« Requiem pour une Apache » m’a fait penser à une pâtisserie, un gros gâteau extrêmement alléchant sur lequel on se jette avec gourmandise et que l’on commence à avaler goulûment, la gloutonnerie faisant fi de la saveur exacte. Puis vient l’écœurement... trop gros, goût unique et surtout beaucoup trop sucré.
Littérairement ça donne un narrateur ex vedette de la chanson qui nous narre le portrait de l’Apache du titre : Jolène, pas du tout indienne, juste caissière de supermarché, sans aucun trait saillant pour qu’on la remarque et un poil misanthrope. Ces deux là se sont rencontrés dans une sorte d’hôtel/bar/pension de famille, repère d’une faune de mal aimés. Ça va d’un ersatz de Bonnie and Clyde à Alphonse désormais trônant sur le bar dans une bassine depuis qu’il s’est liquéfié lors de la vision de son idole Anita Ekberg. Gilles Marchand nous décrit longuement cette bande de sinistrés de la vie avec saveur et poésie.
Au départ, c’est très plaisant, plein d’une humanité de bon aloi et avec la promesse d’une révolte menée par cette Jolène que l’on nous fait pressentir comme une future Louise Michel ou Rosa Luxembourg. Sauf que ces louables intentions vont petit à petit se noyer dans un récit qui va continuer à nous asséner des portraits, certes tendres, originaux, poétiques, mais aux dépens d’une intrigue qui n’avance guère ( le plus souvent par quelques phrases placées en début de chapitre). La lassitude gagne, les coutures deviennent franchement apparentes et cette galerie de personnages monolithiques finit par manquer cruellement de relief. A part Gérard, le résistant oublié dans le grenier de l’hôtel, tout le monde il est mal aimé, tout le monde il est gentil. Je me suis retrouvé dans un roman feel good, avec son envie de faire du bien ( c’est très tendance) et qui finit par sombrer dans la mièvrerie de bon aloi avec un final pseudo révolutionnaire totalement raté ( même façon requiem).
C’est donc un peu écoeuré par cette sucrerie que j’ai terminé ce roman dont le but ne m’est pas apparu. Si c’est pour donner de l’espoir à tous les mal aimés de nos sociétés ( en fait tout le monde, nous sommes tous la cible irascible que quelqu’un), la naïveté tue l’intensité. Si c’est pour mettre en forme les histoires que l’auteur a dans sa tête, il démontre que son cerveau est particulièrement fertile. Tous ces jolis portraits donneraient d’impeccables nouvelles, mais pour moi, pas vraiment un roman. Pour reprendre Gide, on ne fait pas de la littérature avec des bons sentiments. « Requiem pour une Apache » reste donc un roman gentillet qui engendre plus le ronron que la révolution promise.
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