lundi 28 mai 2018

Funambules de Charlotte Erlih



Voici un premier roman où tout se joue sur un fil, autant le(s) thème(s) de l'intrigue ( oui je sais ces parenthèses paraissent bizarres, mais comment définir l'unique/multiple intrigue qui donne toute l'originalité de ces "Funambules" ? ) que parfois l'intérêt du lecteur.
Au départ, classiquement, nous balançons entre deux récits entremêlés, celui de Judith, journaliste pas vraiment grand reporter et celui d'Ada, jeune femme un peu paumée, espérant pouvoir réaliser un premier film. La première s'invite dans un cirque en représentation à Mimizan ( dans les Landes... pour les nuls en géographie ...donc loin du brillant de Cannes ou du signifiant Calais). La seconde se traîne dans un petit studio qu'elle devra quitter dans cinq jours sans savoir où elle va pouvoir se poser ensuite. Deux portraits de funambules de la vie, au bord d'une possible précarité si faux pas et dont la solitude s'agrandit au fur et à mesure que la vie en société devient de plus en plus difficile. Judith flashera sur un funambule, autant pour ses talents que pour son charisme à la froideur intriguante. Ada, vivra d'un vague espoir de voir son scénario accepté par un producteur avec qui elle a un rendez-vous de la dernière chance. Très vite, on s'apercevra que ces deux intrigues n'en font qu'une, s'unissant dans un récit unique que l'auteure nous écrit en funambule .
Le scénario, présenté sous forme de récit, vaut ce qu'il vaut et se transformera au gré des remarques pointues du producteur  puis de l'imagination galopante de la scénariste qui essaiera de répondre au mieux, aux canons des desiderata d'un cinéma formaté. Ces deux derniers se livreront à une joute verbale qui fera évidemment penser à la partie d'échec entre la vie et de la mort dans "Le septième sceau"  d'Ingmar Bergman ( évoqué dans le roman), Ada jouant quasiment sa survie sociale.
Cette construction, franchement ludique, parfois jouissive, trouve ses limites dans le déséquilibre des deux histoires. Le scénario, certes convenu pour permettre sa transformation rapide face à un décideur, manque toutefois de relief. Le récit du duel entre celle qui se rêve réalisatrice et le producteur, prend très vite le pas sur le reste. En tant que lecteur, nous sommes sur le fil, notre intérêt réel peut parfois vaciller, voire penser dangereusement que l'on nous offre un récit un peu lambda.
Nous arrivons toutefois à garder le fil de cette histoire sous nos yeux, l'écriture fluide, parfois joyeusement mordante pour traiter le personnage d'Ada et le monde du cinéma, de Charlotte Erlih, rend son personnage très attachant. On peut saluer pour un premier roman, un joli récit vraiment ludique mais fragilisé par deux histoires pas toujours en harmonie au niveau de la tonalité, l'ordinaire de l'un se heurtant à la jolie rugosité de l'autre. 

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