dimanche 15 septembre 2013

Jimmy P. d'Arnaud Desplechin


J'avais laissé Arnaud Desplechin après le secoué "Un conte de Noël" qui ne m'avait pas, à l'époque, convaincu. C'est sans enthousiasme aucun que j'ai pris un billet pour "Jimmy P.", persuadé que derrière les deux/trois photos pas emballantes qui ont accompagné la promotion, se cachait un film à leur image. J'avais tort. J'ai été cueilli dès les premières secondes par ces plans magnifiques qui plantent le décor de façon définitive, embarquant le spectateur pour un long voyage qui peut sembler statique et bavard, mais qui est formidablement passionnant. 
Nous sommes aux USA en 1948, Jimmy Picard (Benicio Del Toro), ancien GI d'origine indienne, souffre de violents maux de tête et troubles de la vision, séquelles vraisemblables de ses états de service lors du débarquement en France. L'hôpital militaire qui le prend en charge soupçonnera des troubles psychiques et fera appel à Georges Devereux (Mathieu Amalric), psychanalyste pas vraiment en odeur de sainteté dans son milieu. Très vite, au fil des séances, le courant passe entre les deux hommes. Jimmy se livre petit à petit, se découvrant au gré des interrogations de Devereux qui lui aussi va, au contact de cet indien, trouver un appui pour se libérer des quelques fardeaux qui encombrent son esprit.  
Bien sur, c'est très bavard, puisque l'essentiel du film réside dans les dialogues quotidiens qu'ont les deux hommes, seulement aérés par la venue de Madeleine, maîtresse du psychanalyste, des images du passé et de la reconstitution, peu convaincante, voire redondante, des rêves de Jimmy. Mais, et c'est là où l'on voit l'importance d'un metteur en scène, ces échanges sont un plaisir pour les yeux et l'esprit. Arnaud Desplechin cadre avec virtuosité et finesse ce face à face, arrivant à faire ressentir au spectateur tous ces liens qui se tissent inexorablement au fil des mots. Un léger déplacement de la caméra, un angle pertinent, une lumière, et l'on perçoit ce qui se trame à l'intérieur de ces têtes aux cerveaux tourmentés. On oublie qu'on est au cinéma, que ce sont deux formidables comédiens que l'on regarde. On est en empathie avec les deux personnages, pourtant si différents, dont la confiance réciproque va les amener au-delà de ce qu'ils espéraient. 
Ce qui peut passer pour un plaidoyer pro psychanalyse, est avant tout un film chaleureux sur l'entente, l'entraide que parfois les hommes se donnent, créant ainsi un fil solidaire que la vie ne pourra effacer, à l'image des quelques moments de bonheur et d'amour que Devereux partage avec Madeleine, instants fugaces et fragiles qui seront des points d'ancrages lumineux pour toute une vie. 





2 commentaires:

  1. Je l'ai vu hier soir et je suis aussi emballé. Même craintes, même plaisir.
    Je poserai juste un bémol cependant, devereux n'est pas psychanalyste mais anthropologue. Et s'il suit une analyse lui même, il ne revendique pas ce titre. Il ya en fait tout un débat derrière avec l’école psychanalytique de paris dont on nous fait grâce... mais qui apparait en filigrane.

    Un fim à voir donc!

    Au plaisir de vous lire

    Yann

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