Pas spécialiste d'Hugo Pratt, ni tout à fait admirateur de son célèbre trait, même pas fanatique de Corto Maltese dont j'ai pourtant suivi dans mes jeunes années les aventures quand il était publié dans Pif gadget, j'ai donc eu un oeil neutre en lisant cet album. Ma première impression est que j'ai trouvé cela très daté, vieillot. J'ai eu l'impression de retombé dans les Spirou des années 60, dans ces histoires où le contexte historique sert uniquement de toile de fond à des aventures toujours identiques, mettant en avant la force et la ruse d'un héros au caractère bien trempé. "Fanfulla" ne déroge pas à la règle. Ma deuxième impression, est la même que celle que j'ai eu il y a plus de quarante ans quand j'ai découvert Hugo Pratt. Si l'originalité de son trait est évidente, j'ai beaucoup de mal à entrer dans son univers où le décors est quasiment absent, seulement symbolisé par deux ou trois détails ou objets. On me rétorquera, avec raison, que c'est cela qui donne sa force à l'oeuvre, cette facilité à la rendre universelle et si philosophique, mais je n'y peux rien, mon adhésion est difficile... Il y a des chef-d'oeuvres qui ne me parlent pas.
"Fanfulla" possède effectivement tous les prémices de l'oeuvre qui suivra : jeu de traits noirs plus ou moins appuyés, soulignés par de grands aplats sombres, fond à peine ébauchés, et cela ravira tous les fans d'Hugo Pratt. Nous sommes quand même loin de l'épure si attirante des aventures de Corto Maltese, car ici, le style hésite encore entre la bande dessinée traditionnelle de l'époque et celui si particulier qu'il sera plus tard. Je suis donc resté sur ma faim, trouvant même que cette présentation grand format mettait pas mal en avant les hésitations stylistiques de l'auteur. Cependant, j'ai admiré la qualité de l'édition, du papier, le format à l'italienne, la mise en couleurs avec des aquarelles pas trop envahissantes, sa présentation façon coffret.
Bel objet, bel hommage, belle édition, mais uniquement réservé aux aficionados du créateur de Corto Maltese, les autres trouveront qu'en cinquante ans, la bande dessinée a bien progressé tant au niveau de la narration que de l'ambition littéraire, voire même du dessin...
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