samedi 23 mai 2015

Trois souvenirs de ma jeunesse d'Arnaud Desplechin


"Trois souvenirs de ma jeunesse " ou comment je me suis disputé ...(ma vie cinéphile) avec le dernier Desplechin.
Je pose d'abord le cadre. Les films du cinéaste ont toujours eu le don de m'agacer avec cette narration faussement alambiquée cachant un vide bobo (Quoique "Jimmy P" ne m'a pas déplu). La mise à l'écart de la sélection officielle de Cannes ne m'a bien sur pas fait crier au scandale contrairement à la presse qui a ressorti son haut parleur 80 000 watts pour hurler au chef d'oeuvre. Ayant peur de louper quelque chose d'essentiel, je me suis donc rendu en salle, séance tenante, pour admirer l'oeuvre....en compagnie d'un seul autre spectateur ! La presse deviendrait-elle de moins en moins prescriptrice ? Les pigeons se font-ils plus rares?  Je ne saurai dire, l'autre personne ayant quitté la salle avant moi.
Dans la cacophonie de l'avant séance, entre la bande annonce tonitruante d'un "Mission impossible 8" et les  mastodontes baveux de "Jurassic world" (à croire que les spectateurs de Desplechin sont une cible à blockbusters US), je songeais à l'ahurissante interview donnée il y a peu par le réalisateur à une radio de service public. Un sommet de vanité et de suffisance qui faillit coûter la vie à mon ipad, mais vue le prix de la chose, j'ai préféré ricaner un bon coup.
La lumière s'éteint. Je me cale dans mon siège et je m'offre au film, prêt à recevoir un coup de génie dans la figure. Las ! (comme dirait un poète du 16ème) Voyez comme en peu de scènes, mignonne, elle a dessus l'écran, las, las ! ses beautés laissé choir... Faisons un sort tout de suite au titre. Les trois souvenirs sont bien là, pas de tromperie sur la marchandise, mais d'un intérêt assez inégal. Si le premier sur l'enfance, duraille évidemment, est balancé en quelques scènes, le deuxième, plus romanesque, est par contre plus développé, restant sans doute la partie la plus intrigante. mais, mauvaise pioche, Arnaud a choisi de nous conter par le menu, un troisième souvenir tournant autour d'une romance entre deux ados. Et là les choses se gâtent énormément. Paul (vraisemblablement le réalisateur ) drague Esther. Paul a la voix de Jean Pierre Léaud débitant un texte ampoulé et prétentieux me donnant envie de lui balancer une claque direct pour qu'il se la ferme. La donzelle, héritant des  mêmes dialogues amphigouriques, devient tout de suite antipathique et l'on espère très vite qu'ils utilisent des préservatifs pour nous éviter une tripotée d'enfants leur ressemblant. Ils ont beau s'aimer d'un amour paraît-il intense, la jeune fille changera de bras au bout d'un moment... Comme on la comprend...et comme on s'étonne que 30 ans plus tard, Paul n'ait toujours pas digéré cette incartade, offrant ainsi au film une scène totalement hystérique et ridicule, surlignant l'aspect totalement nombriliste de l'affaire.
On m'objectera que je  suis insensible aux tourments amoureux ainsi qu'à cette narration labyrinthique faite pour le travail intellect du spectateur. Je rétorquerai à ceux là, que la narration s'amusant à sauter les époques, donne quand même un vague peps à l'ensemble et nous éloigne un temps, hélas trop court, des amours inintéressants des deux freluquets. Et Desplechin a beau semer des indices psychologiques sensés donner du lustre à l'ensemble (la mère lesbienne, le père violent puis réduit aux utilités, les soupçons des russes, ...) ils ne sont jamais réellement exploités et tombent vite dans l'oubli.
Je peux reconnaître de jolis idées de plans à ce film. Le seul défaut c'est qu'ils parlent et sont filmés comme s'ils étaient uniques. Accolés les uns aux autres, ils ne forment qu'un patchwork bancal, éclairage et point de vue changeant à tout instant. Il paraît qu'avec les comportements parfois étranges des personnages, c'est ça le style Desplechin, repoussant tout naturalisme, inventant son propre monde. Permettez-moi alors de ne pas avoir envie d'y pénétrer tellement l'artiste de démène pour être bien clivant, réservant cela à quelques privilégiés. On est dans un cinéma nombriliste et non partageur.
N'étant pas vraiment invité,  je me suis trouvé devant un long métrage vaniteux et prétentieux, l'expression contemporaine d'un boboïtude déplaisante. Desplechin a beau hystériser les sentiments et proposer une risible intellectualisation des dialogues, il n'arrive jamais à camoufler le vide sidéral de l'ensemble.


1 commentaire:

  1. Bonjour Pierre D., déjà que la BA ne me donnait pas envie, ton billet me conforte dans l'idée de ne pas aller voir le Desplechin. A priori, le sujet ne m'intéresse pas et les dialogues m'ont paru très prétentieux. Et puis, ce n'est pas bien joué (pour ce que j'en ai vu). Bon dimanche.

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