mercredi 5 février 2014

Martin de La Brochette de Thierry des Ouches


A l'heure où les dames à serre-têtes et jupes plissées ont été jetées à la rue par un gouvernement ignoble qui ose aller contre leur soi-disant idées bien-pensantes camouflant bien souvent des actions nettement moins catholiques, sort un petit roman rigolo sur une famille versaillaise. Attention, quand l'auteur Thierry des Ouches parle de famille versaillaise, il s'agit bien sûr de celles qui ont maison bourgeoise sur rue avec enfants en smocks et la messe du dimanche en sautoir, pas de celles reléguées dans quelques bas quartiers.
Mme de La Brochette, veuve à la blondeur aussi entretenue que sa ligne impeccable, règne sur sa petite famille de 4 enfants. Sûre de son pouvoir, de son aura, de son bon goût, elle arbore l'image d'une femme épanouie dont la famille est aussi impeccable que ses tailleurs et ses trois rangs de fausses perles. Ses enfants ont merveilleusement réussi leur vie. Sa fille unique a abandonné de brillantes études pour être l'épouse dévouée d'un hyper cadre à Bercy. Louis, son fils préféré est beau, intelligent, formaté par HEC et va épouser une créature ravissante (heureusement qu'elle a un physique car le reste est moins reluisant, ni famille digne de ce nom, ni intelligence). Pierre, son deuxième, est prêtre, un must dans une paroisse comme Versailles (bon, c'est en fait Saint Germain en Laye, mais c'est kif kif bourricot!). Ah oui, il y a un troisième... Bon, on va dire vite fait qu'il n'est pas fait pour les études, qu'il dénote un peu sur les photos de famille car tout en rondeur alors que le reste de la troupe arbore une silhouette digne de leur rang. Pourtant, c'est ce dernier qui va raconter la famille. Il va profiter de la réunion pascale autour d'un gigot d'agneau/flageolet pour annoncer une nouvelle qui risque de leur donner quelques aigreurs d'estomac. Il a trouvé sa voie et va embrasser la profession de boucher ! Les fausses perles tremblotent sur des poitrines estomaquées. Les serre-têtes vacillent au-dessus des cerveaux qui se demandent déjà comment on va pouvoir glorifier auprès des amis ce revers de bien mauvais goût. La partie féminine va avoir des migraines. La partie masculine, moins sujette à la vitrine, s'en fout un peu...
Photographe de renommée internationale, Thierry des Ouches s'essaie au roman et dans la description d'un milieu qu'il semble bien connaître et peut être empreint de souvenirs personnels. Ca démarre comme un règlement de compte sur ces familles dont les codes vestimentaires et la vie en société n'est qu'un vernis caricatural, cachant certaines vilaines choses. Ce n'est pas nouveau mais c'est agréable à lire. Quand le roman ensuite aborde la vie idyllique du couple dans sa boucherie/charcuterie à Parthenay, le ton est plus convenu. Si l'auteur dézingue les traditions bourgeoises, il défend par contre les traditions culinaires et régionales de notre pays en route vers une uniformisation gustative. De l'incisif on passe aux rondeurs appétissantes mais un peu compassées de la bonne bouffe, comme si une convention éliminée en apportait une nouvelle. Puis le roman se termine en famille, qui, après les épreuves diverses que la nouvelle génération lui a fait subir, colmate comme elle peut la vraie vie qui essaie de s'infiltrer en son sein.
C'est agréable à lire mais pas complètement réussi. Les différentes ruptures de ton, voire de style,  entre chaque partie donnent un ensemble un peu brinquebalant. On sent, aussi bien que dans ce qui est raconté que dans la façon dont c'est fait, que quoique l'on fasse, les réflexes de classe et d'éducation ont du mal à disparaître. On a beau jeter aux orties certaines conventions, elles apparaissent sous d'autres formes.  Une prise de conscience salutaire de la réalité leur donne une forme nouvelle. La couche de vernis est très épaisse et ne s'élimine pas du premier coup. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire