Lire un album de Marc-Antoine Mathieu est toujours une expérience inédite. Génial inventeur de concepts nouveaux, il explose depuis quelques années la bande dessinée classique, en explorant des zones inédites. Son précédent album 3" chez Delcourt en 2011, était déjà une prouesse, celui-ci l'est tout autant.
Première chose, le titre "Le décalage" est bien réel. La structure habituelle de l'album est décalée de 9 pages. Ce qui devait être la couverture est placée vers la fin de l'album, l'histoire débute dans cet endroit inhabituel et donc c'est la page 7 de l'histoire qui se trouve sur ce qui aurait du être la couverture ... Vous suivez ? Premier concept original mais ce n'est pas le seul... Je vous fais grâce de l'absence de texte sur la tranche, des 6 pages déchirées vers la fin du récit et bien sur du code barre situé juste avant la couverture vers la page 40... obligeant l'éditeur à coller un petit sticker sur la quatrième de couverture qui n'en est pas une, puisqu'il s'agit de la page 6 ! Vous êtes perdus ? Ce n'est pas grave car les personnages de l'histoire le sont aussi. Le héros à rater le début de l'histoire à cause de la manipulation hasardeuse d'un lit chez un réparateur... Propulsé dans l'espace/temps, il ne peut donc vivre son aventure, laissant la place aux seconds rôles qui se trouvent perdus dans une décor où il n'y a rien. Ils n'ont pas de dialogue, pas de rebondissement. Ils sont obligés de s'interroger sur le rien qui les entoure et les angoisse. Joyeux mélange de Beckett, de Kafka et de Raymond Devos, l'histoire n'avance pas, rien ne se passe, rien ne retient le lecteur non plus, mais pourtant, il déguste jusqu'à la fin cet OVNI de bande dessinée.
C'est totalement maîtrisé, absolument original, c'est évidemment un album qu'il faut avoir dans sa bédéthèque histoire de se rappeler que dans la bande dessinée, il y a des petits génies qui font preuves d'une créativité infernale. Cependant, cela reste un objet de curiosité pour lequel je ne suis pas sur de me replonger volontiers, sauf si je dois disserter sur le rien...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire