samedi 10 juillet 2021

Benedetta de Paul Verhoeven


 Et l'esprit saint...heu non, l'esprit Netflix est tombé sur le cinéma ! "Benedetta" en est la preuve bien réelle, ses producteurs ont trouvé l'équation idéale pour arracher les spectateurs de devant leurs téléviseurs, un film distrayant mais avec plus de violence, de sexe voire de transgression que ne le permettent les séries des plateformes de streaming toujours un peu timorées quand il s'agit de heurter un public à visée internationale. 

Le spectacle proposé par Paul Verhoeven, bien plus réussi que le très surestimé "Elle", a intégré les codes des récits actuels : un rebondissement toutes les cinq minutes car le spectateur risque de s'ennuyer et, pour  donner un cachet moins planplan qu'à la télé pimenter régulièrement de scènes de sexe où l'on ne cache rien ou d'un truc bien violent ou gore, genre torture, jet de sang, sadisme... 

Tout le reste n'est qu'un habillage de cinéma, avec un 17ème siècle italien qui ressemble plus à une sorte de Moyen-âge vite reconstitué sur une seule et même place ( donc avec tous les clichés cinéma, les baladins, les marchands de fruits,...) et des personnages principaux aux allures très contemporaines. La nonne Efira, avec ses mèches blondes toutes droits sorties d'un grand coiffeur, une gestuelle ou un franc-parler très actuels, font que déjà, on se détache du pensum intello historique et que ce film n'est qu'une fiction faite pour plaire. On adorera aussi les belles chemises de nuit en lin , avec une longue ouverture sur l'avant qui sont portées à même le corps par toutes ces nonnes décidément très libres ( bien plus qu'aujourd'hui!). 

Le petit plus de "Benedetta" est sans doute le fait que ce soit Paul Verhoeven qui soit au scénario et derrière la caméra. On peut y trouver donc ce qui fait son charme vaguement sulfureux : oser les sujets à scandale. En s'octroyant toute la bimbeloterie de la chrétienté, tous les faux-semblants, les duperies des religieux, en les montrant sous un jour plutôt caustique, le réalisateur ne choquera pas pourtant grand monde tellement tout cela a déjà été maintes fois montré à l'écran. Et ce n'est pas la fameuse statuette de la vierge transformée en godemichet qui mettra les foules catholiques en colère, elles en ont vu d'autres ...  On se distraira plutôt de la façon dont il malaxe toute cette imagerie religieuse, transformant Jésus en une sorte de super-héros ( moments comiques du film) , les nonces et autres dirigeants en de sacrés jouisseurs ou d'infâmes commerçants. Là encore ce n'est pas nouveau, mais grâce à de savoureux dialogues et d'excellents comédiens, on se laisse séduire. On peut par contre être un peu plus agacé par le côté monomaniaque de Paul Verhoeven dont on vante le côté féministe car présentant des femmes fortes libres de leurs désirs, ne peut s'empêcher de les dénuder toutes, assez complaisamment, de Virginie Efira à Guilaine Londez, seule Charlotte Rampling y échappe et évidemment tous les hommes du film ( alors que Lambert Wilson a une scène qui aurait pu tout à fait justifier qu'il puisse lui aussi exhiber son anatomie). 

"Benedetta",  film survendu par une promo qui frise le délire mystique ( "Faut qu'on l'amortisse, coco, les films en costume avec des stars ça coûte bonbon!"), n'est au final qu'un (bon) film distrayant, bien fichu scénaristiquement, mais qui n'atteint aucun des sommets cinématographiques promis. Le miracle dans ce bric à brac religio/sexy est que les acteurs s'en tirent à merveille, Virginie Efira en tête ... malgré les excès et les anachronismes. 



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