Nous sommes en 1915 à Paris et une belle jeune femme demande à son miroir si elle est la plus belle. La première planche pose décor et genre en quelques cases et lorsque l'on tourne la page et qu'on lit :" Bien sûr, ce con ne répondait jamais" , le ton est donné : irrévérencieux et pour public ayant grandi. Tandis que la beauté du début verra sa vie s'enfoncer petit à petit ( pour être enterrée en milieu d'album), se révèle une intrigue se déroulant dans un immeuble où l'on a retrouvé Mr Roger Ronimo transpercé d'une flèche. Et derrière tous les portes de cet immeuble à nombreux étages, on croisera un bourreau, le Père-Noël, Jésus-Christ, Mr Wolf ( sous la forme d'un loup), le chaperon rouge, Peter Pan, ..... L'inspecteur chargé de l'enquête et son adjoint ne sauront où donner de la tête tellement l'affaire tournera à l'absurde. Trouver le coupable dans ce jeu de références, de clin d'oeil et de choses merveilleuses ou magiques deviendra un casse-tête kafkaïen ( tiens, pas de références au célèbre écrivain).
La première partie de l'album est jubilatoire. Tout s'entremêle, se chevauche, jusqu'à l'absurde. Les dialogues fusent, remplis de jeux de mots. On se fiche royalement de l'intrigue car cette déferlante de situations de plus en plus hallucinantes s'imbriquent avec tellement de virtuosité que l'on boit du petit lait. Et puis, soudain, tout part en vrille et ce, exactement, à la page 75 lorsque le personnage du bourreau dit au Père-Noël : " Vous allez vous fourvoyer dans une discussion anti-religieuse,anti-cléricale. Les lecteurs vont se lever les uns après les autres et quitter la BD." Case prémonitoire ? Avertissement au lecteur que j'ai pris au pied de la lettre ? La conversation anti-religieuse m'aurait sans doute plus amusé que la suite que prend le roman graphique. Les auteurs se sont mis en tête de donner une solution à cette intrigue improbable, lui donner du sens, et là, on s'enfonce dans une succession de pages assez lourdingues. Malgré quelques gags visuels épatants ( les personnages transformés en personnages de livres d'images), la visite des policiers au pays des contes mâtinée des propos de Bruno Bettelheim, convainc beaucoup moins, laissant une relent de déjà vu ou de "trop c'est trop", comme si soudain cette cascade de jeux de mots, de rencontres improbables tournait à vide, seulement au service d'une conclusion tirée par les cheveux.
C'est donc un peu déçu que j'ai refermé cet album pourtant assez original dans son projet mais n'ayant, pour moi, pas tenu les promesses d'un départ fulgurant. Cependant, jetez-y un oeil , juste pour le plaisir de découvrir le sort que les auteurs réservent à la grand-mère du petit chaperon rouge... une vision réjouissante de ce personnage qui, jusqu'à présent, jouait les utilités vieillissantes...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire