Le fils d'une académicienne, lui-même auteur à ( grand) succès, fait tourner une star oscarisée dans un film traitant des conditions de travail d'employés rendus invisibles par une société qui regarde ailleurs. On peut sourire ( jaune) sur cette façon très bobo de faire du social tout en présentant un film au budget de 5 millions d'euros à Cannes ( Bling, bling !) avec espoir d'un bon retour sur investissement.
Remballons toutefois cette aigreur et intéressons-nous plutôt au résultat de cette ( libre) adaptation du récit de Florence Aubenas ( "Le quai de Ouistreham") dans lequel elle se faisait embaucher incognito comme femme de ménage pour mieux raconter la précarité. Les auteurs du scénario ont sérieusement changé le regard de cette histoire. En transformant la journaliste en écrivaine, qui plus est jouée par une star, le film prend une direction à peine évoquée dans le livre, celle de l'imposture. Et c'est plutôt bien vu, car, la toile de fond sur les dures conditions de travail de ces hommes et de ces femmes qui triment à toute vitesse dans des villages de bungalows ou sur un ferry, platement filmée ( nous sommes loin de Ken Loach ou des frères Dardenne), ne brille guère. En revanche, cela permet à l'écrivaine, Juliette Binoche, de pouvoir s'intégrer parfaitement à cette histoire ( elle est star, on voit sa belle composition), de jouer sans arrêt avec cette ambiguïté, sur ce qu'elle tait ou que l'on sait de sa vie réelle ou de fiction ( remarquables scènes au pôle emploi) et pour que finalement cette fracture sociale devienne un enjeu majeur du film. Sur cette thématique, le film fonctionne très bien et dresse même un constat glacial qui lui évite de tomber dans l'écueil de la bien-pensance bobo à laquelle quelques scènes sur la forte amitié entre l'écrivaine et une femme de ménage aurait pu conduire.
Si on ne retrouve pas tout à fait le récit plus journalistique de Florence Aubenas, le cinéma ayant choisi de créer une histoire de forte amitié, on peut tout à fait voir ce film sans les aigreurs évoquées plus haut car le sujet reste fort, très bien joué ( la non professionnelle Hélène Lambert est plus que formidable), émouvant parfois.
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