mercredi 21 février 2018

Winter Brothers de Hlynur Pàlmason


Comment donner envie d'aller voir un premier film danois, réalisé par un islandais et se déroulant l'hiver dans une sombre mine de calcaire au fin fond du Danemark ? Ce n'est pas gagné d'avance, surtout si je rajoute deux trois éléments qui n'ont rien de vendeur mais qui donnent à ce film son originalité, sa force, à savoir un travail sur la bande son extrêmement méticuleux, jouant beaucoup sur les bruits sourds de la mine mais aussi sur une partition musicale...disons très contemporaine ( dans le sens un peu dissonant) et sur une mise en scène empreinte d'un regard tout aussi contemporain qui cherche le plan signifiant, l'image très graphique qui rappelle que son réalisateur est issu du milieu des arts visuels ( pour les néophytes, un artiste visuel expose des travaux qui paraissent toujours étranges aux adeptes du classicisme, genre des bouts de tuyaux photographiés sur du béton brut mais sale un soir d'hiver ou des vidéos qui semblent tournées par un ado ayant trop forcé sur le shit... ce qui n'est peut être pas le cas de Hlynur Pàlmason...car on ne trouve pas grand chose sur le net de ses travaux hors cinéma). 
Faut être clair ( même si le film débute par une scène dans le noir de la mine), jamais tous les éléments décrits plus haut n'alourdissent le film bien au contraire, ils permettent de s'ancrer au mieux dans cette histoire de rivalité entre deux frères dont l'un, un peu frustre, arrive à se créer un petit statut social au sein de cette équipe d'ouvriers, en leur vendant une mixture frelatée de sa composition qui sert à les réchauffer durant le travail ( et malheureusement à en tuer un, tellement les ingrédients sont nocifs). Dans cet univers rude, où les femmes sont rares et les frustrations nombreuses ( en plus ils logent dans de sordides Algeco posés en rase campagne comme un camp sinistre ), Emil va passer de copain intéressant à paria ou comment un jeune homme qui n'a pas grand chose pour lui va devoir supporter de passer pour invisible.
C'est vrai que le scénario lui non plus n'est pas vendeur... Et pourtant vous passerez une heure et demie totalement dépaysante ( ce n'est pas tous les jours que nous voyons un film dans ce milieu ). Votre regard sera cajolé par un nuancier de gris des plus beaux, le film s'ingéniant à vous faire ressentir au plus profond de vous ce froid, cette rigueur, cette hargne qui envahit le héros. C'est à un voyage sensoriel et émotionnel que vous convie ce film qui, malgré la virtuosité de sa forme, reste toujours simple dans sa plongée psychologique. Le festival Premiers Plans d'Angers ne s'y est pas trompé, Catherine Deneuve et son jury lui ont donné leur prix ( ex aequo) le mois dernier ...




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