On nous promettait une nouvelle ambiance, un vrai salon de rencontres lecteurs/auteurs, du neuf, du convivial, du presque jamais vu ! J'y suis allé et j'ai vu...enfin, pas vu le changement... J'ai retrouvé le même alignement de stands dans lesquels on aligne tout pareillement des auteurs de notoriétés diverses. Ainsi être assis à côté de Mathias Enard, dernier Goncourt en date, alors que sort tout juste son premier recueil de nouvelles, fait ravaler ses vanités de jeune écrivain même prometteur ( dixit l'attachée de presse). Voir un longue file de lecteurs avides d'approcher un instant une star des lettres alors qu'à sa droite une romancière fait mine de consulter ses nombreux sms sur un portable qui n'est même pas un iphone ( comme celui de son voisin), est pathétique et me donne souvent envie d'aller jeter un oeil à la petite pile de quatre ouvrages (alors que le voisin disparaît presque derrière un mur de ses livres à succès) qui jouxte timidement un stylo bille esseulé.
Donc rien de bien nouveau au salon du livre, mais toujours quand même la joie de déambuler dans ce qui est la plus grande librairie de France ( encore que, au hasard, j'ai cherché les éditions Denoël qui semblaient bel et bien absentes). Il y avait foule mais c'était convivial. Les lecteurs sont en général des gens causants qui échangent volontiers au hasard d'une prise en main d'un livre et qui vous disent : "Oh c'est un livre formidable !" Et hop c'est parti pour un moment d'échange de coup de coeur, de coups de griffes ! Mieux que dans une librairie, la grandeur du lieu semble déshiniber les lecteurs. Après tout, le livre est une fête quelque part ! Alors soyons festifs !...
Et comme c'est la fête, Manuel Valls, que cachait une troupe compacte de vigiles, de photographes, de cameramans, de conseillers, voulait en être ! Il est apparu en plein samedi après-midi, avançant difficilement dans les travées déjà bondées. Pas sûr qu'il ait pu apercevoir un bouquin tellement il était entouré mais qu'importe, il était de la fête. On a bien entendu quelque grincheux dire haut et fort : "Il n'a pas autre chose faire ? " Je me demande si ce n'est pas le même qui, un peu plus loin, a lancé en passant devant un autre troupeau pareillement fourni mais entourant Alain Juppé : " Il est sorti de tôle celui-là ? ".Le lecteur peut donc aussi se révéler taquin, surtout face à des personnages qui ne sont pas de vrais auteurs, même s'ils font paraître beaucoup d'ouvrages à leur effigie.
Le lecteur se laisse parfois aller à l'idôlatrie, comme ceux qui se massaient pour obtenir un gribouillis de Fabrice Luchini, dédicaçant à la chaîne son livre de souvenirs devant un parterre énamouré de dames vieillissantes, jouant du coude et du cou pour certaines, tentant d'apercevoir la bête qui n'éructait pas ( enfin je ne pas sûr, je ne me suis pas approché assez) ou smartphone à bout de bras pour d'autres, essayant d'immortaliser l'instant en photographiant la star qui, si elle venait à voir le résultat, vociférerait de rage devant le cliché peu flatteur obtenu par cette plongée hasardeuse. Mais l'acteur devant l'émeute provoquée ne maîtrisait plus son image contrairement à d'autres, comme une romancière que je ne citerai pas ( car je l'apprécie beaucoup) mais dont l'attachée de presse, interdisait vertement toute volonté de photo ou de selfie, ne voulant pas que se propagent quelques portraits non retouchés ou mal éclairés de sa protégée.
Ces comportements restent somme toute minoritaires. Le lecteur se sert parfois de son appareil portable pour immortaliser quelque moment people mais est surtout là pour son amour du livre. Et quand on aime, on compte ! J'en ai vu sur un petit carnet, additionner leurs achats et dire : " Encore un et c'est tout!". Oui le livre reste cher, les budgets de plus en plus serrés, de là à dire que l'on en veut pour son argent (surtout après avoir payé l'entrée 12 euros !) il n'y a qu'un pas ...et il est franchi. Le lecteur peut donc parfois apparaître exigeant. S'il aime à voir son auteur préféré en vrai, il le désire aussi en pile, et quand il est absent, on s'en inquiète. Ainsi chez Glénat, un vendeur rougissant faisait profil bas devant l'étonnement un poil militant d'un bédéphile soupçonnant un certaine discrimination devant l'absence des BD de Ralph Koenig sur le stand ou plus loin, chez Grasset, un monsieur était scandalisé de ne pouvoir toucher un ouvrage obscur d'un auteur tout aussi obscur, soit disant toujours présent dans le catalogue de l'éditeur bien que paru en 1983!
Qu'importe ces comportements marginaux, "Livre Paris" fut une belle fête, moins fréquentée que l'an dernier ( une baisse de 15% des entrées) mais toujours aussi merveilleuse pour tous les amateurs de lecture qui rêvent devant ces piles colorées, comme des enfants devant une montagne de bonbons,. Alors, on peut râler, critiquer, s'énerver, on est certain d'y retourner l'an prochain! Moi en tous les cas, c'est déjà acté !
Et bien moi ça ne me donne pas du tout envie. Le Salon de l'agriculture version littéraire, des milliers de personnes, du bruit, de la frustration parce qu'on a pas pu voir machin ou parce qu'on a plus de sous (vu qu'on a dû vendre un rein entre le voyage et le prix d'entrée et qu'on avait pas le droit d'amener ses propres bouquins)... La liste est longue.
RépondreSupprimerJe préfère de loin les petits salons de province ou les salons spécialisés qui sont plus accessibles, avec des auteurs moins sollicités et donc plus facile à aborder, des sourires partout, pas d'interdiction et toujours de la bonne humeur :)