jeudi 5 janvier 2012

Take shelter de Jeff Nichols

C'est l'histoire d'un brave américain moyen, idéal. Bon père de famille avec une femme adorable et une enfant sourde, il bosse dur avec son meilleur copain. Mais voilà qu'il est la proie de cauchemars terribles, allant jusqu'à le faire uriner dans son lit. Il pressent que ses rêves sont prémonitoires et qu'une catastrophe horrible va bientôt arriver. Il va transformer un abri anti-tempête abandonné au fond de son jardin en super bunker anti cataclysme. En route, de plus en plus broyé par des rêves de plus en plus violents, il va perdre son travail, son meilleur ami et presque sa femme. Puis, un jour, le vent souffle, le ciel se charge de nuages menaçants, des oiseaux hitchcockiens tombent foudroyés. La terrible tempête arrive, les sirènes mugissent, la famille à juste le temps de regagner l'abri...
Raconté comme ça, on pourrait avoir l'impression que l'on a affaire à l'une de ces multiples productions américaines, bourrées d'effets spéciaux et prêtent à retourner les sangs de spectateurs en manque de sensations fortes.
Hé bien, pas du tout mais alors pas du tout, du tout...
Nous avons ici un réalisateur qui prend son temps et nous n'avons pas l'impression d'assister à un clip hystérique. D'ailleurs l'enjeu est bien une tempête, mais pas celle que l'on croit. Il s'agit en effet de celle qui se déroule dans le crâne du héros. Le suspens, créé par une mise en scène magnifique, tourne autour de la paranoïa de Curtis, brillamment interprété par Michaël Shannon. A-t-il vraiment une prémonition ou devient-il complètement fou? Le spectateur est constamment partagé entre le doute et la confiance. Le scénario minutieux ne laisse rien au hasard. On ressent le moindre bruissement de feuille, on s'inquiète du moindre nuage et on est effrayé par tous les cauchemars qui hantent les nuits du héros.
Même si la caméra prend le temps d'ausculter minutieusement la situation pendant deux heures, Jeff Nichols nous balade sans nous ennuyer une seule seconde, maintenant la tension jusqu'aux dernières images d'une beauté et d'une force incroyable.
Ce film a enthousiasmé la critique française, c'est normal. Quand un réalisateur américain inspiré, tout en gardant les codes de son pays, nous envoie un film au rythme européen, on ne peut que se réjouir et nous engouffrer dans les salles dans le secret espoir d'enrayer la machine à produire des daubes ultra-formatées.

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