S'il y a un roman étranger qu'il faut avoir lu, à en croire la critique, c'est celui là ! Une unanimité semble se faire autour du troisième roman de Jeffrey Eugenides après "Virgin suicide" et "Middlesex". Obéissant mais surtout curieux , j'ai lu les presque 600 pages de "Le roman du mariage" et il est certain que pour moi, l'emballement attendu n'a pas eu lieu.
Regardez tout d'abord la couverture franchement ratée de l'ouvrage. Si l'on décrypte les pictogrammes représentés autour du titre, on voit une dame qui aime monsieur qui lui aime un monsieur qui aime la dame. Déjà, on se dit que la trame du livre risque d'être plus proche du débat actuel autour du mariage gay, que le mariage traditionnel risque d'être sévèrement écorné au fil de pages.
Hé bien pas du tout ! Il y a tromperie sur la marchandise, nous sommes dans la plus pure tradition du roman classique. Madeleine, l'héroïne, jeune étudiante issue d'une famille fortunée aime Léonard, d'extraction beaucoup moins bourgeoise et maniaco-dépressif. Mitchell, lui aussi né avec une cuillère d'argent dans la bouche, aime Madeleine en silence et se réfugie dans la religion. Nous sommes dans les années 80, aux USA, et les trois héros entrent dans l'âge adulte. Ils vont comme leurs aînés se brûler les ailes, perdre quelques illusions, et plonger tête la première dans le même conformisme que leurs parents alors qu'ils ont tous les possibles qui s'offrent à eux.
Entendons-nous bien, ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de relation homosexuelle entre les héros mâles que j'émets quelques réserves sur ce roman. Non. Ce qui me dérange un peu c'est le côté banal de tout ça er surtout de délivrer un message ultra traditionnel du genre : jeune fille riche, ne vous mariez pas avec n'importe qui, réfléchissez, soyez raisonnable, ne vous laissez pas emballer par votre sensualité, choisissez quelqu'un de sûr, de riche comme vous pour faire croître le patrimoine, qui pourra gagner de l'argent, mais surtout mariez-vous et restez avec votre mari (sauf s'il est malade, maniaco dépressif comme ici, c'est mauvais pour la reproduction). On retrouve comme dans beaucoup de soi-disant grands romans US, cet univers clos que sont les universités, comme si en dehors de ces établissements d'élite, il n'y avait pas d'autres lieux possibles pour un grand roman (Il faut ajouter maintenant l'univers des banques et de la finance, très tendance aussi ).
Je pinaille un peu c'est vrai, mais cette banalité a gâché tout le reste, car le reste est de la belle ouvrage.
Formellement ce livre est très réussi. La narration éclatée, faisant fi de la chronologie mais sans jamais perdre son lecteur, est un modèle de construction. L'humour, très présent, s'attaque aussi bien aux cours abscons de sémiologie qu'aux problèmes d'allaitement. L'auteur a réussi à caser dans son histoire un exposé sur les levures, un autre sur le roman victorien, un troisième sur le lithium sans tout à fait casser le rythme de son récit, assez lent car, comme tout bon auteur américain qui se respecte ( en France ), il aime les détails et les petites anecdotes qui donnent à l'ensemble de la profondeur.
Seulement, aussi brillante que soit la démonstration, elle est un somme toute assez peu originale et développe surtout un propos très moralisateur caché derrière des personnages finalement pas vraiment attachants.
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