dimanche 1 septembre 2019

Les grands cerfs de Claudie Hunzinger


3 bonnes raisons pour avoir la curiosité de découvrir le dernier roman Claudie Hunzinger

1) Vous adorez l'autofiction.

Marguerite Duras, Hervé Guibert, Sophie Calle, Christine Angot, Alain Robbe-Grillet entre autres ont tous pratiqué l'autofiction pour le grand bonheur de beaucoup de lecteurs ( ou la moquerie de certains autres, mais on ne peut pas plaire à tout le monde). Cette forme romanesque, portée sur l'introspection, peut constituer une oeuvre ( Annie Ernaux) mais aussi être un procédé dont ce sont emparés beaucoup d'écrivain(e)s pour aborder des sujets très personnels voire intimes qu'ils voulaient mettre au grand jour dans un but de généralisation. Claudie Hunzinger s'inscrit plus dans une veine militante, sa vie passée dans une métairie du 17 ème siècle perdue dans les Vosges au milieu de la nature et de deux grandes bibliothèques fait d'elle une intellectuelle observatrice attentive de notre terre et des ses habitants, humains comme animaux et des dangers qui guettent chacun.

2) Vous aimez les animaux et le spécisme vous parle. 

Avec un tel titre, " Les grands cerfs" , vous sentez bien que vous roderez plus dans des forêts touffues que dans des zones urbaines polluées. Sur les pas de la narratrice, vous troquerez vos atours colorés et fluos de vos séances de jogging matinal pour une tenue nettement moins voyante, proche du camouflage militaire, pour partir à l'affût des grands cervidés qui peuplent vaille que vaille les bois avoisinants. En compagnie d'un photographe naturaliste, vous observerez, approcherez, connaîtrez tout de la vie des cerfs ( les plus grands mammifères de France) et de sa femelle la biche. Avec la même patience que Claudie Hunzinger, vous pénétrerez petit à petit dans un monde insoupçonné, où la beauté de leur vie naturelle deviendra très vite source de fascination, d'admiration, d'attachement. Et lorsque viendra le temps d'un comptage nocturne sous la lumière crue et insensible de phares de 4x4 puis celle de l'abattage de quelques bêtes en vue de protéger la forêt ( et surtout les deniers des sylviliculteurs), la prose sensible terriblement humaine, humaniste de l'auteur nous broie le coeur. Subtilement pédagogique ( on saura tout, tout, tout sur le cerf et sur les moyens pour arriver à l'approcher), indéniablement militant pour la cause animale ( mais jamais de façon manichéenne, bien au contraire), le roman parvient à nous emporter au-delà de tout pronostic ( je l'avoue, je ne pensais pas que je serai touché à ce point par ce récit). 

3) Vous aimez les auteurs qui apportent du sens et de l'intelligence. 

Bien plus que le  simple descriptif d'une femme allant à la rencontre d'une espèce animale, " Les grands cerfs" agrège beaucoup d'autres éléments qui rendent ce texte formidablement vivant, intelligent, poétique, stimulant. En autofictionnant des événements de sa vie, Claudie Hunzinger réfléchit, questionne, fait appel à d'autres auteurs, enquête, ne se contente jamais des faits bruts, fouille autant les talus, les bosquets que l'âme humaine des plus sensibles ( elle, son mari), de plus ambiguës ( celle du photographe) ou apparemment taillée d'un seul bloc ( les agents de l'ONF, les chasseurs). Sans jamais quitter des yeux les majestueux cervidés qui semblent percevoir le péril grandissant de leur existence, le roman, en se focalisant sur un espace vosgien assez limité, crie un appel vibrant à la protection, non pas d'une seule espèce mais de toute la vie, aussi bien humaine qu'animale. Un vrai et grand sujet !  


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