samedi 9 décembre 2017

Bienvenue à Suburbicon de George Clooney



On dit que pour faire un bon plat, avoir de bons ingrédients est primordial, le savoir-faire ensuite fera passer le plat de bon à excellent selon si l'on lorgne une place dans un de ces concours culinaires télévisuels ou pas. ( Sans compter que vos convives n'ont pas non plus les papilles d'un critique gastronomique.) Au cinéma, pareille affirmation est nettement moins évidente. Déjà, les spectateurs, sans être critiques, sont pas mal nourris de chefs d'œuvres alors qu'un convive n'a que très rarement déjeuner dans un 4 étoiles et sont donc plus à même de repérer les films moyens ou ratés.
Prenons donc ce "Bienvenue à Suburbicon". La recette est alléchante, un scénario des frères Cohen, Julianne Moore, Matt Damon et Oscar Isaac au générique et ( pour moi) une critique annoncée de cette " american way of life "  dans la fin des années 50 où les robes des dames tourbillonnaient en descendant de bagnoles surdimensionnées et carrossées tout en chromes et rajouts ostentatoires. Ah , j'oubliais, George Clooney à la réalisation...même si jusqu'à présent ses précédentes productions ne m'avaient pas fait grimper au plafond, disons que l'on peut avoir envie de connaître son regard sur cette Amérique qu'il, selon les rumeurs, rêve de diriger.
Des ingrédients de qualité et, à l'arrivée, une chose étrange ni vraiment drôle, ni vraiment trash, ni vraiment critique, ni vraiment bien mise en scène, ni vraiment passionnante. Un film bancal, pas désagréable mais avec des lourdeurs, quelques bons moments et surtout deux histoires parallèles qui ne se rejoignent quasiment jamais et dont on se demande pourquoi l'une existe...
Alors, on va regarder de plus près les ingrédients... D'abord, intéressons-nous au scénario.  La date de péremption était vraiment dépassée. Cette histoire de père de famille apparemment sans histoire mais qui va essayer de gruger des assurances, traînait dans les tiroirs des deux frères Coen depuis au moins 20 ans. S'ils ne l'avaient pas tourné, c'était bien pour une bonne raison: mal fichu, pas achevé. La remise en chantier avec cet ajout d'une autre histoire, réel fait divers d'une famille noire s'installant dans un lotissement uniquement habité par des blancs qui deviendra la proie hystérique d'une communauté ouvertement raciste ( sans doute pour commencer à donner une bonne image au supposé futur candidat démocrate Clooney à la présidence) sent le réchauffé et surtout ne se mélange pas bien du tout. Aussi cruelle soit-elle, la longue patience de cette famille noire face à des crétins bavant la haine raciale se trouve complètement sacrifiée, mise au deuxième plan. Mais en face , l'histoire du voisin qui tue sa femme paralysée pour empocher l'argent de l'assurance et coucher avec la sœur de la défunte, aussi grinçante soit-elle, ne se porte pas mieux et s'enlise à cause d'une constante hésitation dans le genre à donner : Parodique ? Gore ? Un peu Coen ? Un peu Burton ? (" Edward aux mains d'argent" ) ...Oh et si on essayait aussi un peu Laughton ( " La nuit du chasseur"), c'est chic Laughton, ça va faire bien ! Non, désolé George, ça n'est pas terrible, et pour tout te dire, on est content que tu dises arrêter le cinéma pour te concentrer à sauver l'Amérique parce que niveau mise en scène, là tu patines un peu. Côté acteurs, rien à dire, Matt Damon est un parfait père abject, Julianne Moore est très bien mais on peut la préférer en modèle féminin de l'Amérique des années 50 chez Todd Haynes ( "Loin du paradis") et Oscar Isaac apporte un peu de pep's dans quelques scènes hélas trop brèves.
Sans être consternant, ( quelques scènes peuvent accrocher ici ou là, le générique, les décors aussi) "Bienvenue à Suburbicon" restera à tout jamais un film bancal et mal construit, la faute à un scénario mal écrit.


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