jeudi 6 février 2014

Un beau dimanche de Nicole Garcia

Vendre le nouveau film de Nicole Garcia pour une attachée de presse est un parcours de santé sans les obstacles tellement les points d'accroche sont évidents. Elle glosera sur les thématiques récurrentes de la réalisatrice, thématiques qui peuvent faire penser que la  metteuse en scène fait oeuvre. Pour ceux et celles qui n'auraient rien lu ou entendu, on peut citer, en vrac : la filiation, l'enfance brisée, la fragilité masculine, mais aussi le Sud et son soleil, et même les week-ends festifs ( après l'ascension et le 15 août, la pentecôte...). Elle se gargarisera également avec le terme qualité française et fera référence à Claude Sautet, c'est chic et ça fera sortir dimanche prochain la bourgeoisie qui sera ainsi sûre de trouver un film bien propre sur lui. Et surtout, elle mettra en avant la révélation Pierre Rochefort, avec des trémolos dans la voix, c'est tellement émouvant une mère qui filme son fils...Tout est réuni pour qu'on file séance tenante acheter son ticket, sinon, on est le dernier des nazes, voire même le fossoyeur du cinéma français.
Le film débute par une scène choc très éloignée du côté estival de l'affiche. Au petit matin, au milieu de chiens énervés, des corps ensommeillés à même le sol sous des couvertures miteuses, sont soudain rudoyés par la police pour une évacuation manu-militari. Nous voilà prévenus, on va voir ce qu'on va voir, Mme Garcia a quitté la "Place Vendôme" et troque les diamants pour la canette de bière de chez Lidl. Une plongée dans la France d'en bas nous attend. Effectivement, après le générique, nous voilà dans une autre zone populaire, une école publique ! Et tout de suite ça se gâte ! Pas de chance pour Mme Nicole, je suis instit ! Et les invraisemblances s'enfilent les unes après les autres. Je laisse de côté la poubelle à usage unique jetée dans le container par le héros, une petite erreur de mise en scène mais j'ai tiqué sur le fonctionnement des remplacements dans les écoles et de l'offre faite par le directeur à son remplaçant. Non Mme Garcia, non Mr Fieschi (l'autre scénariste), on ne créé pas un CM2 à la tête du client même si celui-ci est beau et sympathique. Je pinaille vous allez me dire, il faut être un peu romanesque et se laisser aller.... Ok, je tourne la page sur ce manque de crédibilité et je regarde la suite, dialoguée sans doute par les CM2 punis lors d'une récréation (c'est pour expliquer le manque d'inspiration et de naturel du rendu final) car quelques scènes plus tard, notre héros se retrouve à garder durant le week-end un gamin de sa classe. On ne le sait pas assez, mais les pauvres sont de sales gens qui ne peuvent même pas s'occuper de leur mômes, ils ont soit à travailler comme des bêtes (normal, pour gagner plus) soit à tremper dans un commerce louche de bagnoles (pour briller plus parce qu'ici il s'agit de belles cylindrées). Bref, notre jeune instit fait la nounou. Pas grave, il a 30 ans, un physique de rêve et n'a justement rien à faire durant son congé de fin de semaine.
C'est bien beau un gamin à la maison, mais comme il a une mère pas loin, serveuse dans un resto de bord de mer, autant aller lui ramener son rejeton ! La mère, c'est Louise Bourgoin. Elle a plein de soucis la pauvre. Elle trime dur mais est harcelée  par deux méchants garçons à qui elle doit du fric, 50 000 euros pour le bail d'un petit commerce à Saint Barth !!!??!!! ( une serviette de plage sans doute où elle vendait quelques colifichets....) Bref, c'est la panade totale. Elle a la mine sombre, très sombre. Louise Bourgoin fait très bien la gueule et l'oeil noir.  L'instit s'incruste et  sans trop savoir pourquoi ni comment, finit par aller passer la soirée avec elle dans un bar, s'alcooliser et devenir violent. Là, Louise Bourgoin, fronce toujours le sourcil mais est intriguée... Il est bizarre ce mec non ? Nous on le devinait depuis un moment, Mme Nicole essayait de nous le faire deviner entre deux scènes soit disant naturelles ( Louise est pauvre, elle met donc au frais les bières par pack de 20. Louise est pauvre, elle a des goûts vestimentaires de chiotte et essaie de vendre d'immondes gilets en acrylique, ...). Mais soudain, entre deux sanglots de Louise qui pense tout quitter pour Barcelone pour cause de non-solvabilité, l'instit a une idée, il sait où trouver l'argent. Il va aller le demander à sa famille qui est richissime. Et hop, après le sous-prolétariat, bienvenue chez les immensément riches ! Je ne raconte pas la suite mais je vous rassure, Mme Garcia a le sens de l'équité. Si le milieu ouvrier était une succession de clichés, celui des nantis aussi ! Ah les gazons, les buis, les tennis, les cuisines comme au début du 20éme siècle, les polos Lacoste, .... Un vrai collier (de perles, bien sûr).
L'histoire est tarte à souhait, mal fichue, pas crédible pour deux sous. Bien sûr, il fait beau, il y a du soleil, la photographie est belle et quelques comédiens font quelques apparitions agréables (Dominique Sanda en reine mère douce et dure à la fois, est royale) ou mystérieuses (Déborah François erre l'âme en peine sur le gazon, essayant de donner un vague intérêt à un rôle inexistant). On peut se laisser aller à contempler tout cela, surtout que Pierre Rochefort, à défaut de pouvoir donner de la profondeur à un personnage mal défini par trop de sentiments opposés, est beau garçon et Louise Bourgoin est ravissante malgré une couleur de cheveu ratée (normal les pauvres se font leur couleur eux mêmes... bien que le coloriste spécial de Louise soit mentionné au générique, mais c'est tout un art pour un génie de la coloration d'en proposer une très moche). Mais rien ne fonctionne vraiment par manque de crédibilité. Cela se veut créatif, pensé et fouillé. C'est seulement prétentieux, chichiteux et hors d'âge.




