samedi 29 janvier 2022

34e Fesrival Premiers Plans d'Angers ( 2) ou la suite


La deuxième partie du festival fut tout autant intéressante que la précédente malgré les masques et les buveuses ( désolé du féminin, c'est vérifié) maniaques qui ouvrent une gourde métallique ( donc bruit ) toutes les 5 minutes pour boire une gorgée et refermer la même gourde avec le même petit bruit de métal dont la régularité donne parfois envie de faire avaler l'objet à sa propriétaire ( et c'est la même qui dérange pendant le film toute la rangée pour aller faire pipi et donc revenir... sans doute avec sa gourde de nouveau remplie). 
Pas de gourdes dans les longs-métrages présentés en compétition, juste beaucoup d'héroïnes attachantes et aux vies pas très simples surtout si on habite en Ossétie du Nord comme Ada, l'héroïne du fébrile et oppressant film russe "Les Points desserrés" de Kira Kovalenko, par ailleurs compagne de Kantemir Balagov ( "Tesnota" qui avait gagné ici en 2018) dont on retrouve la même obsession de cinéma à l'épaule, au plus près de personnages vivant dans une certaine précarité. Du cinéma immersif, autour du thème de l'emprise  mais avec toutefois un petit air de déjà vu et aussi une certaine suffisance genre regardez comme je sais bien filmer Mme/Mrs les festivaliers. 
Si on habite en Bulgarie,  entre un grand-père autoritaire, une mère perdue dans l'astrologie,  un pays qui se déchire sur des lois sur le genre et pour peu que l'on se retrouve séropositive à 19 ans, la vie n'est pas rose non plus. Les héroïnes de " Women Do Cry" de Mina Mileva et Vesela Kazakova, se battent pour leur liberté, et le film, petit brûlot féministe dans sa première partie, finit par péter un câble dans sa deuxième moitié et perd soudain beaucoup de son intérêt. 
Nous avons aussi rencontré Nelly, une jeune danseuse grecque qui ne rencontre que des mecs qui la font aller vers les ennuis ...et les films pas terribles pourrait-on rajouter, tant "Broadway" de Christos Massalas, s'efforce un peu vainement à créer une atmosphère déglinguée, décalée, peut être symbole un peu lourde d'une Grèce au bord de l'abîme.
Mais, rassurez-vous, nous avons aussi croisé des personnages masculins, notamment ceux du film Austro-franco-belge de C.B. Yi ( Tiens à Cannes lors de la présentation du film à Un certain regard, il s'appelait encore Yilin Chen Bo...) . Ce sont des "Moneys Boys", prostitués chinois qui en plus des affres liés à leur gagne-pain se débattent avec les traditions familiales. Filmé avec une grande élégance de mise en scène, le film, sans éluder les problèmes, se disperse un peu pour finir par s'intéresser à une histoire d'amour qui n'apparaît pas comme l'élément le plus intéressant. 
Et puis, reste le personnage qui a sans doute le plus remué les spectateurs : "Bruno Reidal"  de Vincent Le Port, jeune séminariste qui en 1905 a tué et décapité un jeune voisin. Le film, d'une réelle beauté plastique, classique en apparence dans sa narration, s'avère nettement plus subtil, travaillant avec une rare acuité la possibilité de trifouiller dans l'intimité du spectateur, de le faire réagir, réfléchir, sur un crime horrible sans cesse éclairé avec des notes discordantes et donc déstabilisantes. Voici un sacré candidat pour le grand prix et de toute évidence, un réalisateur sur lequel on devra compter. 
Côté courts-métrages, nous avons dû voir la crème en début de festival, car la deuxième salve n'a pas suscité d'émois particuliers, labourant de façon plus convenue ou scolaire, des thèmes pas emballants. 
Nous verrons bien ce que les jurys menés par Melvil Poupaud et Chloé Mazlo vont bien distinguer tout à l'heure...
En tous les cas, cette édition ( masquée et pourvue de gourdes) continue de démontrer la vitalité du jeune cinéma européen, avec une sélection beaucoup plus intéressante que celles des années précédentes. Un bon signe en ces années troublées...
PS : 
Et le verdict est tombé. Le jury a récompensé le ( formidable) film  "Sous le ciel de Koutaïssi"  de Alexandre Koberidze, conte poétique original qui a dérouté certains spectateurs mais qui prouve d'emblée que l'on affaire à un cinéaste ayant un univers bien à lui. Vous pourrez vite en juger par vous même, le film sortant le 23 février prochain. Les prix d'interprétation sont allés à deux comédiens imparables jouant dans deux films très remarqués, la russe Kira Kovalenko pour " Les poings desserrés" et surtout pour la magnifique interprétation de Dimitri Doré , véritable révélation de ce film qui a de très forte chance d'être un jeune acteur à suivre de très près ! Et pour couronner le tout, le prix du public est allé au film norvégien "Ninjababy" d'Yngvild Sve Flikke , épopée contemporaine, créative et parfois crue autour de la maternité, le seul long qui a fait rire le festival tout en étant aussi très porté sur la réflexion et la créativité ( sortie le 16 mars). Cette année, le palmarès frise le sans faute ! 



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