vendredi 25 octobre 2013

Le chien qui louche d'Etienne Davodeau


Après "Les ignorants ", oeuvre majeure s'il en est, Etienne Davodeau était attendu au tournant avec son nouveau roman graphique. Le bandeau rouge entourant son nouvel album donne laisse imaginer qu'après l'oenologie l'auteur s'attaque d'une façon un peu similaire au musée du Louvre. Un filon éditorial où comment surfer sur le succès ? Ce n'est pas la mention "Louvre éditions" accolée à "Futuropolis" qui rassure, donnant l'impression d'une commande plutôt que d'une création vraiment originale germée seule dans la tête du créateur.
Même si quelquefois cela peut être moteur, le business éditorial étant ce qu'il est, la notion de produit fait pour le sapin de Noël des bobos se faufile sournoisement. L'honnête et sensible Etienne Davodeau se serait-il laisser par les sirènes commerciales ?
Après lecture de "Le chien qui louche" (un titre pour le moins original), si partenariat il y a, l'auteur ne s'est pas du tout fourvoyé et a su même emprunter des sentiers qu'il avait peu exploré dans ses productions solitaires : la fiction virant à l'absurde.
L'histoire au départ s'intéresse, avec ce regard toujours si juste et si bienveillant, au quotidien d'un couple parisien lambda. Elle, Mathilde bosse en intérim et lui, Fabien,  est surveillant au musée du Louvre. Ils retournent en province pour passer un week-end dans sa famille à elle, façon de régulariser leur couple aux yeux d'une famille de fabricant de meubles un peu beauf. Entre deux plaisanteries lourdaudes, surgit l'évocation d'un aïeul vaguement écrivain et peintre. Et très vite on exhume du grenier l'unique toile restante de l'ancêtre, une croûte représentant un chien qui louche. Comme une boutade mais avec un peu d'espoir quelque part, la famille demande à Fabien s'il ne pourrait pas voir si l'oeuvre ne mériterait pas un accrochage dans le célèbre musée...
Sur ce canevas, Etienne Davodeau réussit sur tous les tableaux (oui, je sais, facile!). Il mène cette  histoire jusqu'à son terme en passant donc par la case absurde, inventant une société secrète des amis du Louvre s'occupant de réaliser les rêves assez fous de ses membres. Mais surtout, on retrouve la touche "Davodeau", celle du naturaliste, de l'ami des petites gens, celle aussi de l'amateur d'art et de culture. Il n'a pas son pareil pour évoquer avec humour le quotidien des gardiens de musée, mêlant avec bonheur anecdotes et détails plastiques. Il y a une bonne touche de sensualité dans son dessin, qui se répercute, comme un écho, dans l'évocation du couple héros dont la vie sexuelle n'est pas occultée et où la femme occupe une place très volontaire. (et rejoint en cela "Lulu, femme nue" dans la thématique féminisme).
Les fans de l'auteur ne devraient donc pas être déçus. C'est toujours aussi bien vu dans les rapports humains et il arrive à nous surprendre un peu, Finalement, "Le chien qui louche" fera encore une fois bel effet au pied du sapin...





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