Evacuons d'abord quelques faits biographiques qui pourraient injustement ranger ce texte (magnifique) dans les lamentations d'un pauvre fils de riches ( ici, lever les yeux au ciel pour dire qu'ils nous gonflent ces nantis avec leurs misères non essentielles). Oui, Camille de Toledo ( un pseudo) est fils et petit fils de grands industriels français. Oui, sa mère fut une grande journaliste économique et rédactrice en chef de revues faisant l'opinion. Mais, Camille de Toledo est surtout un remarquable écrivain qui nous livre, se livre dans un livre d'une rare intensité littéraire et intellectuelle.
Après le suicide de son frère ainé, puis la mort de ses parents, Thésée ( l'auteur) fuit la France pour vivre avec femme et enfants en Allemagne. Il embarque avec lui des cartons de photos et de documents récupérés après les décès des siens. Alors que son corps montre des signes de grande faiblesse, il se penche sur le contenu de ces archives. Les vies et les morts de ses ancêtres viennent alors éclairer sa vie d'une lumière nouvelle et terrible.
Le roman, façonné d'une écriture magnifique, rappelle dans sa première partie les mouvements de l'océan à marée montante. Avec une prose se rapprochant un peu du ressassement universitaire, chaque paragraphe, comme une vague de mots terribles, répétés pour mieux les intégrer, s'écrase sur la page tout en laissant apparaître un élément nouveau. Petit à petit, on s'enfonce dans les non-dits d'une famille. Le propos, certes intime, se teinte également de sociologie et de politique, mais surtout d'épigénétique ( en gros c'est la modification de l'expression de vos gènes en fonction de traumas passés). La dernière partie du livre, vous serre le coeur et porte cette histoire personnelle vers des interrogations et des impressions qui nous renvoient à notre 21 ème siècle si destabilisé.
"Thésée, une vie nouvelle" est assurément un des grands romans de cette rentrée, certes proposant une lecture exigeante mais ô combien enrichissante, passionnante et qu'une écriture admirable, associée à un propos jamais narcissique, porte vers des sommets.
Je l'ai noté, mais avec le confinement dans mon coin perdu, je ne sais quand je pourrai le lire
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