Fabrice Pliskin dans son nouveau roman ne manque pas d'ambition. Il s'empare de cette sordide affaire de prothèses mammaires frelatées qui défraya la chronique dans les années 2010 ( l'affaire PIP) et en profite pour nous brosser le portrait d'une France, gangrenée par le chômage, l'argent facile, les richesses mal partagées, mais également en proie aux affres du métissage, aussi bien économique que sociologique. En plongeant le lecteur au coeur d'une entreprise bien de chez nous, avec ses employés modélisés au libéralisme le plus abject ( c'est à dire, on ferme notre gueule même si on sait qu'on fabrique de la merde car on ne veut pas perdre tous nos jolis petits avantages), le roman peut prendre parfois des allures d'un petit essai sociologique. Mais c'est mal connaître l'auteur, qui, l'humour au bout de sa plume, narre cette ignoble histoire avec une empathie assez originale car nous sommes presque intégrés à leurs pensées les plus intimes, Le lecteur est collé au plus près de tous les responsables de cette usine d'implants fabriqués à bas coûts pour de plus grands profits. Vue de l'intérieur, ces poches de silicone sensées rendre les femmes plus belles ( ?!?) étaient en fait une source de bonheur pour le patron ( une sorte de seigneur paternaliste, issu de l'accouplement improbable de Marx et d'Adam Smith) ainsi que pour les 120 familles qui profitaient de près ou de loin à la générosité entrepreneuriale qui avait surtout pour mission de leur clouer le bec en les rendant complice d'une fraude de haut vol.
Le roman débute alors que cela commence à sentir le roussi pour l'entreprise. Les plaignantes se font de plus en plus nombreuses de part le monde. Le bateau libéralo/paternaliste commence à prendre l'eau mais les rats continuent vaille que vaille à s'agripper comme ils peuvent. Et voilà qu'arrive Louis, journaliste au chômage et qui par un heureux hasard se fait embaucher chez Jodelle Implants sous le fallacieux prétexte d'avoir croisé, sans grande amitié pourtant, son si charismatique patron lors de ses années de lycée. Son job consistant à la confection de courriers rassurants pour ces grincheuses qui osent se plaindre, ce petit nouveau aura du mal à se greffer à la culture du secret local. Au niveau romanesque, c'est un peu pareil, les deux univers ne s'appareillent pas très bien non plus. L'ensemble a du mal à vraiment convaincre. Cette envie de dresser un instantané précis de notre pays à une époque donnée possède quelques lourdeurs. L'humour, très présent, devient à la longue un peu pesant, reposant un peu trop systématiquement sur un procédé d'énumérations, qui finit par apparaître comme un tic d'écriture. Bien sûr, on sourit souvent, on peut même apprécier quelques remarques bien senties ou ce regard vraiment mordant d'un fin observateur de nos petits travers quotidiens.
Cependant, malgré un thème attrayant, j'ai été un peu déçu par ce roman. Agréable à lire, il se consomme toutefois comme une mayonnaise maison que l'on aurait eu du mal à faire prendre et à laquelle on aurait ajouté force moutarde pour obtenir un résultat correct.
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