mercredi 6 décembre 2017

Seule la terre de Francis Lee


Johnny rame. Perdu dans une ferme d'un Yorkshire peu accueillant ( si ce n'est pour les amateurs de splendides paysages dans lesquels les murets de pierres font office de décor), il trime renfrogné à s'occuper de quelques bêtes dont le rapport ne correspond plus à celui attendu par une agriculture intensive. Coincé entre un père qui vient de faire un AVC et dont la femme l'a quitté voilà bien longtemps et une grand-mère dont le regard bleu acier ne risque pas de vous réchauffer l'âme, son seul loisir est d'aller se pintocher au bar du bled d'à côté et, éventuellement, se faire très rapidement un mec dans le premier endroit isolé trouvé. Bienvenue au royaume des taiseux et des frustrés ! C'est dans ce cadre là que va arriver Gheorghe, un saisonnier roumain, embauché pour la semaine afin d'aider Johnny à l'agnelage d'un troupeau perdu dans les collines...
On le sait au cinéma, l'arrivée d'un inconnu détruit tous les équilibres précédemment acquis. Gheorghe va jouer un peu ce rôle mais surtout être celui qui va inoculer de la tendresse dans cette ferme. Comme nous sommes dans une sorte de rude romance gay, les deux hommes vont s'affronter pour petit à petit tomber amoureux. L'essentiel du film sera de s'ingénier à décrire comment dans un univers des plus brut et froid, le saisonnier roumain va apprendre les gestes tendres à son compagnon. Au milieu du purin, des animaux qu'on abat, qu'on dépèce, de la boue et du froid, Johnny va apprendre à aimer, à lâcher sa sensibilité enfouie, ...
C'est âpre mais bien rendu et émouvant. Francis Lee pour son premier long-métrage fait preuve d'une belle sensibilité et évite la mièvrerie grâce à une photographie magnifique mais qui ne fait jamais dans la joliesse. Evidemment, tout cela est un peu cousu de fil blanc, mais les acteurs sont particulièrement convaincants et la description de l'univers agricole fait preuve d'une grande véracité, donnant de la profondeur à ce récit.
"Seule la terre"  échappe aux pièges inhérents à ce genre de production trop facilement étiquetable "gay" grâce à un naturalisme revendiqué qui permet d'élargir son thème de la découverte de l'amour à tous les publics. C'est sans aucun doute pour cela qu'il a été auréolé de multiples prix dans différents festivals dont le grand prix au dernier festival du film britannique de Dinard.


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