C'est un roman où le temps se circonscrit à une période, un été. Les journées chaudes se succéderont, un peu semblables, rythmées par les journées de travail des deux jeunes protagonistes. Félix traîne ses quatorze ans et passe son été en stage pour entretenir la voirie d'une bourgade qui possède même un supermarché... où travaille Gil, un peu plus âgée, mais aussi la fille du cantonnier qui l'héberge. Ce temps, qui, poisseux d'ennui, sans beaucoup de fêtes et aux gestes quotidiens trop répétés, ne s'accélère que rarement.
C'est un roman où le décor est réduit à un bourg, déserté de beaucoup d'habitants partis vers des contrées plus riantes. Une maison placée au bord d'une départementale un peu passagère, une supérette trop bien rangée pour suggérer une fréquentation importante viendront compléter ce paysage qui semble n'en posséder aucun. Une rivière, une piscine apparaîtront inopinément, lieux aquatiques qui cristallisent les rencontres.
C'est un roman d'atmosphère autant que d'initiation. Comme c'est l'été, la chaleur étouffe le bourg et dévoile les peaux, surtout celle de Gil, toujours court vêtue et offrant naturellement son corps aux regards de tous. Et les regards vont au-delà de la caresse visuelle. Gil, est libre, se donne à qui veut, sans malice, sans arrière-pensée, grimpe dans des voitures, se laisse appuyer contre des murs chauds, soulève sa jupe courte près de la rivière. Vivant sous le même toit, Félix l'observe, l'approche, la regarde, la dévore des yeux. Mais est-il capable de l'intéresser, lui, si jeune, encore un peu frêle ? Les trois mois d'été à travailler au grand air vont toutefois transformer son corps, le maniement de la pelle dans les fossés ou les parterres publics vont faire apparaître des muscles, préfigurant l'adulte qu'il deviendra....peut être plus rapidement qu'il ne le pense.
C'est un premier roman court, dense, à l'intensité moite. Bien sûr on pense à quelques ouvrages passés ( "L'été meurtrier", "Canicule", mais eux étaient des polars ou d'autres plus stylisés ) mais Marie Gauthier, en resserrant son intrigue au plus près de ses deux personnages, tout près de la peau, parvient à faire entendre une très jolie musique personnelle, légère comme cette jeune fille virevoltante qui court sur les trottoirs de ce bourg mais aussi étouffante comme quand on attend que l'orage craque. Un très beau premier roman !
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