lundi 7 novembre 2022

L'ange rouge de Yasuzo Masumura


Arrive-t-il encore de nos jours, au cinéma, de sortir d'une salle étonné par un film ? Emu, oui. Ayant passé un bon moment, aussi. Mais surpris, même après une Palme, un Lion d'or, très rarement. "L'ange rouge" film du très prolifique réalisateur japonais Yasuzo Masumura, passé assez inaperçu lors de sa sortie en France en 1969 ( mais avait été tourné en 1966) a tout de la belle surprise. 
Dans un beau noir et blanc, le récit se déroule en Chine durant la guerre Sino-japonaise. Les japonais, alors très guerriers et expansionnistes, pensaient conquérir en trois mois une partie de la Chine orientale ... ( ça rappelle quelque chose en ce moment non ? ). Le conflit s'est enlisé et fut très meurtrier. Le réalisateur a planté sa caméra dans un hôpital militaire qu'une jeune et jolie infirmière rejoint. Sans rien révéler du film ( pour garder la surprise), on va juste dire que la jeune Sakura lors d'une ronde de nuit va se faire violer par un groupe de malades. De ce traumatisme, pourrait naître un sentiment de haine, de vengeance, mais ce sera tout le contraire, elle déclenchera une immense pitié envers tous ces hommes, ces soldats blessés, mutilés, qui souffrent des horreurs de la guerre. 
Avec un discours anti-militariste, discours qui se fait rare dans le cinéma depuis des années, le film n'occulte vraiment rien ( mais vraiment rien) des horreurs de la guerre, de la perversité du commandement qui laisse croupir ses hommes mutilés plutôt que de les renvoyer chez eux où ils feraient une contre publicité. Et au milieu de cet amas de corps déchirés et souffrants, le cinéaste bâtit une histoire où se mêlera romance et érotisme sans jamais tomber dans la niaiserie, la facilité. Eros et thanathos, souffrance et volupté font ici bon ménage, de façon plus abordable et plus passionnante que chez Cronenberg par exemple. 
Bien sûr, les âmes sensibles devront peut être s'abstenir de voir "L'ange rouge" car rien ne nous est épargné des opérations, des amputations, on voit sans réellement voir mais une bande son très naturaliste aide beaucoup à visualiser. Pour les autres, à mille lieux des nouveautés "formidables" que l'on nous vend toutes les semaines, il est certain que ce film ne pourra que surprendre par son scénario franchement audacieux et par sa belle réalisation classique mais ultra efficace. C'est avec les vieux films que l'on s'offre les belles séances. 
( Ressort également "Tatouage",  un autre film provocant du réalisateur comme le montre la bande annonce ci-dessous. 





 

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