jeudi 22 août 2013

La lettre à Helga de Bergsveinn Birgisson


Bjarni, après la mort de son épouse, écrit une lettre à Helga, une voisine avec qui, quelques années plus tôt, il avait réussi à partager quelques rapports sexuels passionnés. D'une de ces étreintes est née une petite fille et la possibilité de vivre cette passion au grand jour. Mais cet agriculteur n'a pas pu, pas su, pas voulu prendre ce chemin à la fois par peur et par devoir. A 90 ans, par le biais d'une longue et magnifique lettre, il retrace sa sombre vie et exprime enfin cet amour qui l'a habité pendant des décennies.
Ce texte, à la fois récit de la vie rustique d'éleveurs d'ovins islandais et histoire d'amour peu vécue, est de ceux qui s'insinuent dans la tête du lecteur pour l'habiter longtemps.
La vie est rude en Islande, comme les hommes qui y la peuplent. Loin des villes, isolés, se battant sans cesse contre les éléments, ils vivent frustrement et sans se poser trop de questions au milieu d'une nature nourricière mais hostile.
Bjarni, le narrateur, passionné par son métier d'éleveur de moutons, acceptant moultes responsabilités au sein d'un canton que l'on devine peu habité, a épousé Unnur pour ....le pire. Une tumeur ovarienne est décelée et l'opération qui en suivra la rendra stérile mais également inapte au moindre rapport sexuel.
Dans cette vie austère, le frustration sexuelle va lui faire poser le regard sur sa voisine, Helga, mal mariée et aux formes alléchantes...
Ce récit mêlant amour du travail et de la nature, sexualité peu épanouie, emporte le lecteur par sa dureté et par la justesse des sentiments. Ses hésitations, ses élans refoulés, son amour identique pour ses bêtes, son tracteur et sa voisine, aussi étrange que cela puisse paraître sont d'une intensité troublante. Même ses étreintes aux relents d'urine ont la saveur de la vraie passion. Et quand le vieil homme aborde avec philosophie le sens de sa vie, on mesure combien ce texte qui avait déjà attrapé le coeur du lecteur,  atteint au final des sommets en évoquant en filigrane la fin d'un monde que l'argent et la cupidité ont détruit.
L'éditeur précise que cette lettre fut un best-seller en Allemagne et dans tous les pays scandinaves (quel bon goût !). Espérons qu'il en soit de même en France car notre ultra moderne solitude urbaine et contemporaine ressemble étrangement à cette méga solitude campagnarde islandaise.

Ce très beau roman est édité chez Zulma et est par ailleurs un des 4 finalistes du prix  du roman Fnac 2013 (libraires et lecteurs)

4 commentaires:

  1. 4ème billet enthousiaste que je lis sur ce livre ! Il est à noté et surtout à lire.
    Merci pour votre écriture qui me régale toujours !

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  2. Je devrais le recevoir bientôt et j'ai hâte de le lire

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  3. Oui! je n'ai pas pu faire de vrai billet sur ce livre, trop émue... ravie de découvrir votre blogue, "sans connivence", cela devient de plus en plus rare...

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