8 commentaires:

  1. ohhhh ce n'est pas possible: j'ai adoré!!!

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    1. Aïe aïe, des divergences de goûts ces temps-ci....ou d'humeur peut être... je peaufine ma frappe pour essayer de raconter ma colère pour ce film...

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  2. Ah ? Dois-je conclure que tu n'as pas aimé ? ;)))
    a+
    yann

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    1. Tu conclues bien, ....et je me demande si j'ai aimé, une fois, une production de Nicole Garcia. (Le fils préféré peut être). Mais je suis maso (ou moqueur) j'y retourne quand même...

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  3. Alors moi je suis encore plus radical, un film ou il y a en premier rôle un fils d'acteur connu filmé par sa propre mère je dis stop direct tant j'ai soupé du népotisme des arts français. Oui je sais c'est dégueulasse et étroit d'esprit de faire ça mais autant finalement que de filmer, mettre en scène, publier toujours les mêmes fils et filles de (qui vous jurerons ensuite main sur le cœur que pour eux "tout a été très dur"...).
    Bref.
    Ceci dit sur Nicole Garcia je connais mal son œuvre mais "place Vendome" a filmé de façon trés sensible la sensualité d'une catherine deneuve (déjà) un peu mure et rien que pour ça il reste pour moi un grand film (dont j'ai totalement oublié l’histoire j'avoue ; )) )
    yann

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  4. J'avoue avoir été moins radical que toi sur l'auto promotion familiale, mais j'y ai pensé très fort !
    Que tu ne te rappelles plus de l'histoire d e"Place Vendôme", c'est normal, elle était ratée aussi et masquée par une caméra chichiteuse qui était au service de Deneuve et des acteurs...

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  5. Oui mais pour moi filmer Deneuve (où n'importe quel acteur d'ailleurs du moment que c'est bien fait) ça peut être un projet largement suffisant pour un film ;))

    yann

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  6. J'ai aimé,et les invraisemblances sur l' Éducation nationale, dont je suis, je m'en fous, il y en a dans tous les films et sur tous les métiers. Le fils psy en rupture de ban, ça me parle, comme on dit. Allez lire un truc ou deux sur l'interprète, ça peut éclairer. Ce n'est pas un chef d'œuvre, sans doute, pas un drame non plus, mais d'une grande tristesse. Après, chacun ses goûts.

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