jeudi 14 janvier 2021

Dans les vestiaires de Timothé Le Boucher


Après les succès de " Le patient et de "Ces jours qui disparaissent" , ressort le deuxième album de Timothé Le Boucher paru en 2014. Avec le rajout d'un "dans ", le titre se veut plus explicite et surligne ainsi une action qui se déroulera, jeudi après jeudi dans les vestiaires de garçons, d'une même classe de collège. 
L'idée de remettre sur les tables des libraires, évidemment influencée par l'accueil enthousiaste du public pour ses deux dernières productions, se révèle somme toute une excellente initiative. Dans une époque où les questions de harcèlement ( sexuel ou contre les femmes) occupent une grande place dans nos sociétés, cet album de jeunesse de ce talentueux auteur, abordait déjà ces problématiques mais l'auscultait côté jeunes mâles en devenir, comme le creuset d'un futur dont on ne pourra que se méfier. 
Rien n'échappe à l'oeil d'entomologiste du scénariste/dessinateur, observant ces ados dans cette cage qu'est ce vestiaire. Il y décrit les clans, les leaders et les loosers, les hormones qui bouillonnent, ces corps qui n'osent se dénuder puis qui vont jouer de leur supposée virilité( naissante), les poils qui poussent ou pas, ce sexe dont la taille prend ( bêtement) tant d'importance, le voyeurisme, l'exhibition, les moqueries, le harcèlement des plus gros, des moins branchés, de ceux qui n'ont pas les bonnes marques, l'envie du féminin, la peur de l'homosexualité. On y suit la confrontation de ces groupes, où, sous des airs potaches, leur équilibre s'avère aussi fragile que leurs certitudes et qui rappelle que jamais on ne peut deviner réellement ce qui se mijote dans les cerveaux des adolescents, aussi bien harceleurs que harcelés. 
Avec un scénario bien construit qui va crescendo dans la tension, le récit, de plus en oppressant, nous amène vers un final plutôt surprenant. Timothé Le Boucher, observe, décrit, donne à ressentir mais ne donne apparemment pas de leçon, laissant le lecteur faire son propre cheminement, sa propre réflexion, donnant ainsi à son roman graphique une ampleur peut être ambiguë mais sacrément troublante. 
La couverture de cette ressortie offre un nouvelle illustration par rapport à l'édition originale, montrant combien le trait de l'auteur a évolué en quelques années. On ne retrouvera donc pas cette ligne claire, dorénavant très maîtrisée, dans ces pages anciennes, montrant un dessin moins affirmé, balbutiant peut être, rappelant un peu Bastien Vives, mais collant parfaitement à ce récit d'apprentissage déjà très réussi. 



 

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