jeudi 20 octobre 2022

Débarquer de Hugo Boris



Pour un romancier, alors que tant de choses ont déjà été écrites, trouver un sujet et arriver à être original relève du talent ( oui, je sais, ça ne concerne pas touts ceux qui publient en ce moment, mais sont-ils romanciers ou simplement de plus ou moins bons faiseurs? ). Prenez le dernier roman d'Hugo Boris qui met en scène un soldat américain pris en plein débarquement en juin 44 et revenant des décennies plus tard sur les plages normandes, on se dit que c'est classique et pas emballant d'originalité. Si en parallèle vous y ajoutez une mère de famille seule avec ses deux enfants en bas âge qui officie comme guide touristique sur ces mêmes plages, vous imaginez tout de suite les liens qui peuvent se créer entre ces deux personnages, l'émotion que l'on peut en tirer, le romanesque fouetté par le vent normand qui balaie le sable où sont enfouis une tonne de souvenirs.  Sauf que...vous n'êtes pas Hugo Boris. Si de l'émotion il y aura, elle n'arrivera pas de la façon la plus attendue. Quant à la  rencontre de ces deux personnages, elle ne prendra pas non plus  la forme que l'on pense. 
"Débarquer" nous surprend constamment. Le premier chapitre, véritable morceau de bravoure, nous plonge d'emblée dans une revisite du soldat Ryan, en plus précis, plus organique, plus intime. On n'a pas le temps de reprendre notre souffle que nous sommes projetés plus de 70 ans plus tard dans le sillage d'une mère de famille dépassée par les événements de la vie. C'est un autre tourbillon qui nous attend dans un automne où l'on ressent déjà le froid des bourrasques normandes avec cette femme sous tranquillisants. Elle court, elle délaisse sa maison, ses enfants aussi, multiplie les galères dans une journée qui lui fera rencontrer un vétéran américain. Avant le face à face de ces deux là, le romancier appuie ( peut être un poil trop par  moment) le portrait psychologique de son héroïne qui se débat avec un passé récent tragique. La rencontre surprendra, étonnera, énervera le lecteur, car ne se déroulera pas du tout comme on pouvait s'y attendre. Mais, grâce en partie à tous ces contre-pieds, un final franchement émotionnel,  pas mal cinématographique ( un poil trop bref peut être) nous saisira et nous montre qu'au-delà du temps, des espaces, certaines histoires tissent des liens inespérés qui peuvent soulager les peines ( c'est classique mais ça fonctionne toujours).
Un joli roman, bien écrit, qui ne déparera pas dans la belle bibliographie de son auteur. 


 

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