Que dire d'un film qui, dès les premières minutes, m'a attrapé par l'émotion qui n'a plus quitté de la projection, essuyant larmes et étouffant des fous rires durant une heure et demie ? Je pourrai dire que c'est un chef d'oeuvre malgré son montage bout de ficelle, ses scènes faussement improvisées. J'aurai sans doute raison puisque cette semaine, un site américain de cinéma le classe déjà parmi les 25 meilleurs films français de ce siècle !
C'est vrai j'aime Agnès Varda et son cinéma qui m'a toujours transporté de bonheur, qui sait comme personne, nous parler d'êtres simples ou célèbres avec une réelle tendresse sans jamais tomber dans le voyeurisme. Et pourtant, elle regarde Agnès. Elle a pour moi un oeil absolu comme d'autres possèdent l'oreille. Sa rencontre avec JR apparaît donc comme évidence malgré ( ou grâce) à la différence d'âge ( plus d'un demi-siècle) tant leurs regards se ressemblent, tant leurs parcours, leurs envies se complètent. JR, ( rien à voir avec celui de la série amerloque, à part vraisemblablement un clin d'oeil moqueur )....en fait c'est Jean-René... S'il n'a pas choisi son prénom, il s'est débrouillé pour être un des artistes contemporains majeurs avec ses installations photographiques noir et blanc en grand format, qu'il colle sur des façades, des murs du monde entier.
Tous les deux, la vénérable cinéaste à la coiffure bicolore et à la facétie toujours intacte et le jeune plasticien branché, vont sillonner la France à bord d'un camion formidable, à la fois studio photo et imprimante géante. Cela a une tout autre allure que la caravane des Depardon l'an dernier ! ( " Les habitants", le film issu de ce périple se situant au même niveau que son moyen de transport).
Et dans cette France qui bosse ou a bossé, ils s'arrêtent dans des endroits où quelques rencontres précédentes ou souvenirs de personnes croisées, leur ont laissé des traces. Tous deux vont aller aux devants des gens et leur proposer de les photographier puis de coller leur portrait géant en noir et blanc sur des murs, des édifices, toujours dans le but de rendre tout cela beau et artistique.
Evidemment ça fonctionne du tonnerre. Quand la créativité s'invite dans le quotidien de monsieur et madame Toutlemonde, c'est l'art qui se faufile, qui enjolive le quotidien, qui émeut, qui fait plaisir, qui rend la vie plus belle. La caméra capte ces regards émerveillés, transformés un instant par cette irruption formidable de l'art.
L'émotion qui transpire de toute part de ce film démontre cette pensée profonde que je traîne depuis toujours, que l'art et la culture peuvent changer le monde. Bien sûr, vu comment ce monde avance et malgré l'extraordinaire diversité des créateurs, la pensée fait long feu. Mais quand on voit l'énergie de cette vieille dame touchante et drôle, la bienveillance et l'humanité du créateur et ce respect, l'amour qu'ont tous deux pour les hommes et les femmes qu'ils rencontrent, on ne peut qu'être totalement charmé, ébloui, transformé par ce film. Soudain on reprend un peu d'espoir, on regagne de la force pour croire que tout est encore possible, que derrière toutes ces tristes figures un peu perdues que nous croisons tous les jours, il reste encore des plages de possibles que l'art et la création peuvent illuminer.
Je ne raconte rien de plus. C'est à vous d'aller prendre une dose de bonheur au cinéma. L'amour, l'amitié, l'humour, la mort, la solidarité, le féminisme, la vie, la beauté, ... seront au rendez-vous. Courez voir "Visages, villages", c'est le plus beau film du moment, une pause intelligente, gracieuse, tendre et drôle qui vous bouleversera autant qu'elle vous donnera de l'énergie. A ce niveau de réussite, je ne peux dire que "MERCI" à Agnès Varda et JR.
Bonjour Pierre, film magnifique qui m'a "cueillie". J'en redemande. Bonne journée.
RépondreSupprimerAprès cela comment désespérer de l'humanité...
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