A la suite de bourgeois parisiens décidant de passer leur mois d'août dans une maison ultra isolée du Lot ( isolée, en 2018 c'est sans wifi et sans réseau pour les portables), le lecteur plonge avec délice dans le onzième roman de Serge Joncour. Sans un style remarquable mais avec l'efficacité d'un très faiseur, on sent tout de même que l'on tient là un bon roman grand public, bien troussé, surtout qu'à l'intrigue contemporaine, vient s'intercaler une deuxième se déroulant en 1914 au moment de la déclaration de la Grande Guerre. On sent tout de suite que ces deux histoires vont classiquement résonner l'une avec l'autre. Tandis que tous les hommes sont envoyés au front, l'arrivée dans ce hameau perdu d'un dompteur allemand fuyant les combats et désirant se mettre à l'abri pour sauver ses lions et ses tigres qu'il installe dans une ferme reculée, va créer l'événement. Alors que le couple bourgeois découvre sa location, effrayant l'homme qui s'inquiète vraiment d'être coupé du monde puisque son portable ne capte rien mais ravissant sa compagne éprise de sérénité et de silence, la première partie s'achève, l'histoire joliment posée.
Et puis, patatras, tout s'écroule ! Serge Joncour ne sait plus quoi faire de ses personnages. En 2017, les parisiens errent dans la nature en compagnie d'un chien-loup qui s'accroche à leurs basques. Cette partie pourrait se résumer par cet aphorisme ayant déjà beaucoup servi : " L'homme est un loup pour l'homme.", ici traité sans panache, en multipliant les clichés et des symboliques qui pourraient faire leur effet, si elles n'étaient pas inlassablement répétées jusqu'à en devenir lourdaudes ( à croire que pour Serge Joncour, le lecteur a déjà le cerveau ramolli par l'usage immodéré de son smartphone). Et ce n'est pas la partie 1914/1915 qui ravive l'ensemble, pouvant se résumer par : " La femme est l'avenir de l'homme". Le travail effectué par les femmes, leur courage, leur abnégation alors que leurs hommes ou fils servent de chair à canon, hommage sincère et juste, nous est hélas aussi ressassé jusqu'à plus soif et accompagné par les mêmes clichés pesant des tonnes ( les rugissements des fauves du dompteur symbolisant le désir sexuel grondant dans le ventre de ces femmes esseulées entre autres). Le roman patine donc autour de ces deux pôles qu'accompagnent aussi deux héroïnes totalement tendances puisque végétarienne pour l'une, voguant vers le végan pour l'autre. Une troisième partie, trop rapidement troussée et prévisible clôture cette histoire poussive.
Nous laisserons donc nos bourgeois tout heureux d'avoir retrouvé le bonheur dans les prés et, une fois le livre refermé, la possibilité, pour nous lecteurs, de nous diriger vers une littérature plus inspirée et plus consistante.
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