Honnêtement, c'est avec une certaine circonspection que j'ai ouvert " Le fumoir" , pas vraiment persuadé qu'un récit supplémentaire sur les hôpitaux psy soit nécessaire, surtout signé par un fils de ...qui fleure le copinage parisien et éditorial. ( Marius Jauffret est bien le fils de Régis).
Accompagné d'une écriture blanche, façon impersonnelle à l'image des murs d'un établissement psychiatrique, nous suivons le parcours de Marius, jeune adulte, d'une soirée passée dans un bar à s'alcooliser jusqu'à la mise en route de ce livre qui narre longuement son passage au centre médico psychiatrique Varenne.
Jusqu'ici me direz-vous, rien de nouveau sous le soleil, de tels récits sont publiés régulièrement depuis des décennies. Et pourtant, il faut l'avouer, mine de rien, au fil des pages, sans jamais en rajouter ni trop tirer la couverture à lui, Marius Jauffret finit par attirer toute notre attention. Très vite on oublie le fils de... qu'il est ( on ne saura rien de son connu de père, à peine nommé sur trois ou quatre lignes). On plonge dans un lieu franchement inhumain, sordide, qui ne semble avoir guère évolué depuis un siècle si ce n'est par un hall d'entrée pseudo moderne agrémenté de quelques plantes vertes.
Au fil de son expérience, le sens profond du livre nous éclate au visage. Oui, chaque année en France, on "hospitalise" 100 000 personnes sans leur consentement, envoyées le plus souvent par un médecin des urgences via un employeur, un proche, un voisin,...). Une fois à l'intérieur d'un de ces hôpitaux, si on n'a pas de famille, on en sort moins facilement que d'un quartier de haute sécurité. En ce moment, dans notre pays, il y a plus d'internés que de prisonniers... Combien n'ont rien à faire là sinon plonger encore plus profond? Combien pourront-ils sortir des griffes des médecins psychiatres, véritables despotes de cet univers qui n'a de médical que le nom ?
Marius Jauffret, sans sensiblerie, sans esbroufe et finalement grâce à cette écriture blanche, parvient à toucher son lecteur et finit par emporter le morceau. Exit, le fils de... et bonjour à un document dont l'authenticité convainc mieux qu'un long discours touffu. Joli premier livre témoignage.
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