mardi 6 février 2018

La mise à nu de Jean-Philippe Blondel




Replonger dans un roman de Jean-Philippe Blondel ( JPB) demeure un plaisir formidable. Retrouver ce style simple mais enveloppant qui cerne si bien notre quotidien pour mieux l'intégrer dans une histoire qui sait nous happer, participe pleinement au plaisir de lire. Et cette année, bien plus percutant que "Mariages de saison " son précédent roman, " La mise à nu"  est un must dans son œuvre.
Louis, le personnage principal, approchant la soixantaine, quelque part une projection de l'auteur même si celui-ci est un poil moins âgé,  retrouve lors d'un vernissage dans sa ville ( on reconnaît Troyes là où habite JPB) un ancien élève ( JPB est prof d'anglais aussi), Alexandre, qui a réussi à percer dans la peinture, ses tableaux commençant à être exposés partout en Europe. Ce trentenaire fringant va proposer à son ancien prof de se revoir autour d'un café. Et ainsi va débuter entre les deux hommes  un drôle de jeu, ambiguë, où chacun va petit à petit se mettre à nu, au figuré comme au propre pour Louis.
Le roman joue sur plusieurs tableaux et ça tombe bien puisqu'il est question de peinture. Un récit principal met face à face ces deux hommes d'une génération différente. C'est le motif central, intrigant, mené comme un thriller psychologique, voire sensuel. On découvre peu à peu l'attachement troublant de l'un, les desseins de l'autre sans jamais vraiment savoir vers où cela va nous mener. En toile de fond, se dessine le portrait d'un homme qui se retourne sur son passé et qui fait le point. Exercice cruel sur les désirs de la jeunesse que la vie réellement menée, les enfants et le métier ont englouti dans l'ordinaire. Regard aussi sur le vieillissement, sa plus ou moins bonne acceptation. Et tout autour, glissés entre ces éléments, des récits de cette jeunesse qui n'espérait peut être pas l'exceptionnel, mais quelque chose de pas trop conformiste comme parfois Louis le sentit dans son corps lors d'escapades à jamais gravées dans la mémoire. ( Pour les habitués de JPB, on retrouve des thèmes développés dans des romans précédents). Tout cela forme un ensemble d'une richesse narrative et émotionnelle franchement prenante et réussie.
Jean-Philippe Blondel parvient à nous émouvoir de la plus belle des façons, c'est à dire sans esbroufe ni calcul, simplement, mais avec une retranscription parfaite de cette prise de conscience que tout humain occidental éprouve lorsqu'il s'aperçoit que le nombre de cartouches à brûler s'épuise inexorablement. Toutefois, le plus réussi reste le suspens trouble qu'il fait naître entre les deux hommes, genre que l'auteur n'avait pas beaucoup exploré jusqu'à présent et dont la lente montée en puissance nous laisse espérer un dénouement...autre que celui qui nous est proposé, très, trop, tellement ouvert qu'il brouille l'interprétation comme si JPB avait eu peur d'un certain dévoilement...
Mais ce léger bémol n'empêche nullement de réserver une après-midi de lecture pour se plonger dans "La mise à nu", pour moi le meilleur de son auteur ( qui en a écrit pourtant un bon nombre d'excellents).



7 commentaires:

  1. Mieux qu'"un hiver à Paris"? Chaussons tous les après ski alors et tentons "la mise à nu "!

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  2. ohhhhhh merci pour l'info ...j'en bave déja !

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  3. Et merci du conseil...un vrai bonheur, un grand JPB !

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  4. Le genre de mise à nu qui déclenche une avalanche de frissons, glaçants de vérité!Merci pour cette chair de poule littéraire, contrairement à bien d'autres livres mis au chaud sous les projecteurs à qui on aurait plutôt eu envie de dire "rhabillez vous!".

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  5. cher ami blogueur!
    je me demandais vu que tu es aussi fan que moi de JPB si tu avais lu "passage du gué" que je suis en train de finir...http://www.lemonde.fr/livres/article/2006/11/09/passage-du-gue-de-jean-philippe-blondel_832465_3260.html
    a bientot
    pop corn :)

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  6. Chère blogueuse,
    Je n'ai pas lu "Passage du gué" ...pas encore...car je sens que je vais aller faire un petit tour vers les anciens Blondel, même si les derniers m'apparaissent plus personnels et sans doute plus intéressants...

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    1. dans le genre personnel: passage du gué est troublant ! tu me diras ...

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