particuliers. D'une nouvelle à l'autre, nous découvrons des auteurs inconnus qui ont écrit des livres étranges : les livres que personne ne peut lire tellement il sont à tomber d'ennui, ceux qui ont sauvé des vies grâce à leur épaisseur ou à leur recette à guérir une maladie orpheline, ceux qui se corrigent tout seul dans le but d'atteindre un résultat parfait ou encore les livres gigognes dont chacun en renferme une infinité d'autres. C'est drôle, faussement érudit mais infiniment créatif et jouissif pour l'esprit.
Intercalées apparaissent d'autres nouvelles sur le thème de villes tout aussi fantastiques, joyeux hommage à Italo Calvino sans doute. Là, Bernard Quiriny nous balade à Oromé en Bolivie, ville qui s'autodétruit ou à Caori au Brésil où chaque seconde de votre visite reste en mémoire toute votre vie dans les plus infimes détails. Il y en a huit autres de cet acabit, à faire pâlir d'envie le plus luxueux des catalogues de voyage.
Et puis, il y a une troisième couche de nouvelles, elles aussi fantastiques dans tous les sens du terme, intitulées ou pas "Notre époque". Les thèmes sont divers mais tout aussi déjantés. Que se passe-t-il lorsque la nuit d'un 31 décembre, tous ceux qui ont fait l'amour se réveillent habitant le corps de leur partenaire et vice et versa ? Ou alors que devient-on lorsque la loi permet de changer de nom et de prénom autant de fois qu'on le désire ? Dans ces nouvelles là, Bernard Quiriny est à son sommet, déroulant son raisonnement jusqu'au délire tout en gardant un ton sérieux et précis.
Vous aurez compris que la lecture de ce livre risque de vous devenir indispensable. Mais attention, juste un petit conseil à tous ceux qui aiment lire une petite nouvelle avant de s'endormir : ne lisez pas ce recueil! Vous serez immanquablement victime d'insomnies dues à une trop forte stimulation de votre cerveau, ces petites nouvelles ont le don de vous poursuivre, de vous titiller les méninges et même de vous rendre (pour certains) fous de jalousie devant autant d'inventivité.

samedi 12 mai 2012

Dark shadows de Tim Burton



Je n'ai pas suivi mon vieil adage : "Trois semaines avant Cannes au ciné, rien que des navets", je m'en suis allé voir le nouveau Tim Burton. Tim Burton, tout de même, celui qui a croulé voici trois mois sous les éloges, suite à l'expo fââââbuleuse à la cinémathèque. Pas né de la dernière pluie, je me doutais bien qu'un grand cinéaste pas sélectionné pour la course à la palme, obligé de sortir sa dernière réalisation à cette période, ça sentait la daube... J'aurai du parier quelque chose, j'aurai gagné... 
Adapté d'une vieille série télé que les américains se sont bien gardés d'exporter de peur de perdre quelques juteux marchés, "Dark shadows"  conte une vague histoire de vengeance entre une sorcière et un riche industriel spécialisé dans le poisson qui ne veut pas d'elle. A la fin du 18ème, elle l'a transformé en vampire, enfermé dans un cercueil et enterré vivant. En 1972, il sera déterré par hasard et retrouvera ses descendants, ruinés par une arrière, arrière, arrière petite fille de la sorcière qui règne dorénavant sur l'industrie poissonnière locale. Le vampire va traîner sa dégaine gothique au milieu des hippies et des fans des Carpenters ou d'Alice Cooper avec l'espoir de redevenir le roi du thon en boîte. 
Malgré un beau travail de transformation, la composition de Johnny Depp, au bord de l'autoparodie est un peu vaine et même lassante. Il  n'arrive pas à sauver de l'ennui cette situation mille fois vue au cinéma du décalage temporel. Le scénario hésite entre parodie (mal) assumée et gags lourds comme un triple bigmac avec supplément mayo (le vampire croit voir dans le m de Mac donald, le signe de Méphistophéles). 
Eva Green, la sorcière, n'est absolument pas crédible en méchante. Elle a beau rouler des yeux et avancer par grandes enjambées, il n'y a que ses talons aiguilles qui tremblent.
Si la première moitié du film pouvait encore faire de l'effet grâce aux sublimes décors et à une mise en scène nerveuse, jouant efficacement avec l'apparence de vampire du héros, il n'en est rien de la suite. Parti préparer son prochain film ailleurs, Tim Burton a laissé les clefs du studio au réalisateur des effets spéciaux. Alors, Eva et Johnny volent dans tous les sens, griffent les décors, Michelle Pfeiffer (elle aussi de la fête) canarde partout et fait la gueule, une ado ingrate se transforme en loup garou et se fracasse sans arrêt contre les murs. Tout ça pour pouvoir avoir l'hégémonie de la mise en boîte du maquereau! C'est plat, sans intérêt et surtout complètement raté. 
Il va falloir que Tim Burton fasse une pause. Il va se relaxer, dormir, s'aérer. Cela peut lui prendre deux ans, trois ans, peu importe. Mais surtout, s'il retourne derrière une caméra, faite qu'il redevienne celui que l'on a tant aimé, celui d'Edward aux mains d'argent, de Sleepy Hollow ou même de Charlie et la chocolaterie pour que l'on oublie très vite ce faux pas. Et si son prochain film sort fin/ avril début, je repenserai, hélas, à mon vieil adage...




