A voir comme les critiques se divisent ou étrillent le film, on peut dire que Ruben Ostlund a réussi son coup en rejouant dans la réalité la scène de happening durant une soirée chic entre aficionados de l'art contemporain dans "The Square". Il pousse le bouchon tellement loin que le petit monde bien apprêté du cinéma en prend un coup et se trouve bousculé devant tant de nihilisme, de noirceur.
En tant que spectateur lambda, on peut éprouver le même sentiment d'inconfort que devant "Snow Thérapy", mais j'avoue avoir pris plus de plaisir devant ce "Sans filtre" que devant les précédents ( même si je me trouve à la relecture bien dur en regard du souvenir qu'ils m'ont laissé). L'inconfort vient bien évidemment de la vision de l'humanité du réalisateur : du petit esclave d'en bas de la pyramide sociale aux ultras riches : tous pourris... On peut tout à faire être en accord avec cette analyse et le film le démontre parfaitement. En trois parties, Ruben Ostlund taille un short au milieu de la mode et des influenceurs, puis aux ultras riches générés par le système capitaliste et enfin aux pauvres et au communisme. Trois parties, qui comme à l'habitude peuvent déranger un peu, faire sourire, rire, grincer des dents ou ennuyer car le réalisateur gagnerait à faire plus court, rallongeant un peu inutilement certaines scènes. Trois parties dont une deuxième ultra copieuse, véritable climax du film , se trouve malencontreusement coincée entre deux autres moins pêchues, ce qui laisse à penser que le final dans l'île déserte est de trop ... surtout qu'il n'est pas franchement original et qu'il tombe dans le travers du réalisateur à trop aimer quand même les scènes bavardes.
Dans cette pochette surprise sur la noirceur du monde, on y trouve de tout, du moins bon au franchement réussi et, pas palme d'or pour rien, un vrai sens de la mise en scène, du plan aussi qui donne la sensation d'être devant un vrai cinéaste avec ses obsessions, ses mauvais goûts assumés, sa thématique nihiliste, ici politique ( qui peut déplaire à beaucoup quelque soit l'endroit du prisme où l'on pense se trouver). Un auteur donc, un vrai aux ( mauvais?) goûts assumés qui propose chaque fois une expérience cinématographique qui laisse des traces, qui surprend, fait discuter. Rien que pour cela il faut voir "Sans Filtre", ( mais pourquoi ce titre alors que la traduction "Triangle de la tristesse" correspondait parfaitement !) parce que les occasions d'être surpris, dérangés sont rares.
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