vendredi 17 septembre 2021

La fille qu'on appelle de Tanguy Viel


Si on le lit le nouveau roman de Tanguy Viel pour son histoire se déroulant dans un milieu provincial de bord de mer, on sera évidemment déçu. Laura, pour avoir un logement dans la ville où elle revient, rencontre le maire de la ville sur la recommandation de son père qui est par ailleurs le chauffeur personnel de l'édile. Le presque cinquantenaire, devant une belle jeune femme, n'hésite pas à jouer de son pouvoir pour obtenir quelques faveurs sexuelles. Que va-t-il se passer lorsque le père, ancien boxeur, l'apprendra ? On peut imaginer la conclusion sans trop de peine. 
Cependant, l'intérêt de ce roman est ailleurs, dans la narration qu'en fait Tanguy Viel. Tout d'abord il se met dans la tête et l'esprit de la jeune Laura, ce qui en période Meetoo est assez gonflé surtout dans une histoire de domination masculine.  Ce sera donc la voix de l'abusée qui nous entraînera dans les méandres d'une situation bien plus complexe qu'il n'y paraît, explorant cette zone grise qu'est le consentement. Dans un style impeccable, dense, le texte ausculte avec une précision chirurgicale comment l'emprise se met en place et tisse sa toile en se nourrissant bien sûr de la pression  ordinaire d'un homme de pouvoir mais aussi d'histoires plus anciennes dont les liens pas toujours visibles viennent s'insinuer silencieusement entre tous les protagonistes de cette histoire. 
Le texte, implacable, fait oublier les ressorts quelque peu ordinaires de l'intrigue, disséquant chaque fait et pensée avec une remarquable acuité. Et c'est donc pour cette remarquable analyse de l'emprise d'un mâle dominant sur une jeune femme qui emporte le lecteur.... à condition qu'il n'attende pas un récit façon thriller ou mélodrame. 

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