samedi 16 décembre 2017

La forteresse impossible de Jason Rekulak



Un premier roman d'un auteur américain qui ne sent pas les ateliers d'écriture si nombreux aux Etats-Unis, qui ne pose aucune ligne dans une université, ni dans une banlieue déprimante de conformisme ou dégoulinante de violence rentrée, ni dans une grande ville ( donc ni à New-York, ni à Los Angeles, ni à San Francisco) mérite que l'on s'y intéresse un peu.
Remarquez la couverture et vous allez penser que si j'ai pris ce livre en main ce n'est sans doute pas pour une raison littéraire et vous aurez raison. Félicitations au service marketing de chez Actes-Sud pour avoir trouvé un moyen d'attirer la main d'éventuels lecteurs qui traînent dans une librairie, et qui jetteront à coup sûr un œil sur la quatrième de couverture plus facilement que de coutume. Reconnaissons aussi que cette illustration disons ... suggestive, n'est absolument pas trompeuse quant au contenu de l'ouvrage. Il y a bien des seins, de l'informatique et de la sexualité ( disons, pour être plus exact, un début d'éveil aux joies du sexe ).
"La forteresse impossible" du titre possède trois sens possibles. Le premier représente l'unique drugstore d'une petite ville du New-Jersey que trois ados de quatorze ans, désirant acquérir un exemplaire de Play Boy, vont essayer de prendre d'assaut ou tout du moins essayer de duper  le propriétaire qui, légaliste dans l'âme, ne vendra jamais une revue coquine à un moins de 17 ans.
"La forteresse impossible", plus simplement, est le titre d'un jeu vidéo que va créer un des trois garçons, Billy, le héros du livre, en compagnie la fille du drugstore, rencontrée inopinément lors de l'une des nombreuses tentatives avortées d'achat de la revue de charme.
Mais cette forteresse sera aussi, dans le dernier tiers du roman, cette montagne très symbolique que les trois garçons escaladeront pour que Billy puisse clamer un amour qu'il n'osait avouer. ( Je reste volontiers elliptique pour ne pas trop en dire).
Pour le lecteur, ce roman n'est jamais une forteresse impossible, voire inaccessible, juste une bouffée de drôlerie, une gâterie autour de l'adolescence. La récurrence des tentatives pour se procurer Play Boy, petit hommage discret à Bip-Bip et Vil Coyotte, nous amuse sans jamais tomber dans la facilité. Ce qui pouvait au départ passer pour une gentille pochade, avance tranquillement, mais très sûrement, vers un roman beaucoup plus profond, où une peinture discrète des sans grades d'une région paumée se mêle à un récit initiatique qui ausculte les troubles de l'adolescence. Jason Rekulak possède une plume alerte, facile, qui sait manier l'humour, le suspens, créer des tensions, rendre ses personnages attachants et profonds  et même, exploit pour moi, rendre passionnante la création d'un jeu vidéo !
Certes, ce n'est pas le roman de l'année, mais sans doute des rares titres que l'on ne lâche pas sitôt que l'on y plonge dedans. En France, on parle de roman qui fait du bien, en gros une chose avec sa cohorte de clichés et de bons sentiments, sauf que dans "La forteresse impossible", s'il y en a, la plume trépidante de l'auteur sait les balayer.Pour moi, ce fut une vraie récréation, un vrai plaisir de lecture simple et passionnant, et cela fait du bien!

Jouez à "La forteresse impossible", le jeu créé par Billy,  sur le site de l'auteur ... Attention, l'histoire se déroule en 1987, donc ne vous attendez pas à "Call of duty" !

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