vendredi 11 mai 2012

L'urgence et la patience de Jean-Philippe Toussaint


Cette petite centaine de pages est un vrai trésor. Ce n'est pas un roman, loin de là, pas vraiment un essai mais plutôt des textes autour de l'écriture, de la lecture, du souvenir, des moments fondateurs pour un écrivain, des rencontres qui illuminent une vie. C'est écrit simplement comme s'il s'adressait directement à celui qui le lit. Il nous parle de ce qui fait l'essence de Jean-Philippe Toussaint, les rencontres qui l'ont rendu écrivain, les lectures qui l'ont foudroyé mais aussi de ce qui le pousse à écrire encore et encore. 
Au départ, je pensais lire un vibrant hommage à la littérature, essai (trop) intelligent réservé au milieu littéraire et à quelques initiés érudits. En fait pas du tout. Si vous avez un tout petit aimé lire dans votre vie, si quelquefois vous avez été enthousiasmé par un livre et si vous avez une toute petite curiosité pour ces êtres d'exception que sont ces hommes et ces femmes qui arrivent à traduire si magnifiquement avec des mots, sentiments, émotions, destins, "L'urgence et la patience" est forcément un livre que doit passer entre vos mains. J'y ai trouvé tout d'abord de quoi satisfaire ma curiosité : l'intimité littéraire de Jean-Philippe Toussaint nous y est dévoilée avec pudeur, intelligence et sincérité. Il nous fait approcher au plus près de son processus de création, nous présentant les bureaux qui ont supporté l'écriture de ses romans, évoquant la discipline d'athlète à laquelle il est obligé de s'astreindre, les méandres de la création. Puis, il parle des livres, de ceux qu'on oublie jamais, qui accompagnent une vie, des oeuvres qui nous éblouissent tellement qu'on garde en mémoire l'endroit où on les a lues, les odeurs qui flottaient au moment de leur lecture, la lumière exacte qui éclairait les pages. Ces sensations que tout un chacun a éprouvé dans sa vie sont minutieusement, malicieusement évoquées pour notre plus grand plaisir.
J'ai du mal à parler de ce livre pourtant très court mais d'une densité incroyable. Chaque page résonne, fait raisonner sur ce qu'est écrire, lire, sur ce qui fait que l'on devient un créateur. Chaque page est un morceau de vie, chaque émotion rencontrée un élément supplémentaire pour saisir ce qui compose un écrivain ou tout simplement  un être humain.
Cela aurait pu être glaçant d'érudition. C'est simplement lumineux, chaleureux et fraternel. Un bijou !



