mercredi 2 novembre 2016

Mademoiselle de Park Chan-wook



A l'image de ses trois personnages principaux, "Mademoiselle" se présente à nous avec toute la malignité nécessaire pour qu'il soit apprécié par le public le plus nombreux. L'intrigue roublarde mais pas forcément finaude, joue autour d'une machination débitée en trois parties qui donnent chacune un éclairage nouveau et donc des révélations en veux-tu en voilà. Si la première expose les faits, les deux suivantes vont s'ingénier à nous montrer une autre vérité, d'autres facettes de ce complot au mariage concocté par une jeune coréenne et un malfrat de bas étage au détriment d'une riche héritière japonaise. Ce petit jeu autour du faux-semblant a déjà fait l'objet de moultes productions mais ici, il est accompagné d'une multitude d'autres effets qui rendent le film de Park Chan-wook un peu plus singulier que la moyenne. Tout à la fois mélo, film érotique voire film un peu gore, "Mademoiselle" bénéficie en plus d'une mise en image absolument somptueuse. Chaque plan, composé pour nous en mettre plein la vue, accroche l'oeil ( quelque fois à la façon de ces images proposées en fond d'écran sur les ordis sous Windows ). La caméra vole en arabesque dans des décors sublimes et tarabiscotés, suit avec grâce ses magnifiques héroïnes, caresse leurs corps. Comme  nous ne sommes pas chez Hou Hsiao-hsien, on ne s'ennuie pas une seconde et l'on comprend toute l'histoire. La toile de fond en Corée dans les années 30 au moment de l'occupation japonaise reste anecdotique sauf peut être pour permettre de donner une symbolique de rapprochement entre les deux peuples avec les longues scènes saphiques des deux créatures de rêve qui tombent souvent le kimono. L'érotisme, le sexe sont très présents dans cette histoire. Du frôlement d'étoffe ou d'un doigt sur un bout de peau jusqu'au sadomasochisme, toute une gamme assez importante de plaisirs sensuels et érotiques nous est proposée. Les récits du marquis de Sade hantent les deux dernières parties ainsi que les estampes japonaises mettant en scène des corps offerts et contorsionnés. Prévenons les âmes sensibles, les hommes sont mis à rude épreuves et une scène de torture risque de mettre les plus sensibles assez mal à l'aise.
Vous l'aurez compris "Mademoiselle" joue sur beaucoup de tableaux à la fois et aurait pu sombrer dans un grand n'importe quoi. Mais la longueur de l'ensemble ( 2h25) permet au réalisateur de prendre le temps de lier sa sauce, certes avec beaucoup d'esbroufe mais avec une maestria épatante. La prise de vue superbe, la beauté des interprètes, la magnificence des décors, l'ondulante, tournoyante ou travelingnesque caméra enrobent ce récit somme toute classique, d'une façon efficace. De boules de geishas en poulpe géant ondoyant dans un aquarium, le film se révèle au final un plaidoyer féministe pour un amour libéré de toute contrainte aussi bien sociale qu'intellectuelle. Militant et original, "Mademoiselle" est la curiosité emballante de la semaine.


1 commentaire:

  1. Ce film a été un énorme coup de coeur, orginal, avec des images sublimes, une petite pépite au milieu du marasme cinématographique ambiant...

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