Si l'on connaît mal ou pas du tout l'œuvre de Sophie Calle, se plonger dans cette 5ème édition " Des histoires vraies" s'avère une excellente façon de découvrir un petit pan des activités artistiques de cette formidable artiste française.
Sophie Calle fait de sa vie et de son intimité une œuvre d'art. Dis comme cela peut apparaître un peu abrupt voire difficilement imaginable surtout si on rajoute que pour cela elle mêle photographie, écrit, exposition d'objets divers, scénario originaux la mettant en scène, ...
Dans ce dernier ouvrage, qui contient quelques inédits, on a déjà un petit aperçu de sa démarche créative, aussi fascinante qu'inventive, aussi drôle que tragique, aussi intime qu'universelle dans le questionnement qu'elle induit sur la nature de chacun de nous quant à être exhibitionniste ou voyeur.
Au fil des doubles-pages ( photo + texte), nous savons beaucoup de choses de la vie privée de Sophie Calle, ses doutes parentaux, ses amants, ses maris, ses petites manies ( tenir le sexe de son mari quand il urine), ses expériences ( stripteaseuse dans une baraque foraine, jouer au dé la venue d'un homme dans son lit, ...), son fétichisme ( pour des tasses de café ou ses chats), ses idées lumineuses ( à un new-yorkais inconnu lui écrivant qu'il rêvait de dormir dans son lit, elle envoya par avion son sommier,son matelas avec ses draps, sa couverture et son oreiller, lui demandant de le lui renvoyer une fois son rêve réalisé). Et au milieu de toute cette vie consacrée à faire de sa vie une œuvre, c'est surtout le thème de l'absence qui revient ( ses chats, son père, sa mère, les hommes qui l'ont quittée, ...) de plus en plus prégnant au fur et à mesure que l'âge avance.
Mais ce qui rend la chose encore plus intéressante, ce sont finalement les textes que Sophie Calle écrit, éléments indispensables de la plupart de ses expositions, véritables petits bijoux de précision, de concision, simples et secs. Chaque récit, en fait un cartel d'exposition, est comme une petite nouvelle de quelques lignes, surprenant, où l'impudeur paraît simple voire pudique, où éclate l'inventivité et où la tension est palpable à chaque mot. Petit exemple : un dessin lacéré d'une femme nue ( Sophie Calle évidemment ) et en face, on lit un petit texte intitulé " La lame de rasoir" :
" Je posais nue, chaque jour, entre neuf heures et midi. Et chaque jour, un homme à l'extrémité gauche du premier rang me dessinait pendant trois heures. Puis, à midi précisément, il sortait de sa poche une lame de rasoir et, sans me quitter des yeux, il lacérait méticuleusement son dessin. Je n'osais bouger, je le regardais faire. Il quittait ensuite l'atelier, abandonnant derrière lui ces morceaux de moi-même. La scène se renouvela douze fois. Le treizième jour, je ne vins pas travailler."
Voilà une infime partie de ce qui vous attend dans ces histoires vraies, œuvres d'art d'une de nos plus grandes artistes contemporaines, réunies dans une très élégant ouvrage joliment relié. Pour le prix d'un roman habituel, vous aurez l'essence même d'un esprit hors du commun, vous découvrirez des émotions comme peu de romanciers arrivent à le faire, vous serez éblouis par le reflet de vous même que Sophie Calle vous renvoie. Une expérience à ne pas rater !
Prête à TOUT (j'adore),même jusqu'à demander à un 'certain autre artiste' de mettre en chanson Sophie Calle n 108 ;-)
RépondreSupprimerOh ! Une fan de Cali !
SupprimerUne Calle,des Cali
SupprimerUn PETIT bijou, au format permettant d'être entouré délicatement dans nos mains, nous ressentons alors l'impression de posséder un journal intime d'une valeur inestimable.
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