mercredi 9 mai 2012

Chercher le garçon de Dorothée Sebbagh


"Cherchez le garçon,
Quel est son nom ?" chantait dans le temps Taxi Girl. Le titre du film de Dorothée Sebbagh appelle irrémédiablement à fredonner ce tube même s'il n'est pas dans la bande son et que l'histoire est bien éloignée des paroles pops de Daniel Darc. Quoique. A la vision du film, l'héroïne rencontre tellement de garçons qu'on a tendance à oublier leur nom, ne revenant en mémoire que leurs particularités ou leurs obsessions.
Vous l'aurez compris, dans ce film, Emilie, le personnage principal, trentenaire célibataire, décide parmi les bonnes résolutions de la nouvelle année de trouver un mec pour se marier et faire des enfants. La meilleure façon en 2012 de trouver chaussure à son pied, c'est de s'inscrire sur le site de rencontres Meet Me, de prendre un pseudo (ici Kitsuné) et de partir à la chasse aux mâles. Très vite les rendez-vous se succèdent, tous plus étranges ou décevants les uns que les autres. Le coup de foudre tarde à venir. Emilie commence à désespérer. Et si elle laissait faire le hasard comme lui conseille sa cousine, est-ce que cela fonctionnerait mieux? Peut-être....
"Chercher le garçon" est un premier film, assez court, 1h10, tourné avec un appareil photo et sans trop de budget. Cela se ressent un petit peu mais les décors naturels marseillais et le rythme soutenu des "speed dating" font vite oublier le manque de moyen. Nous sommes très loin de Bridget Jones et de ses clichés pour magazines féminins.
 La réalisatrice a centré son intérêt sur les nombreuses scènes de rencontres entre Emilie et ses prétendants  qui ont la force d'un documentaire. On lit dans le regard des comédiens la déception ou l'excitation ou l'hésitation. C'est assez troublant tellement cela semble réel, on est presque gêné d'être là, à les regarder se soupeser, se deviner. 
Petit film sympa et divertissant, porté par une comédienne attachante, Sophie Cattani, "Chercher le garçon" n'est pas le chef d'oeuvre du mois mais un joli divertissement réalisé avec finesse. Il possède assez de qualités pour que l'on attende avec curiosité un deuxième film de Dorothée Sebbagh.



mardi 8 mai 2012

La ligne de courtoisie de Nicolas Fargues

La ligne de courtoisie est ce trait que l'on trouve dans beaucoup d'administrations ou banques, qui sépare le client traitant une affaire au guichet et son suivant qui patiente.
Le héros du dernier roman de Nicolas Fargues, ex écrivain à succès maintenant sans inspiration, ne la dépasse jamais. Il subit le monde qui l'entoure avec causticité mais sans jamais rien extérioriser. Il vit seul, s'apprête à quitter Paris pour Pondichéry, laissant mariner dans leur médiocrité enfants ingrats et crétins, ex femme avide et parents abonnés au silence des phrase toute faites. Pour lui, le monde d'aujourd'hui n'est qu'un gigantesque supermarché inutile. Enfermé dans sa solitude, conscient d'être un animal social pas comme les autres, il va promener sa pusillanimité jusqu'à Inde sans pour autant trouver un chemin lumineux.
Ce dernier roman de l'auteur préféré des rédactrices de magazine féminin pour cause de talent d'écriture (c'est vrai) mais aussi de physique avantageux, semble être un pari osé. Après des romans réussis et aux thèmes aussi fédérateurs que porteurs, Nicolas Fargues veut essayer de faire rire son lecteur avec cette fable sarcastique. C'est vrai, nous rions à la lecture de tous ces détails de la vie quotidienne passés au microscope, mais jaune. Toutes nos mesquineries, nos hésitations serviles, nos travers, nos veuleries sont minutieusement décrits avec une dérision féroce et salutaire. C'est brillant et talentueux. Cependant, pourquoi Nicolas Fargues a-t-il voulu employé ce style ampoulé comme dans les bonnes vieilles dissertations des années cinquante ? J'ai eu l'impression qu'il voulait à tout prix éviter les répétitions en utilisant un vocabulaire peu usité, obligeant parfois la prise d'un dictionnaire (pour les plus curieux). Ainsi pour éviter d'écrire deux fois " brugnon", il emploie le terme de "drupe" que j'avoue ne pas connaître (mon traitement de texte non plus). On trouve aussi une flopée  de mots savants disséminés dans le texte : incisives linguoversées, blatte lucifuge, sapotilles matures, spidroïne du fil de soie, les chilécères, ... j'en passe et des meilleures. Quelquefois, c'est une phrase entière (pas souvent, je vous rassure, mais ça surprend) : " Dont le grain de peau héliobole, le bleu pur sans compassion du regard et le soin corporel inné sont une apologie vivante de l'eugénisme aryen en regard de vos follicules pileux facétieux, de vos canines en quinconce et de vos butées olécrâniennes trop saillantes"  (oui, la phrase est entière !) pour la description d'une femme blonde, digne d'une dictée de Pivot.
Je sais, ce petit démontage est facile au regard de la qualité générale de ce texte. Ce ne sont que les remarques d'un lecteur un tout petit agacé par cet exercice de style qui m'a semblé un peu lourd compte tenu de la nature humoristique de l'ensemble. Malgré une fin un petit peu fade, peu digne d'une fable, "La ligne de courtoisie" reste un roman agréable et bien troussé sur le consumérisme et la solitude attenante, écrit avec l'acuité d'un brillant observateur de notre société en manque de partage.


