La tradition cannoise quant au film d'ouverture est respectée : une daube internationale qui sort en salle simultanément, histoire de profiter du porte-voix du festival pour essayer de traîner le max de spectateurs en salle la première semaine ( en croisant les doigts pour que le temps ne soit pas trop beau !).
Donc nous avons un cinéaste iranien auréolé par quelques précédents succès dans la case "Art et essai", tournant en Espagne avec un couple local mais exilé depuis longtemps aux States et produit par la France et l'Italie notamment. Le résultat suit la courbe descendante impulsée après le triomphe de "La séparation". Dans la droite ligne de ce qui fait le sel de son cinéma, c'est à dire une forte propension à jouer de la morale sous la forme d'un thriller, Asghar Farhadi reste dans l'étude psychologique et les ravages qu'occasionne un événement ( ici un kidnapping). Seulement, en transposant la chose en Espagne, on ne sait si c'est la mollesse qu'induit un soleil trop fort ou l'excès de Rioja ou autres vins locaux, mais le résultat est plus proche d'un feuilleton d'été sur TF1 que de l'œuvre d'un grand cinéaste. Disons que le film est à l'image de son générique de début qui nous montre les vieux rouages fatigués d'une horloge décrépite.
Si l'on peut être épaté par les scènes d'introduction, franchement bien espagnoles, très vite les grosses ficelles scénaristiques improbables apparaissent. Nous assistons alors à tous les poncifs du genre pour essayer de rendre l'atmosphère inquiétante : les regards en coin qui en disent long, les sous entendus qui laissent à penser que tous le monde a un secret, ...bref tout un attirail romanesque mille fois vu dans les histoires de famille qui vont imploser. On n'y croit guère...on s'ennuie un peu à regarder ( mal ) pleurnicher Pénélope Cruz qui passe son temps à ça. Du coup on remarque la jolie teinture de Javier Bardem, toujours aussi joliment coiffé et qui ajoute de nouvelles chemises à carreaux dans sa filmographie pourtant bien remplie en costumes improbables. On n'arrive pas toujours à savoir qui est le frère du cousin de la belle sœur de l'oncle, mais on s'en fout puisque de toutes les façons il sait quelque chose qu'il dira tôt ou tard. Au bout d'un moment, Pénélope un peu jalouse des costumes de son mari ( dans la vie, parce que dans le film, c'est juste un ex), enfile des robes Marcelle Griffon ( oui ça existe encore en friperie !), ça doit aller avec le chagrin. Entre deux regards noirs et trois allers-retours excités en voiture ( pour faire croire que l'on donne dans l'analyse profonde ), les révélations pleuvent. On apprend que truc a couché avec machine mais que l'autre ne le sait pas ...mais en fait si et bidule aussi donc il a peut être fait ça... On aimerait bien qu'ils crachent bien vite leurs secrets, histoire que Pénélope arrête de bramer, mais le film prend son temps en d'inutiles circonvolutions qui rendent l'histoire de plus en plus improbable.
Sans être totalement raté ( il y a quand même une certaine grâce parfois dans la mise en scène), "Everybody Knows" montre bien les limites d'un cinéma international qui s'égare un peu à vouloir détourner certains metteurs en scènes de leur lieu d'inspiration d'origine et pour le coup nous offre des produits formatés et sans grand intérêt.
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