Voilà un film qui sort à point nommé. Alors qu'Israël met en avant ses instincts les plus belliqueux, "Ana Arabia" nous propose de nous conduire dans un havre de paix entre les peuples, dans une ruelle oubliée, en essayant de nous passionner par la vie d'une juive rescapée d'Auschwitz, ayant épousé un arabe. et ayant vécu dans une sorte de colonie mêlant juifs et palestiniens.
A partir de cette histoire bien réelle, hautement symbolique, Amos Gitaï a mis en place un dispositif étrange qui tient lieu de performance; "Ana Arabia" ne comporte qu'un seul et unique plan. La caméra suit dans une succession de ruelles et de cours une journaliste enquêtant sur la vie d'une certaine Siam Hassam, interrogeant sa famille et ses amis.
C'est d'un ennui mortel. Il y avait des mois que je ne m'étais pas autant rasé au cinéma ! Même le dernier Godard pouvait passer pour palpitant. La soi-disant prouesse technique laisse songeur à l'heure des caméras numériques ultra légères (Il paraît que le réalisateur a immobilisé par trois fois tout un quartier pour ses prises, sa caméra étant fixée à une grue...). On sent que le scénario a été remanié à la va-vite ( entre chacune des trois prises selon les échos, en virant notamment la comédienne qui devait jouer le personnage principal de cette juive devenue arabe et en décidant qu'elle ne serait qu'évoquer). Du coup le propos se trouve dilué dans un verbiage confus et inintéressant, fleurant l'improvisation. Le spectateur plonge dans un ennui profond, ne trouvant rien à quoi se raccrocher. L'histoire est tout bonnement rendue incompréhensible. Cerise sur le gâteau, la comédienne que suit obstinément la caméra, ne possède pour seul talent que celui de donner au spectateur l'envie de lui coller une claque ! Aussi expressive qu'un cageot d'avocats abandonné dans un coin d'une échoppe de Tel Aviv, impeccablement maquillée, elle ne doit sa présence qu'à sa jolie plastique. Son seul jeu de scène se réduisant à faire semblant de noter des mots sur un petit calepin (on se demande bien quoi d'ailleurs car c'est toujours au moment où les protagonistes parlent de la pluie et du beau temps)...
Du coup "Le plaidoyer pour la paix au Proche Orient" vanté par un publicitaire avisé, sachant profiter de l'actualité pour essayer de faire son beurre (ou plutôt d'exhumer des étagères poussiéreuses du distributeur cette chose mal fagotée) est un vrai pensum totalement raté.
Malgré cette réelle envie de porter haut ce symbole d'unicité dans un pays déchiré, Amos Gitaï rate sa cible sur toute la ligne. Ce film ne ressemble en rien à ce que peuvent nous proposer depuis quelques années, tant au cinéma qu'en littérature, cette nouvelle génération d'artistes israéliens voire palestiniens, beaucoup moins consensuels et essayant avec des fictions autrement plus percutantes de secouer le cocotier local.
"Ana arabia" n'est finalement que l'expression de l'impuissance d'une génération un peu dépassée, mal connectée à un présent qui demande autrement plus de pugnacité que cette fiction éthérée, laborieuse et peu inspirée.
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