dimanche 6 mai 2012

Barbara de Christian Petzold


Dans les sorties d'avant Cannes, où les distributeurs ont tendance à se débarrasser de leurs nanars, "Barbara" est une excellente surprise. Auréolé d'un ours d'argent du meilleur réalisateur à Berlin, l'histoire de ce chirurgien-pédiatre en Allemagne de l'Est au début des années quatre-vingts est un thriller sentimentalo/politique bourré d'émotion qui vous embarque dès les premières images pour ne jamais vous lâcher.
Barbara, magnifiquement interprété par Nina Hoss qui illumine l'écran, se retrouve dans une petite clinique de province parce que soupçonnée de vouloir passer à l'Ouest. Malgré son air buté, son perfectionnisme, sa froideur envers ses collègues, elle émeut tout de suite le spectateur à la fois par son mystère et par la terrible tristesse qui se dégage d'elle. Très vite on comprend qu'elle prépare quelque chose. Mais dans un régime où tout le monde peut dénoncer tout le monde, où chaque geste est épié, Barbara avance sans rien montrer ni donner, sauf à ses jeunes patients encore plus victimes qu'elle. 
Mais le chef de la clinique, André, d'abord intrigué par cette femme, puis séduit, va lui manifester son intérêt. Avec son allure placide et rassurante, il va tenter des approches maladroites mais peut être sincères. 
Sur ce canevas somme toute classique, Christian Petzold, grâce à une mise en scène précise et millimétrée,  décrit sans aucune lourdeur le poids de la dictature, nous la faisant sentir dans le moindre détail. Sans que jamais ne soit prononcé le mot "Stasi", chaque détail, chaque geste, chaque déplacement de l'héroïne nous la fait sentir tapie derrière un fourré, une fenêtre, un regard. Comme Barbara, toujours aux aguets, le spectateur scrute l'écran, plus tendu et oppressé que dans n'importe quel thriller. Cette tension dure tout le temps du film, sans relâche, portée par des images de l'Allemagne de l'Est comme on en a rarement vu au cinéma. Ici pas de grisaille, de tristesse, c'est l'été, les cheveux blonds de Barbara sont éclairés par un soleil radieux. Même si l'appartement et l'hôpital sont sinistres, la nature ne ressent pas le poids de la dictature et apparaît ici comme un espoir.
Ce très beau portrait de femme, tiraillé entre son envie de quitter un pays sans avenir et son devoir de médecin à aider les victimes de ce terrible régime, est une profonde réflexion sur la responsabilité individuelle, le partage et la résistance. 
Porté par une comédienne fascinante et poignante et filmé avec grand talent, ce film est un bijou qu'il faut absolument découvrir sans tarder.



