jeudi 29 janvier 2015

Les nuits d'été de Mario Fanfani


Je suis sorti perplexe de ma séance de cinéma et il m'est difficile de donner un avis tranché sur ce film. La première chose qui me vient à l'esprit est le pari gonflé du producteur, car présenter un film mêlant le travestissement et la guerre d'Algérie, des sujets peu vendeurs s'il en est, relève me semble-t-il du courage ou de l'abnégation. Peu vendeur pour le conflit algérien c'est sûr, pour le travestissement cela reste à voir puisque le dernier Ozon sur un sujet proche a plutôt bien marché. Cependant, une projection de la bande annonce sous des quolibets gras et vulgaires la semaine dernière, m'a fait autant frémir sur les pensées du public que laisser pensif quant à la possibilité que cela puisse faire courir les foules.
"Les nuits d'été" sont celles qu'un notaire de province passe dans sa villa isolée au coeur des Vosges. Là, avec un, puis plusieurs amis, il se travestit en femme. Pas de sexe entre eux, juste le plaisir d'être habillés avec de belles robes, maquillés et discuter comme deux bonnes vieilles copines. Cela reste inconfortable pour ce notable qui jongle entre son apparence compassée, sa famille et cette envie irrésistible d'assouvir ce plaisir totalement ahurissant dans la France du général de Gaulle, surtout qu'il guigne à entrer dans la vie politique. Mais ces hommes, et aussi ces femmes, à peine sortis de la seconde guerre mondiale vivent un deuxième conflit plus larvé. L'emprise qu'exerce sur leur conscience les événement d'Algérie leur font perdre leur repères et les font se réfugier encore plus dans leurs désirs profonds (le notaire) ou dans un suicide social ( la femme du notaire).
Le film retrace avec finesse et douceur ce parcours singulier dans une époque où il fallait être dans un seul rang. Autant les scènes de la vie de couple réussissent à attirer notre intérêt, en grande partie grâce à l 'interprétation d'une Jeanne Balibar impériale mais aussi celle de Guillaume de Tonquédec tout en retenue, autant toutes les scènes avec les travestis m'ont semblé un peu ....comment dire ...dérangeantes. Pas choquantes du tout, filmées avec beaucoup de pudeur et de respect, renvoyant surement une image, des idées, peu montrées au cinéma et même en littérature, peut être parce que l'on peut n'y mettre aucune sexualité, elles distillent tout de même une once d'ennui. Leur intérêt dramatique m'a semblé limité à l'anecdotique, à cette idée que l'on ne naît pas homme, que l'on doit le devenir parce que la société l'a décidé ainsi.  Ces longues scènes  d'hommes travestis en bonnes bourgeoises, ont dû me déstabiliser, renvoyant une image pas du tout acquise comme normale dans mon cerveau de mâle occidental banal. Reste que je les trouve un poil trop longues et moins prenantes que celles à l'atmosphère plus tendue dans la maison du notaire.
Mais comme je le dis toujours, j'aime être dérangé par un livre, un film et celui-là y a réussi. Donc, au final, et l'écriture de ce billet a permis d'arrive à donner un avis plus tranché qu'au départ, je ne peux donc que conseiller d'aller découvrir ce premier long métrage qui prouve une fois de plus la vigueur et l'originalité du cinéma français.... et pour le très beau message de la magnifique scène finale entre les deux époux.


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