lundi 26 mars 2018

Claudine à l'école d'après Colette de Lucie Durbiano


Je l'avoue, malgré mon âge certain, je n'ai guère de souvenirs de mes lectures de Colette. Je me rappelle seulement du " Blé en herbe", lu à l'adolescence parce qu'il sentait le soufre, mais qui m'avait bien déçu, n'y ayant sans doute pas trouvé le piquant escompté. De la série des Claudine, je ne me souviens que des innombrables dictées qui ont parsemé ma scolarité, le style un poil académique et descriptif, idéal sans doute pour réfléchir sur les accords grammaticaux mais peu propice à enflammer le désir de se jeter sur les ouvrages dont elles étaient extraites. On peut donc dire que grâce Lucie Durbiano, j'ai découvert un classique ... sans doute un des buts de ces nombreuses adaptations de notre patrimoine littéraire en BD.
D'entrée de jeu, j'ai trouvé dans les dialogues ce que j'imaginais...un ton suranné. Mais très vite, jolie surprise, l'intrigue impressionne. C'était chaud dans les écoles de filles en 1900 ! Nous sommes très loin du petit précis de la parfaite institutrice qui était signé à l'époque par les sortantes de l'Ecole Normale où leur vie se résumait à un état de nonne laïque. En une année scolaire, dans une classe préparant au brevet, l'espiègle et un tantinet rebelle Claudine va connaître les affres de l'amour ( platonique), la jalousie, la rivalité (uniquement en version lesbienne )mais aussi croiser un vieux dégoûtant un poil harceleur ( pas de #balancetonporc  à l'époque ) mais aussi sa version plus romantique voire nunuche de jeune homme coincé. Autour d'elle, des maîtresses vivent leur amour quasiment au grand jour tandis que les élèves ( filles) fantasment sur tout ce qui passe, jupons comme caleçons.
Au départ, le roman de Colette, écrit avec la complicité de Willy son mari qui savait déjà que les petits scandales font les bonnes ventes, se positionnait comme déluré. L'adaptation de Lucie Durbiano,auteure ayant pas mal donné dans les récits flirtant avec le libertinage, ne dénature nullement l'œuvre originale. La bande dessinée possède le grand avantage de se passer des descriptions de l'époque  devenues un peu trop classiques et de se concentrer sur l'action. Le trait fin et virevoltant de l'auteure épouse à merveille les courbes et les tourbillons des longues robes de ces dames. Tout en restituant l'atmosphère surannée de l'école républicaine au début du siècle dernier, jouant joliment avec le noirs de certaines tenues et des blouses d'écolières, l'album se révèle un régal de lecture malicieuse bien dans l'esprit du roman. L'œuvre de Colette réapparaît dans toute sa modernité et dans son espièglerie.
" Claudine à l'école"  en bande dessinée se déguste comme une friandise acidulée et reste un pied de nez à la bien pensance comme il fut à son époque. Sa ressortie en 2018, en plus d'être une excellente idée, donne vraiment envie de (re)découvrir l'œuvre entière de Colette... Pour y avoir remis un peu le nez dedans, je me suis aperçu qu'il manquait dans toute cette littérature contemporaine de ces trentenaires soi-disant rigolotes un élément essentiel qui possédait la vénérable aînée : l'audace !... Audace que l'on retrouve dans cette adaptation vraiment réussie.


3 commentaires:

  1. Espérons qu'elle continue sur sa lancée avec cette même audace pour "Claudine en ménage"(quel titre!), "la retraite sentimentale"...

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  2. Étonnant,vintage,drôle et savoureux comme un paquet de rigolettes :-)

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  3. J'ai mis la main dans le sachet de Durbanio hier soir et je n'ai pas su m'arrêter...

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