mardi 2 février 2016

La marcheuse de Naël Marandin


Lin marche fièrement dans la vie. C'est une battante. Elle avance dans sa difficile vie de sans papier avec détermination. Logée gratuitement  chez un riche vieux monsieur grabataire, chez qui elle fait fonction d'aide à domicile, elle arpente cependant les trottoirs pour monnayer son corps. Une partie de cet argent durement récolté sera envoyé à ses parents restés en Chine, le reste servant à vivre et surtout à  l'éducation de sa fille de 14 ans.
Raconté comme cela, il n'est pas certain que ce joli premier film fasse envie. Pourtant, il s'agit d'un formidable portrait de femme, suivie par un vrai regard empathique et surtout sans jugement, d'un cinéaste parfaitement en prise avec son époque. Situé dans un Paris ni magnifié ni assombri, juste on ne peut plus réel, le film n'a aucun mal à happer le spectateur car il utilise habilement en toile de fond cette triste réalité d'une étrangère qui survit comme elle peut, pour dérouler une intrigue prenante façon thriller. Apparaît ainsi, dans un huis clos assez oppressant, un homme en fuite assez inquiétant qui, se réfugiant dans l'appartement du vieil homme, essaie de manipuler mère et fille.
C'est dans le déroulement de son histoire que Naël Marandin se révèle aussi habile que vraiment fin observateur de l'humain. Alors que l'on pensait s'engager dans un déroulé binaire, les bons contre les méchants, les personnages évoluent, se défendent comme ils peuvent et deviennent plus complexes, dévoilant certaines facettes qui rendent le récit d'autant plus réaliste. Sans jamais se départir de son regard objectif, l'histoire prend de la profondeur, oscillant constamment entre réalisme et fiction, nouant les protagoniste dans une histoire plus complexe qu'il n'y paraît et prenant des directions inattendues.
On appréciera la première apparition de Qui Lan, inconnue du public mais à la quarantaine aussi belle que convaincante. Elle porte le film avec détermination et ambiguïté. Sa virginité cinématographique alliée à une évidente présence apportent une crédibilité au film qui n'en manque nullement, notamment dans la description de la prostitution asiatique à Paris et de la solidarité de ces marcheuses.
Très belle entrée de Naël Marandin dans le cercle des réalisateurs que l'on prendra plaisir à suivre dans les années à venir. "La marcheuse " intéresse car, au-delà d'une histoire bien construite, on trouve un regard de cinéaste porteur de belles promesses.







2 commentaires:

  1. Comme bien écrit dans l'article, son prénom est Naël (et même Nathanaël).
    Le titre mentionne Noël!
    Je profite de la remarque pour vous remercier, en tant que lectrice régulière de votre blog, de votre excellent travail de critique et de rédacteur.

    muriel logist

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    1. Merci de m'avoir signaler cette coquille ! Et merci de vos compliments... :)

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