lundi 3 avril 2017

Splendeur de Margaret Mazzantini


Il s'agit d'une sorte de saga romanesque sur une trame énormément éprouvée, labourée. Deux enfants romains vivant dans un même immeuble, vont se croiser, aller à l'école ensemble, s'ignorer car de milieux radicalement opposés. L'un est le fils d'un dermatologue, l'autre du concierge. Mais lors d'un voyage scolaire en Grèce, ils se rapprocheront et s'aimeront, éperdument. Puis la vie les séparera. Tandis que l'un partira à Londres, l'autre restera en Italie. Ils ne vont jamais oublier cet amour fort, intense.  La vie suivra son cours, ils se marieront chacun de leur côté. Mais lorsque  le père de l'un épousera la soeur de l'autre, à l'occasion de ce mariage, ils se retrouveront, s'aimeront à nouveau brièvement et caresseront  le secret espoir de pouvoir vivre leur amour pleinement... Y parviendront-ils ?
Raconté comme cela, le roman frise la banalité et le déjà lu maintes fois. Là, où Margaret Mazzantini innove un peu, c'est que les deux protagonistes sont des hommes. Du coup, le romanesque à la "Nous deux" se trouve un poil décalé. On suit cette histoire avec un autre intérêt...
Très vite, on s'aperçoit que le texte est constamment recouvert d'un voile tragique. L'auteure suit Guido, le fils de médecin, devenu professeur d'art dans une université anglaise, semble en empathie avec lui tout en décrivant longuement le mal être qui l'habite, la  honte qu'il ressent, le tourment intérieur qui le brise et cet amour pour Costantino qui ne peut être vécu librement. L'homosexualité masculine, même vécue dans une Grande-Bretagne ouverte, reste pour Guido un lourd chemin de croix. Le lecteur compatit donc avec le personnage et le suit avec intérêt dans cette fresque personnelle qui s'étale sur presque cinquante ans. On imagine un peu, voire même espère, une fin heureuse pour ces deux hommes dont le roman semble prendre le chemin...
Et puis, alors que Guido, après quelques péripéties arrive à s'assumer enfin, le roman prend une drôle de tournure. J'avais bien senti, ici ou là dans la première partie, quelques petites annotations clichetonnes, mais dans le dernier tiers, c'est une déferlante. La description de de l'affirmation de la vraie personnalité de Guido, vire à l'enfilage de clichés. Il se met à tortiller du cul, porte de jolis foulards, s'habille avec des pantalons en cuir moulant, fait attention à la décoration de son intérieur, soigne sa peau avec des produits de beauté, j'en passe et des pires... Et quand enfin, les deux amoureux vont se retrouver, c'est pour mieux asséner une moralité assez douteuse.
Sans raconter la fin, disons que l'on sent bien que l'homophobie n'est pas prête de s'éteindre. Margaret Mazzantini avec son air de ne pas y toucher, juge l'homosexualité comme une maladie et ne propose que deux solutions pour y échapper : entrer béatement en religion ou le suicide. Nous avons échappé de peu au bûcher ou à la lobotomie ! ( Signe que ça progresse un peu... mais là, je ris jaune!)
Je ne voudrai pas être un(e) jeune italien(ne) isolé(e) dans une campagne que l'on sait encore assez peu ouverte, lisant "Splendeur". Nul doute qu'il n'y trouvera aucun réconfort mais peut être même pire...et là, la colère me gagne...
Un personnage dit dans la première partie du roman, alors que les deux hommes se sont retrouvés après quelques années : " Je n'étais plus très sûr de vouloir supporter son corps baptisé, dégoulinant de culpabilité, et qui semblait désormais laid." . Je l reprends volontiers cette citation à mon compte mais en la transformant un peu. Pour moi, cela devient : Je ne suis plus très sûr de vouloir supporter ce roman baptisé, dégoulinant de culpabilité et qui me semblait désormais laid ! 

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