samedi 5 mai 2012

Gringos locos de Yann et Olivier Schwartz


Ce n'est pas souvent qu'un album BD connaisse les malheurs de la polémique. Celui-ci, devait sortir en janvier dernier. Tiré à 35 000 exemplaires, il a failli finir au pilon suite aux protestations des descendants de Jijé, auteur fameux des éditions Dupuis qui a fait les beaux jours de Spirou dans les années 50. Ces derniers trouvent que la représentation de leur ancêtre dans "Gringos locos" est désobligeante et mensongère. Après trois mois de négociations, l'album paraît enfin (mais cette fois-ci avec un tirage de 45 000  exemplaires..!?!..) accompagné d'un petit fascicule de dix pages, exigé par les descendants et  rétablissant la vérité sur ce voyage et la vraie personnalité des personnages ayant servi de modèles.
Personnellement en tant que lecteur, je me moque un peu que Jijé soit représenté comme un Depardieu belge, jurant, vociférant, optimiste et calculateur. Il est devenu par la magie des deux auteurs Yann et Schwartz, un personnage plein de faconde et c'est là l'essentiel. 
Car, franchement, sans être un pur chef d'oeuvre, "Gringos locos" est un album vraiment réussi. Le périple américain en 1948 de trois futurs auteurs majeurs de la bande dessinée, Jijé (Spirou, Jerry Spring), Morris ( Lucky Lucke) et Franquin ( Gaston Lagaffe),  pour peu que l'on soit un peu passionné par le neuvième art, est un régal. Quant aux néophytes ils prendront un vrai plaisir à découvrir cette épopée haute en couleurs. 
Coup de chapeau au dessinateur Schwartz et à son coloriste Fabien Alquier qui donnent à ces planches un air très année cinquante, véritable hommage aux créateurs représentés, à la fois nostalgiques et modernes. Un régal pour les yeux.
Le scénario de Yann, qui a travaillé avec Morris et Franquin et a recueilli leurs souvenirs, a su habilement mêler souvenirs et création. Les trois personnages aux caractères bien typés, deviennent ainsi de vrais héros de bandes dessinées et c'est, à mon avis, le plus bel hommage que l'on pouvait leur rendre. Jijé est truculent, doté d'un caractère enjoué et très sympathique, Morris est plus élégant, piquant et séducteur, Franquin rêveur et romantique. Leur voyage est jalonné de péripéties toutes plus drôles les unes que les autres et franchement réjouissantes.
Je ne sais pas si la suite de leur périple, bien qu'en cours de réalisation, arrivera à être publiée. Les auteurs sont sûrement refroidis par l'accueil des familles des illustres dessinateurs.Cependant, il ne faut pas hésiter à lire cet album original et joyeux, grand moment d'évasion et de nostalgie qui nous permet, en prime, de tout connaître de la genèse de Gaston Lagaffe.





