mardi 14 février 2023

Tortues de Bruno Pelegrino


Est-ce un roman ? Un recueil de nouvelles ? Une autobiographie ? Un essai sur la mémoire, les souvenirs si fugitifs? Un peu tout cela et ce sont toutes ses formes si diverses qui font de "Tortues" un livre étonnant. 
Bruno Pellegrino nous parle de ses obsessions pour les vieilles choses, objets, archives, vieilles dames, de son envie de vouloir conserver des traces du passé, essentielles, et ce, dès l'enfance, sous la forme d'un tiroir où il avait rangé tout ce qui lui semblait important et qu'il emporterait si jamais sa maison brûlait. 
De cette fixette enfantine et de sa passion pour la littérature ( aussi bien la grande que la plus anonyme) il va en faire le sel de sa vie, étant appelé à mettre de l'ordre dans la paperasse d'une écrivaine décédée ou en se lançant sur les traces d'une obscure poétesse Suisse voire se faufilant avec autant de naïveté que de pugnacité chez la veuve de Friedrich Dürrenmatt. 
Cela pourrait sembler poussiéreux, poseur, intello, un peu savant, voire ratiocineur alors que c'est tout le contraire. Bruno Pellegrino possède trois choses essentielles pour un écrivain ( que beaucoup n'ont hélas pas) : un réel talent d'écriture, dans un style impeccable aussi ample que vraiment lisible, un vrai regard singulier sur la vie et le monde et surtout le pouvoir de créer un livre bourré de... il n'y a pas d'autre mot...  charme. Il y a du Modiano ( et j'ose le dire, en mieux) dans cette volonté de retenir des détails, des atmosphères du passé et là où il se différencie du maître, c'est que lui, en filigrane, il esquisse avec subtilité son autoportrait sans que ce soit jamais m'as-tu-vu, s'effaçant sans jamais disparaître dans les portraits qu'il dresse des autres personnages qu'il met en valeur. Il y a dans ces textes une très belle sensibilité, une poésie qui n'exclue pas la dérision, une attention aux êtres et aux choses disparues jamais sinistre, une authentique empathie, ... bref un vrai et grand charme littéraire. Pour moi, un coup de coeur et une vraie découverte. 
Bruno Pellegrino écrit : " ... Observer des vies passées, m'aide à m'orienter dans la mienne" et l'on peut dire que lire ces vies passées ( et présentes) aide à embellir la mienne. 



 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire