On a beaucoup aimé Xavier Dolan... Son cinéma bousculait les codes, possédait une vigueur et un dynamisme de jeune chien fou qui faisait du bien dans un art de plus en plus formaté. Aujourd'hui, avec la vision de ce dernier mais premier film américain, on a confirmation que son statut de jeune prodige patine sérieusement.
Fort de son succès précédent ("Juste la fin du monde" ), qui montrait déjà une certaine propension à s'autociter, Xavier Dolan reprend quelques thèmes chers ( rapports mère/fils, homosexualité, hommage à la culture populaire) auxquels il rajoute une critique du star système américain. On sait bien que les grands cinéastes, si on regarde bien, labourent inlassablement les mêmes sujets et nous ne sommes pas surpris de cette variante de ses oeuvres précédentes. Cependant, la machine semble tourner à vide et laisse pas mal de fans sur le bord de la route.
Pourtant, on partait avec un bon à priori : les producteurs américains détestent le film et ont décidé de le garder dans les tiroirs. ( Ca doit sans doute les décoiffer pas mal le cinéma du jeune québécois...) On se félicitait que la partie production française permette la sortie sur nos écrans. Par contre, d'autres signes pouvait faire craindre le pire : le montage initial de 4 heures réduit à 2h03 ( supprimant dans la foulée le rôle de Jessica Chastain) et un accueil glacial au festival de Toronto.
Très vite, durant la projection, on sent que quelque chose ne tourne pas rond dans la narration de cette histoire. Quelques trous scénaristiques ( et pas forcément des ellipses), le télescopage de beaucoup de sujets qui ne sont traités que superficiellement, des dialogues moyennement convaincants font froncer un peu les sourcils. Mais c'est surtout la mise en scène qui ne fonctionne pas ici. En voulant reprendre à l'extrême ce qui faisait la nouvelle originalité de son précédent film, c'est à dire filmer tout quasi uniquement en gros plan, collant contre le visage des acteurs et ne les quittant que pour filmer un bout de corps ou un élément du décor ( donc toujours en gros plan), il rend son film complètement étouffant, voire tout bonnement capable de flanquer une migraine ophtalmique aux spectateurs. Et si dans " Juste la fin du monde" il pouvait s'appuyer sur des acteurs de génie, ici il doit se contenter de Kit Harrington, pas vraiment charismatique dans son rôle d'acteur gay dans le placard, de Natalie Portman plus mère de série télé US que maman " dolanienne" et d'un gamin assez insupportable. Le procédé tourne vite à la défaveur du film.
Entendons-nous bien, malgré toutes ces réserves, le film reste cent coudées au-dessus de ce qui nous est généralement donné à voir ces derniers temps. ( A l'échelle de "Mon bébé", situé tout en bas, "Ma vie avec..." culmine). Il y a quand même un vrai projet ambitieux, des thématiques intéressantes, un sens de la lumière et du plan ( même gros), mais par rapport à ce que nous avions déjà vu du cinéma de Xavier Dolan, celui-ci marque le pas. ( mais peut plaire, car ma voisine de siège a été énormément émue). Le meilleur moyen de se faire un avis, est d'aller voir cette " vie avec John F. Donovan". Je suis certain qu'il suscitera bien des débats entre spectateurs et c'est déjà ça !
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