vendredi 4 mai 2012

Saison brune de Philippe Squarzoni


J'ai rarement, et même jamais lu un bande dessinée pareille. "Saison brune" est un véritable essai dessiné sur le réchauffement climatique et ses conséquences. C'est un gros pavé de 477 pages, pas forcément facile à lire (surtout au début) mais absolument passionnant et essentiel. Sa lecture ne laisse pas le lecteur indemne et, comme tout plaidoyer politique, il impose une réflexion comme rarement un album BD l'a fait.
Développé en six parties, "saison brune" s'empare du lecteur avec une présentation scientifique claire du réchauffement, partie formidablement vulgarisée mais quand même un peu austère (tout du moins pour moi qui ne suis pas un habitué de "sciences et vie"). Puis l'auteur s'attache à nous décrire les différents scénarios possibles de cette augmentation de la température due à l'augmentation toujours plus importante de la production humaine. Plusieurs hypothèses s'offrent à nous. Aucune n'est sûre tant les paramètres sont nombreux et les connaissances scientifiques balbutiantes sur certains sujets.
Passée cette mise en bouche scientifique, Philippe Squarzoni mixe les catastrophes inéluctables à venir avec ses propres interrogations personnelles. Nous avons déjà beaucoup saccagé la planète et son atmosphère, les premiers dérèglements se font sentir (fonte des glaciers, de l'Arctique, cyclones plus nombreux,...). Que faire ? A titre personnel, à un échelon national, international ? Qui produit le plus de substances nocives pour notre avenir ? Les transports? L'agriculture? L'industrie ? Les pays riches ? 
Autant de questions qui amènent un constat déprimant. Nous sommes sur un bateau de luxe qui coule ou comme un parachutiste aguerri qui, tellement habitué à sauter, s'aperçoit un jour qu'il a oublié d'enfiler son parachute. La comparaison fait froid dans le dos mais résume presque la situation dans laquelle on est, sauf que notre chute durera au moins un siècle.
La dernière partie devient encore plus politique. Il est grand temps de faire quelque chose mais quoi? Nos sociétés capitalistes et libérales ne sont absolument pas prêtes à faire le moindre effort alors que la communauté scientifique exhorte à la réduction de notre consommation d'énergie. Mais qui dit réduction dit obligatoirement changement profond de notre organisation sociale et ça pas grand monde n'est prêt à sauter le pas surtout nos politiques totalement inféodés au pouvoir financier.
L'album voudrait se conclure de façon optimiste, hélas, il ne le peut pas.
Difficile de résumer un tel livre, fourmillant de détails, d'informations. Cela ressemble quelquefois à un reportage d'Arte , avec ses spécialistes qui apportent avis et éclaircissements. Mais, c'est surtout un formidable pari réussi tant graphiquement, avec des planches d'une beauté à couper le souffle, un montage subtil d'images de pubs mises en contraste avec les plaidoyers de l'auteur ou des scientifiques que politiquement grâce à une énergique intelligence à essayer de prévenir d'une catastrophe imminente, niée par une alliance politico/médiatique.
S'il fallait que je retienne un passage, je garderai celui qui en 10 pages évoque l'ouragan Katrina qui s'est abattu sur la Nouvelle Orléans en 2005. L'horreur d'une catastrophe naturelle doublée du comportement abject des politiques de l'époque et un résumé implacable de ce qui nous attend probablement dans les décennies à venir. 10 planches chocs, denses, effrayantes qui mériteraient d'être lues dans tous les collèges lycées de France et publiées dans tous les journaux (on peut rêver).
Un album de salubrité publique qui faut lire toute affaire cessante. C'est publié chez Delcourt au prix de 29,95 euros ! Oui, je trouve ça un peu cher mais c'est hélas de nos jours le prix pour l'intelligence et la réflexion...

