De Daniel Toscan Du Plantier, j'avais l'image d'un homme de pouvoir, hâbleur, grande figure du cinéma français côté coulisse, producteur vaguement mégalo durant ses années Gaumont, amateur de musique classique et aux nombreux mariages comme souvent lorsque l'on est un homme public brassant de l'argent. Curieux du monde du cinéma, c'est avec une certaine curiosité que je me suis plongé dans cette biographie .... que j'ai dévoré.
Mon image n'était pas fausse mais bien incomplète. Daniel Toscan Du Plantier fut bien un beau parleur plein de verve et d'humour, agaçant pour certains, totalement indispensable dans les dîners parisiens pour d'autres tellement il animait avec brio les conversations. Il a bien dilapidé l'argent de la Gaumont en faisant tourner les grands maîtres du cinéma qu'il admirait ( Losey, Comencini, Fellini, ...) et à qui il ne refusait rien, même leurs pires caprices. Il a bien été un grand séducteur, grand amoureux des femmes dont quatre furent épousées. Il a été dans la dernière partie de sa vie le grand promoteur de tout le cinéma français, pouvant défendre en Ouzbékistan le pire nanar hexagonal.
La biographie de Jean-Marc Le Scouarnec nous raconte tout cela par le détail mais dépeint aussi un Toscan plus intime. Du jeune provincial arrivant de Chambéry, un poil arriviste et sachant utiliser au mieux son voisinage assez chic du XVIème arrondissement ainsi que ses camarades fortunés de Sciences Po au producteur au bord de la faillite, épuisé physiquement et se ressourçant vraiment simplement dans un hameau aux confins du Gers, le livre cherche à portraiturer au mieux ce personnage haut en couleurs. Grâce à de nombreux témoignages de ses amis, de ses maîtresses ou femmes, de ses collaborateurs voire de quelques détracteurs, le portrait se complète en relevant les failles et les ombres que toute personne volubile et à l'aspect brillant camoufle forcément. Le regard du biographe n'est jamais celui d'un hagiographe même si l'on perçoit un certain respect pour ce Don Juan d'un autre temps, voire une pointe d'admiration. Les pages se tournent rapidement, le style léger et rapide de l'auteur s'adapte parfaitement à la frénésie du personnage. Et lorsque arrive la dernière partie de sa vie où la mort rôde de façon inquiétante ( assassinat de sa troisième épouse, mort des parents, de son grand ami Maurice Pialat, ...), j'ai même été pris d'une certaine émotion. Le beau parleur, sûr de son goût et de son intelligence, se fait soudain plus pathétique sous la plume décidément inspiré de l'auteur, et termine sa vie de façon théâtrale au milieu de tout un aréopage de stars. Une mort semblable à une scène finale d'opéra, art qu'il adorait autant que le cinéma.
Bien sûr, je pense que l'on prendra beaucoup plus de plaisir à lire cette biographie, si l'on est fan de cinéma, et si l'on a connu toutes les productions parfois hasardeuses de ce producteur esthète. Cependant, si l'on n'a qu'une connaissance très lacunaire de la personne, si l'on voit juste une crinière blanche, une bouche presque lippue à force de saillies drolatiques et un nœud pap, on trouvera sans nul doute un certain intérêt à découvrir ce parcours étonnant d'un homme qui a marqué de sa flamboyance le cinéma français de la fin du 20 ème siècle.
Merci aux éditions SEGUIER et au site BABELIO pour la lecture de cet ouvrage.
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