jeudi 17 mai 2012

Moonrise Kingdom de Wes Anderson




Pour une fois, en observant l'affiche du nouveau Wes Anderson, il n'a pas tromperie sur la marchandise. L'atmosphère qu'elle dégage est la même que celle que vous trouverez dans le film, un généreux mélange d'enfance, d'esprit décalé, de subversion et d'hommage à une Amérique plus rêvée que réelle.
En situant l'action de "Moonrise kingdom" dans une île perdue et peu peuplée, le réalisateur enferme ses personnages dans un monde à part. Ils deviennent les protagonistes d'une histoire inventée par un grand enfant, les déplaçant au gré de ses envies comme s'il jouait avec ses Playmobils. En avant les histoires donc, mais attention le talent, l'oeil et les thématiques d'un cinéaste en plus !
Il était une fois, une île peuplée d'un camp scout, d'une famille nombreuse bourgeoise au bord de l'implosion , d'un flic et d'une standardiste. Conjointement, Sam, scout ostracisé par le reste de la meute et Suzy, préado en révolte fuguent et, tout en mettant la région en ébullition, vivent leur première histoire d'amour. Une course poursuite s'organise alors qu'une tempête mémorable s'annonce...
Avec ce canevas classique, on suit l'histoire sans ennui. Mais ce qui aurait pu être un film lambda sur l'enfance, devient ici un objet intrigant et jouissif. 
Tout d'abord, il y a une mise en image très picturale, décalée, jouant avec les couleurs et les arrières-plans, évoquant les illustrations de Norman Rockwell et tous ces tableaux typiquement nord-américains avec leurs phares rayés rouge et blanc et leurs maisons en bois paisiblement posées dans des forêts accueillantes.
Ensuite, il y a une mise en scène très cartoonesque, multipliant les plans aux cadres surprenants mais jamais gratuits, en parfaite adéquation avec le propos et l'esprit d'enfance qui règne ici.
Autre point fort, le regard porté aux personnages : les deux préados sont totalement hors cliché. Lui, scout vaguement intello est plus adulte que tous les adultes qui l'entoure tout en restant très enfantin. Elle, est une lolita à l'envers, séduisant un garçon aux rondeurs pouponnes dont on pourrait penser que la sexualité est totalement endormie par des années de camp scout.
Les adultes, interprétés avec jubilation par une pléiade de têtes d'affiche (Bruce Willis, Bill Murray, Frances Mc Dormand, Edward Norton et Tilda Swinton franchement hilarante en responsable de services sociaux adepte des traitements par électrochocs ) sont ici des pantins de chair dont les quelques certitudes auxquelles ils s'accrochent encore vont se trouver malmenées dans ce vent de folie.
Même si on a l'impression que toute cette ambition visuelle, lorgnant vers l'absurde, écrase un peu l'émotion, "Moonrise kingdom" est un film rempli comme le coffre à jouets d'un enfant occidental. Ludique, visuellement splendide, je suis sûr qu'il supporte de nombreuses visions car Wes Anderson et son scénariste ont semé partout des clins d'oeil, des sous-entendus, des pistes d'une incroyable richesse.
Encore un film culte ? Peut être, en tous les cas une entrée en matière formidable pour le festival de Cannes qui ne nous avait pas souvent habitué à un film d'ouverture de grande qualité.




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