mercredi 2 mai 2012

La belle année de Cypora Petitjean-Cerf


C'est avec un peu de réticence que j'ai ouvert ce roman. Encore un enfant qui raconte la vie. Encore un auteur qui se croit malin en donnant des mots plein de candeur ou d'ironie à une petite fille de onze ans.
Sortant du "Au pays des kangourous" dont je vous ai parlé ICI, j'étais un sceptique quant à l'intérêt de cette chronique de banlieue sordide. En fin de compte, j'ai tourné les pages et je suis arrivé à la fin de cette "belle année" plutôt satisfait de ma lecture.
Tracey Charles nous parle de son année de sixième dans un collège assez pourri d'une ville à mauvaise réputation : Saint Denis. Malgré sa basilique et son lycée de jeunes filles de la Légion d'Honneur, c'est, selon les chiffres, la ville la plus violente de France. Pourtant de la violence physique il y en a peu dans cette "belle année". La jeune collégienne vit avec sa mère qui la déteste et le nouveau compagnon japonais de celle-ci qu'elle trouve aussi moche qu'insupportable. Son père, phobique social, n'habite pas loin et partage sa vie entre une mère possessive et une maîtresse africaine. Tracey est amie avec Cosimo, garçon sensible, se revendique homosexuelle et pratique une religion qu'elle a inventé : l'adoration du 8.
Au milieu de personnages hauts en couleurs, Tracey va vivre une année un peu particulière qui la verra passer de l'enfance à la pré-adolescence, de garçon manqué en jeune fille s'ouvrant au monde, comme une chenille se transformant en papillon. Son quotidien au collège, ses rapports avec sa famille, ses interrogations sur la religion, son imagination, ses préjugés sont racontés au fil des saisons que l'on arrive à percevoir entre deux barres d'HLM.
Tout cela est raconté par la bouche de Tracey, bonne élève fûtée mais un peu caractérielle. Le talent de Cypora Petitjean-Cerf est de restituer le langage de son héroïne sans maniérisme, sans la rendre plus intelligente qu'elle ne l'est ni sans remarques hautement impertinentes et ironiques sur les adultes qui l'entourent, lot commun de ces chroniques aux saveurs enfantines. Là, où d'autres auteurs se laissent aller à une débauche de faux mots d'enfants, l'auteur trouve la bonne tonalité pour rendre Tracey vraie et juste. Le monde de la banlieue est décrit sans les clichés habituels. Tout est là pourtant, l'ennui des jeunes, les classes difficilement gérables par des profs dépassés, la misère qui affleure, la débrouille, le manque d'amour. 
Même s'il m'est arrivé de penser que tout cela était peut être un rien trop rose et malgré sa forme rebattue, attaché au personnage principal, j'ai tourné les pages et je me suis laissé embarquer dans cette année banlieusarde. 
Ce roman observe avec délicatesse une fillette face à ce délicat passage de la fin de l'enfance, donnant à ses lecteurs une lecture tout en sensibilité et intelligence. A lire sans crainte.



mardi 1 mai 2012

Les passagers de Berry


Voilà quelques temps que j'attendais la sortie du deuxième album de Berry dont j'avais apprécié "Mademoiselle" son premier opus. Il est enfin là, emballé dans une jolie pochette style sixties.
Après plusieurs écoutes, je peux déjà dire que l'on est en terrain connu. Pas de grandes surprises, la très jolie Berry ne cherche pas à surprendre. Toujours des mélodies délicates qu'accompagne sa voix douce et chaude, la désignant presque comme la Françoise Hardy du 21 ème siècle. Comme j'aime ces chanteuses intimistes, mon oreille se laisse bercer par ces mélodies ciselées et finement arrangées, même si du côté paroles ces "passagers" me semblent plus convenues que celles du précédent. Elle parle d'amours se terminant mal. C'est légèrement dépressif mais toujours avec délicatesse et poésie.
Les seules nouveautés sont peut être les hommages appuyés à Serge Gainsbourg et à Iggy Pop. "Les passagers" est une copie conforme de "The passenger" sans qu'Iggy Pop soit crédité au générique, mais par contre signée Daniel Darc et Manou.
Serge Gainsbourg plane sur beaucoup de titres de cet album et notamment sur "Brune" que l'on peut prendre pour un (joli) hommage à "Bonnie and Clyde".
Cet album ne surprendra pas les fans qui retrouveront ce joli climat mélancolique. Les autres pourront être conquis par la douce voix de la chanteuse qui, comme une dentellière, déroule doucement son fil pour créer un ouvrage à la finesse élégante et envoûtante.
J'ai retrouvé Berry avec plaisir et malgré une première écoute qui m'a un peu déçu, chaque nouveau voyage à bord de"passagers" est un peu plus plaisant que le précédent. La magie opère à nouveau, je m'embarque avec elle, je pars léger dans son cabriolet, je me laisse bercer par sa voix de diva gracieuse et subtile et  pour longtemps je pense.


"Si c'est le vie " vidéo studio. C'est la chanson la plus rythmée de l'album...