Cette évocation biographique plus que roman, à moins que ce roman essaie d'être biographique, jouant sans doute dans la recréation de ce que purent être ces vingt années de liaison, nous parle au final plus de Françoise Sagan que de Peggy Roche.
Ces deux dames, se sont d'abord croisées dans cet espace/temps branché que furent le Paris d'après "Et dieu créa la femme" et l'inévitable village de St Tropez où les pêcheurs ont dû déguerpir fissa pour laisser la place à une cohorte parisienne aussi délurée que fortunée. Mais au fil du temps, la célébrité hors du commun de l'écrivaine, aussi bien attirée par les hommes que les femmes, et la chiquissime dame de la mode qui prodiguait son bon goût dans les revues féminines à grand tirage, ont fini par se rencontrer pour un parcours aux amours souvent embrumées par la drogue, l'alcool et les jeux de toute nature de l'une et l'amour extrêmement poli et patient de l'autre.
Le livre essaie de nous faire partager un peu de cette vie fantasque. Le problème avec la star de la littérature que fut Sagan, c'est qu'elle occupe toujours l'espace, rayonne de mille feux derrière sa mèche blonde. Même si Peggy Roche l'a relooké ( ses chemisiers imprimés léopard, c'est elle !), a supporté ses addictions diverses, ne l'a jamais laissé tomber, même ruinée, même soupçonnée de tremper dans quelques trafics, elle ne parvient jamais à s'extraire totalement de l'ombre de l'écrivaine. Mari-Eve Lacasse ayant interrogé un maximum de témoins de l'époque, des très proches, essaie de la faire sortir de ce brouillard dans lequel l'histoire l'a laissée et s'est sans doute faufilée dans les interstices que cette histoire lui offrait comme possibilités romanesques. Force est de reconnaître que le montage proposé a de l'allure se jouant des époques pour tenter de cerner au mieux les personnages, imaginant quelques dialogues savoureux entre les deux amantes. Mais encore et toujours, Sagan vampirise le livre. C'est sa voix et son débit rapide et feutré que l'on entend, c'est la vie mouvementée de la romancière que l'on remarque surtout. Bien sûr, on tourne les pages avec un grand plaisir car l'écriture est vraiment belle. Cependant, Peggy n'arrive toujours pas à se hisser au rang de personnage principal, encore une fois occultée par sa célèbre maîtresse.
"Peggy dans les phares" tente avec talent de remettre un peu de lumière sur cette belle femme élégante que fut Peggy Roche. Le projet dut être ardu et le coup de projecteur donné, même s'il rend justice à cette sommité de l'élégance, n'arrive pas à l'éclairer pleinement. Il y a toujours ce petit lutin facétieux qui passe à tout bout de champ dans le halo. Ce n'est pas grand au final car le plaisir de lecture est bien là !
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